«Alors, il est comment Hayden?» Un journaliste de L'Équipe préparait le possible sacre olympique du Français Alain Bernard, nouveau recordman mondial du 100 mètres libre, et s'informait de l'état de santé de Brent Hayden. Il a vaguement écouté notre réponse.

En dépit de son statut de champion mondial, Hayden est largement ignoré par les pronostiqueurs, à l'image de l'ensemble de l'équipe canadienne de natation.

Alors que s'ouvre enfin la très attendue compétition des Jeux olympiques de Pékin, ce matin et ce soir (HNE) au Cube d'eau, la planète natation n'a d'yeux que pour Michael Phelps et les Américains, les Australiens et les Européens, en particulier Bernard et ses potes du relais 4 X 100 m libre. Compte tenu de l'avalanche de records du monde enregistrés dans les super maillots Speedo depuis quelques mois, il n'y a là rien de surprenant.

Pour l'heure, les nageurs canadiens n'ont fait que regarder la parade. Pourtant, la confiance règne au sein du groupe dirigé d'une main de fer par Pierre Lafontaine, à la tête de Natation Canada depuis trois ans.

«Les nageurs des autres pays ont maintenant un oeil sur nous», jure même le vétéran Rick Say, grand leader d'une équipe composée en majorité de recrues.

Say est ce nageur qui avait fait les manchettes aux derniers Jeux olympiques d'Athènes en exprimant son dégoût à la suite des performances un peu pathétiques des nageurs à la feuille d'érable. Le Canada avait été écarté des podiums et seuls Say et le brasseur Mike Brown avaient atteint une finale individuelle.

Jeudi, en conférence de presse, Say a dit que l'équipe de 2004 s'était pointée à Athènes battue d'avance tellement l'atmosphère était négative. «Même au pays, on ne parlait que de controverses, a rappelé l'athlète de 29 ans, jeudi. On s'est débarrassé de ça et on est sur la bonne voie. Non seulement en tant qu'équipe, mais aussi par rapport au support qu'on reçoit du pays en entier.»

Sixième du 200 m libre d'Athènes, la «course du siècle» remportée par le retraité Ian Thorpe, Say est membre des deux relais libre à Pékin. Il y voit deux chances légitimes de podium, en particulier au 4 X 200 m.

Le groupe des femmes, formé de 12 recrues olympiques, entretient aussi de grandes ambitions pour les relais à Pékin. «On se voit pas mal haut, a affirmé Geneviève Saumur au sujet du relais 4 X 200 m, dont les séries auront lieu mercredi matin (HNE). Une finale, c'est sûr, et le podium est un de nos objectifs. Même si pour chacune ce sont nos premiers Jeux, on sait qu'on a la force nécessaire à quatre.»

L'inexpérience des nageuses ne constitue d'ailleurs pas un handicap aux yeux de Saumur. «Il y a beaucoup plus d'excitation que de nervosité dans l'équipe, a soutenu la Montréalaise de 20 ans. Les filles sont toutes sur le même pied. Ça aide à se préparer puisqu'on peut s'entraider beaucoup plus.»

Grandes ambitions

Audrey Lacroix brisera la glace ce matin au 100 m papillon, tout comme Mathieu Bois au 100 m brasse. La Québécoise espère passer sous les 59 secondes et ainsi se donner une chance d'atteindre la demi-finale sur une distance qui n'est pas sa spécialité. «Même si je n'ai pas fait 58 depuis deux ans, ça pourrait arriver ici», a jugé Lacroix, qui doit aussi prendre part au relais 4 X 100 m libre en compagnie de la Montréalaise Victoria Poon.

Sur le plan individuel, Lafontaine a fixé un objectif ambitieux: il souhaite que 40% des performances individuelles des Canadiens constituent des records personnels. Historiquement, à peine 15% des nageurs réussissent à améliorer leurs chronos individuels aux JO.

Pour sa part, Hayden se dit pleinement remis de sa blessure au dos, qui l'a quand même ennuyé jusqu'aux Championnats canadiens de Winnipeg, il y a trois semaines. Ironiquement, le vol vers l'Asie a réglé son problème. Chanceux.

Selon son entraîneur Tom Johnson, Hayden affiche la forme de sa vie. Durant la première semaine du camp préolympique de Singapour, il a perdu rien de moins que 10 livres, pour passer à 183 livres, soit quatre de moins qu'aux Mondiaux de Melbourne, où il avait gagné l'or ex-aequo avec l'Italien Filippo Magnini. «J'ai arrêté de manger de la sloche et de la pizza!» a lâché le candide Hayden, ce qui lui a permis de faire parler de lui dans le florilège des citations du jour publié par le comité organisateur.