Il y a des hauts et des bas dans la vie de professionnel de golf. Parfois, il vente, il pleut, le parcours est médiocre, l'hôtel fait dur et la balle refuse carrément d'obéir.

Dans ces trop fréquents moments, on se dit qu'on aurait dû faire des études ou devenir voleur. Tout paraît plus attrayant que de tenter de contrôler une petite balle qui semble tirer un plaisir évident à nous ridiculiser. La dernière semaine a été à l'opposé de ce portrait peu reluisant.

Un tournoi de golf sur le magnifique parcours du Manoir Richelieu dans la région de Charlevoix, par une des plus belles journées de l'été, est certainement un des moments forts de la saison.

Je ne veux pas sonner comme une info-pub, mais si vous n'avez pas encore eu la chance d'essayer le nouveau parcours du Manoir, il faut le faire sans faute. Les 27 nouveaux trous, dessinés par le Montréalais Darrell Huxham, offrent des vues à couper le souffle. Je n'ai rien vu de tel nulle part au Canada ni même aux États-Unis quand j'y pense.

Oubliez Augusta National ou Pebble Beach, le premier coup de la journée sur le parcours Saint-Laurent vaut le déplacement à lui seul. Le fleuve droit devant et sur la droite et les montagnes tout autour, ça prend une bonne dose de concentration pour réussir un coup qui a un peu d'allure. Mais rassurez-vous, chers lecteurs, je suis un professionnel et quand le tournoi commence, je suis capable de faire abstraction de toute cette beauté naturelle pour faire ce que je sais faire de mieux : frapper complètement à gauche dans le foin et au pied d'un arbre.

Je déteste hacher un beau trou. Ce n'est pas que ça ne me dérange pas de faire un fou de moi sur un trou imbécile, mais ça me choque encore plus quand la vue est belle et que le design est esthétiquement plaisant.

Mais ce sont les verts du parcours qui ont volé la vedette. Il faut être doué pour les lire correctement si on ne les affronte qu'une fois de temps en temps. Tout le parcours penche vers le fleuve et les roulés ont une forte tendance à aller de ce côté, mais nos yeux nous disent souvent le contraire. On a souvent l'impression que la balle remonte la pente, défiant la loi de la gravité et augmentant dangereusement notre pression artérielle.

Sur un trou, je crois que c'était le neuvième, mon partenaire de jeu, Éric Landreville, m'a fait remarquer comme le chalet penche sur le côté (en fait il a dit: «le clubhouse est s'ul cant»). Rassurez-vous, le chalet est bien droit, c'est le terrain de golf au complet qui est «s'ul cant».

On entend souvent des choses bizarres quand on parle des illusions qui sévissent sur les verts du parcours du Manoir et sur la plupart des terrains de montagne. Des choses comme : le grain fait remonter la balle ou la balle casse vers l'eau. Ça fait des bonnes histoires à raconter pour ceux qui croient aux théories de complot et qu'il y a un monstre dans le lac Memphrémagog, mais il n'y a que deux choses qui peuvent influencer la trajectoire de la balle quand elle roule : la gravité et dans une très moindre mesure, le vent. Tout le reste, c'est du vaudou.

Demain, je porterai un costume d'époque pour jouer sur un parcours aménagé sur les plaines d'Abraham. Le parcours de neuf trous suit le tracé original du club de golf Royal Québec, qui comptait à l'époque 14 trous. On devra jouer en chemise à manches longues avec cravate et débardeur. On aura aussi surtout la chance de jouer avec de vrais bâtons et des balles antiques. Rien pour rallonger mes coups de départ

Je vous en reparle la semaine prochaine.

Professionnel au club La Vallée des Forts, Jean-Louis Lamarre est l'un des meilleurs joueurs au Québec.