Sergei Kostitsyn était un héros sportif à Montréal il n'y a pas 18 mois, après avoir obtenu deux points dans le septième match éliminatoire contre Boston, pour porter son total à six au cours de cette série.

On n'épiloguera pas sur ses frasques à l'extérieur de la patinoire et son manque de constance sur glace. Mais nous voici, un an et demi plus tard, et Sergei disputait hier soir un match au Centre Bell dans l'uniforme des Bulldogs de Hamilton, tandis que les jeunes Guillaume Latendresse, Maxim Lapierre, Max Pacioretty, Tom Pyatt, Ryan White, Kyle Chipchura et Gregory Stewart étaient avec le Canadien, à Boston, la veille.

Après avoir d'abord refusé de se rapporter aux Bulldogs à la fin du camp d'entraînement du CH en septembre, puis avoir abandonné cette même équipe quelques semaines plus tard avant de se raviser à la suite d'une rencontre en privé avec Bob Gainey, Kostitsyn jurait avoir changé, hier matin avant le match, et assurait qu'il tenait à demeurer au sein de l'organisation, en espérant un rappel.

Mais il faut plus que montrer patte blanche et quelques bons matchs pour convaincre les partisans du Canadien. Kostitsyn a en effet reçu un bien drôle d'accueil, hier, de la part des 14 702 spectateurs. Certes, il n'a laissé personne indifférent. Mais il aurait sans doute souhaité moins de huées, que les pro-Kostitsyn se chargeaient d'enterrer avec des applaudissements.

Kostitsyn n'a rien fait pour regagner le coeur de ses fans perdus lors du match d'hier, perdu 2-1 aux mains des Senators de Binghamton. Où était la belle vitesse qui le caractérisait? À part peut-être une présence ou deux en supériorité numérique en troisième période, le jeune frère semblait attendre que la rondelle vienne à lui plutôt que de provoquer des jeux. Les Bulldogs ont obtenu 37 tirs au but mais Kostitsyn, aucun. On comprend un peu mieux pourquoi il n'a pas été le joueur rappelé des mineures cette semaine.

«Ce n'était pas un match facile pour lui ce soir, a précisé l'entraîneur-chef Guy Boucher. Il était le joueur que les gens voulaient voir à l'oeuvre. Il a amélioré certaines choses, mais il doit encore améliorer les choses qu'on lui demande d'améliorer. Il doit utiliser davantage sa vitesse que ses mains. En ce moment, il a tendance à surtout se servir de ses mains, ce qui fait en sorte qu'il ne semble pas avoir de vitesse, alors qu'il en possède.»

On sentait Boucher déçu par la performance collective de son équipe, qui a subi un premier échec en temps règlementaire cette saison. Les Bulldogs ont été très mauvais dans les deux premiers engagements, avant de montrer les dents avec une dizaine de minutes à faire, fouettés par le premier but de la saison du jeune P.K. Subban à l'aide d'un puissant tir au but.

«Je sentais beaucoup de nervosité sur notre banc, a admis Boucher. Il y avait beaucoup de gens dans les gradins, nos jeunes voulaient trop bien faire. Dans ces circonstances, tu peux geler ou te battre. On a été gelés trop longtemps. Notre grande force réside habituellement dans le jeu de transition. Nous ne l'avons pas montré. Nous n'avons pas fait ce que nous devions faire en supériorité numérique. En situation de stress, le corps humain revient à ses vieilles habitudes. Les joueurs en ont oublié les principes de base qu'on avait pourtant enseignés dès le premier jour du camp. Mais ce n'est pas juste ce groupe de joueur, les Bulldogs de Hamilton n'ont jamais gagné à Hamilton par le passé non plus.»

Toujours aussi peu loquace, Sergei Kostitsyn a néanmoins admis que la réaction de la foule ne l'avait pas laissé indifférent. Il a choisi l'ironie. «J'ai adoré ça, c'était gentil», a-t-il lancé en riant un peu jaune.

«Merci beaucoup!», a-t-il pris soin d'ajouter... en français.

Son nouveau grand frère, le capitaine Mathieu Darche, n'a pas jugé nécessaire de rassurer Kostitsyn sur le banc après avoir entendu les huées. «Honnêtement, je n'y ai presque pas porté attention. De toute façon, Sergei est un professionnel, je pense qu'il s'y attendait un peu. Il connaît Montréal. Il a quand même joué un bon match. Il a travaillé. Mais dans l'ensemble, ça n'a pas été une soirée évidente. Ce n'est pas seulement la foule, les gars savaient que le directeur général et les entraîneurs nous regardaient.»

Parmi les éléments plus positifs, Subban a connu une bonne troisième période pour donner beaucoup d'énergie à son équipe. «Subban est destiné à connaître une carrière dans la Ligue nationale, a ajouté Darche. Et j'en ai vu en 10 ans des bons défenseurs. Il a encore des choses à travailler, mais il a l'entraîneur idéal, en Guy Boucher, pour se développer.»