Partout en Amérique du Nord, les stations de ski décident - de leur propre gré - de bannir la fumée de leurs installations. Cette interdiction s'implante progressivement au Québec, malgré l'opposition de certains amateurs de sport. Et si on vise avant tout la consommation de tabac, le cannabis est lui aussi dans la ligne de mire.

C'est notamment le cas au Mont-Saint-Sauveur où, vendredi, des centaines de skieurs et de planchistes profitaient de leurs derniers jours de congé sous un soleil étincelant.

Une poignée d'entre eux étaient assis à proximité du chalet principal et grillaient tranquillement leur cigarette dans une aire où ils ont la permission de fumer. Depuis le début de la saison, l'administration du Mont-Saint-Sauveur a interdit à ses visiteurs de fumer dans les files d'attente et dans les télésièges.

Une vague de fond

La station de ski Whistler Blackcomb, en Colombie-Britannique, dispose d'un tel règlement depuis trois ans. «Nous avons une politique de tolérance zéro sur la fumée. Peu importe de quel type de fumée il s'agit, que ce soit de la cigarette ou du cannabis, il est strictement interdit de fumer à Whistler», assure le porte-parole Peter Jean, qui ajoute que la «majorité» des skieurs et planchistes respecte la consigne.

D'autres stations de ski du Québec, dont le Mont-Sainte-Anne et Stoneham, s'apprêtent à emboîter le pas. «Nous suivons la vague puisque des règlements semblables existent un peu partout ailleurs», souligne Samantha McKinley, porte-parole de Mont-Sainte-Anne/Stoneham.

«C'est en quelque sorte un prolongement de la loi antitabac, soutient François-David Rouleau, porte-parole de Mont-Saint-Sauveur. Nous encourageons l'activité physique et le bien-être. L'idée d'interdire la cigarette dans les lieux où les gens sont collés les uns sur les autres s'est imposée d'elle-même. Il s'agit d'une question de respect.»

Les party animals

Le chroniqueur de ski Roger Laroche est partisan d'un tel règlement. «La fumée indispose plusieurs personnes et les cendres risquent toujours de brûler les vêtements des autres sportifs, dit-il. Et tant mieux si ce règlement éloigne les party animals qui fument du pot avant de descendre les pentes. Il y a vraiment un laisser-aller un peu partout au sujet de l'utilisation des substances illicites.»

De nombreux amateurs de ski ne voient pas les choses de la même manière.

Assis de travers, cinq adolescents fument des cigarillos sous le regard indifférent de la foule, au Mont-Saint-Sauveur. «Fumer, ça fait partie de la culture du ski et du snowboard. Pourquoi bannir la fumée en plein air? s'interroge Jonathan, 15 ans. L'alcool, le pot, la cigarette... Ça arrive tout le temps. Les skieurs le savent, les patrouilleurs aussi. Les stations de ski sont pleines de gens qui sont là pour faire le party. Qu'on laisse les gens faire ce qu'ils veulent.»

Pas moins de 30% des planchistes québécois âgés de moins de 20 ans ont reconnu avoir consommé de la marijuana avant de dévaler les pentes en 2007, révèle une étude menée par la chercheuse Linda Paquette de l'Université de Montréal.

«Ça n'a aucun impact sur notre sécurité», assure Jonathan, amateur de planche à neige. Pourtant, ce sport est responsable de près de 10% des traumatismes d'origines sportive et récréative, selon l'Institut national de santé publique du Québec.

«Que 30% des répondants disent s'être adonnés à leur activité sous l'effet du cannabis, c'est un résultat clair. Cela semble énorme», affirme Mme Paquette.

Des effluves de pot

Cet état de fait n'existe pas qu'au Québec. De nombreuses stations de ski américaines bannissent, dans leurs règlements, l'usage de toute substance illicite. Et un sondage réalisé en 2003 par l'Agence de la santé publique de l'État de Nouvelle-Galles-du-Sud, en Australie, a révélé que près de 80% des skieurs et planchistes consommaient de la drogue avant ou pendant leur parcours sur les pentes.

«La consommation de cannabis sur les pentes est répandue au Québec, croit le chroniqueur de ski Guy Thibaudeau. À Stoneham, au mont Avila... pas besoin de s'aventurer bien loin pour sentir des effluves de pot, dit-il. Mais il est difficile d'agir. On ne peut pas surveiller des milliers de personnes.»