La Furia Roja portait le maillot bleu - pas nécessairement un signe encourageant, comme en témoigne l'exemple de la France et de l'Italie - mais ce mauvais présage ne l'a pas empêchée de vaincre sans trop de mal une Roja trop indisciplinée pour son bien.

Mêlés dans les surnoms? OK, on recommence. L'Espagne a profité des nombreux cartons du Chili et d'une gaffe du gardien adverse (une autre!) pour l'emporter 2-1 et ainsi assurer sa qualification en tête du groupe H.

 

Le champion européen en titre affrontera donc mardi son grand rival, le Portugal, dans un match 100% ibérique qui promet de faire des étincelles.

Des étincelles, il y a en a déjà eu pas mal, hier soir au stade Loftus Versfeld de Pretoria. Des jaunes et surtout une rouge - allusion ici au carton ayant valu au milieu chilien Marco Estrada d'être expulsé à la 37e minute, au moment où le milieu barcelonais Andres Iniesta, de retour au jeu après une absence d'un match, marquait ce qui allait s'avérer le but vainqueur.

C'était le quatrième carton de la demie pour le Chili, qui passe en ronde des 16 malgré sa défaite, en vertu de ses victoires antérieures contre le Honduras et la Suisse. Résultat de cette pluie d'avertissements: non seulement l'entraîneur Marcelo Bielsa a-t-il dû réarranger son 4-3-3 en 3-3-3, mais il devra se passer de trois joueurs lors du prochain match du Chili, lundi. Estrada et les arrières Waldo Ponce et Gary Medel sont tous suspendus. C'est ce qui s'appelle se compliquer la tâche, surtout que le Brésil sera l'adversaire.

Fort potentiel offensif

Reste que pour l'amateur de beau soccer, l'essentiel est là: l'Espagne et le Chili restent en vie. On ne veut rien enlever au Honduras et à la Suisse, leurs deux rivaux du groupe H. Mais leurs totaux respectifs de zéro et un but en trois matchs expliquent en partie pourquoi le Mondial 2010 affiche jusqu'ici le plus faible total de buts de l'histoire. À l'opposé, l'Espagne et le Chili figurent parmi les équipes ayant le plus fort potentiel offensif dans ce tournoi.

Ce potentiel était évident pour tout le monde, hier - sauf peut-être pour le collègue japonais qui a dormi sur mon épaule pendant toute la première demie. Fernando Torres, de la tête puis du pied droit, a raté deux occasions en or à l'intérieur des cinq premières minutes.

Le Chili a ensuite pris l'ascendant. Alexis Sanchez, notamment, a fait travailler le gardien espagnol Iker Casillas avec un superbe tir lobé à la 14e minute. Mais c'est l'Espagne qui a pris les devants, 10 minutes plus tard, quand David Villa a fait payer au gardien Claudio Bravo une sortie audacieuse visant à freiner Torres, qui menaçait sur la gauche.

Au lieu de tacler le ballon en touche, Bravo - pas d'applaudissements pour lui - l'a repoussé directement au pied de Villa, dont la frappe d'une quarantaine de mètres a trouvé le fond d'un filet complètement désert. Troisième but du tournoi pour Villa, qui s'impose comme un des meilleurs joueurs jusqu'ici.

Forcé de jouer à 10 après l'expulsion d'Estrada, le Chili a rétréci l'écart à la 47e minute, le substitut Rodrigo Millar jouant de chance pour battre Casillas, son tir déviant sur un défenseur. Mais les efforts chiliens n'ont pas donné d'autre résultat. Le dernier quart d'heure a été d'un ennui mortel, le Chili adoptant une position attentiste, fatigué d'avoir pourchassé le ballon toute la soirée et visiblement confiant que la Suisse, à l'oeuvre en même temps à Bloemfontein, ne parviendrait pas à marquer deux buts et ainsi lui chiper sa place en huitièmes de finale.

Favorite de bien des experts, l'Espagne poursuit donc sa route, deux ans après son sacre européen. Une victoire contre le Portugal est tout sauf acquise. Mais si l'Espagne y parvient, un match de quarts contre le gagnant du duel Paraguay-Japon est dans les cartes, suivi, si la logique est respectée, d'un affrontement contre l'Argentine, le Mexique, l'Angleterre ou l'Allemagne en demi-finale. L'Espagne rêve d'un premier titre mondial. Mais la route qui y mène est décidément pleine d'embûches.