L'heure du grand bingo quadriennal est arrivée: combien le Canada gagnera-t-il de médailles aux Jeux olympiques? Je n'ai pas la prétention de connaître la réponse avec certitude, mais je me doute qu'il en gagnera moins que vous ne l'espérez.

Le Comité olympique canadien (COC) espère que le pays se faufilera dans le top 16 pour le total des podiums, quatre ans après qu'une récolte de 12 médailles (trois d'or, six d'argent et trois de bronze), la plus faible du pays depuis Séoul en 1988, lui eut valu le 19e rang aux Jeux d'Athènes.

Ça ne sera pas de la tarte. Au cours des dernières semaines, l'establishment sportif canadien a d'ailleurs semblé s'efforcer de calmer le jeu. Un top 16 représente «un objectif ambitieux», a reconnu la chef de mission Sylvie Bernier. «Ce sera sans doute difficile», a renchéri le directeur du programme Vers l'excellence, Alex Baumann, qui ne s'attend pas à des «améliorations drastiques» par rapport à 2004.

Cette prudence - ce pessimisme déguisé? - est parfaitement compréhensible. Le COC a certes entrepris depuis quatre ans un important et nécessaire virage en s'occupant finalement de performance sportive plutôt que de banales questions d'intendance comme la coupe et la couleur des uniformes olympiques.

Mais on n'a rien sans rien. Et le financement supplémentaire qu'Ottawa a débloqué en février dernier pour les sports d'été - un total de 24 millions pour 2008 et 2009 et 24 millions par an par la suite - est arrivé beaucoup trop tard pour qu'un quelconque effet se fasse sentir à Pékin. C'est à Londres, en 2012, qu'on mesurera les effets de cet argent frais, qui permettra d'organiser davantage de camps d'entraînement à l'étranger, d'embaucher du personnel spécialisé ou encore d'attirer plus d'entraîneurs de renom au Canada.

D'ici là, il ne faut pas s'attendre à des miracles. Sports Illustrated (dont les prévisions, il faut bien le dire, sont souvent aussi fiables que l'horoscope de Jojo Savard) s'est probablement approché de la limite supérieure du possible en prédisant 15 médailles au Canada.

Une proportion importante des médailles canadiennes seront gagnées au bassin de Shunyi. En canoë-kayak, le porte-drapeau Adam van Koeverden est pratiquement assuré d'en remporter deux en K-1 et Richard Dober fils et Andrew Willows (K-2 500 m), ou alors Thomas Hall (C-11 000 m), pourraient en ajouter une. Côté aviron, le huit masculin est une certitude, le huit féminin et le deux de pointe masculin ont d'excellentes chances et les deux bateaux légers ne sont pas à dédaigner. Si vous tenez le compte, il y a un potentiel de neuf médailles, mais il est rare que les astres s'alignent parfaitement. Mettons en six.

Sinon? Alexandre Despatie et le duo Meghan Benfeito-Roseline Filion en plongeon, Karine Sergerie et Sébastien Michaud en taekwondo, Gary Reed au 800 m en athlétisme, Martine Dugrenier en lutte, un petit miracle de Kyle Shewfelt en gymnastique. Eric Lamaze en saut d'obstacles à Hong Kong. Et zéro pointé en natation, malgré de belles performances de plusieurs nageurs.

Total? Quelque chose comme 14 médailles, moins d'une par jour. Comme je le disais au début: pas autant que vous ne le souhaiteriez. Mais aussi, sûrement, pas mal moins qu'à Londres dans quatre ans. Patience et longueur de temps.