Michael Phelps m'a donné des frissons. Usain Bolt m'a épaté. Alexandre a gagné mon admiration. Kobe et sa bande m'ont même paru sympathiques par moments. Mais mon coup de coeur de Jeux de Pékin est ailleurs, loin des médailles d'or et des records du monde.

Mon coup de coeur, c'est Audrey Lacroix, enrhumée, qui sort de la piscine blanche comme un drap, incapable de marcher seule, le corps complètement éteint par la violence de son effort physique. En natation, il y a aussi Victoria Poon, dont les débuts olympiques dans son pays natal ont été gâchés par la varicelle et un maillot défectueux - le seul dans tout Pékin!

C'est Nathaniel Miller et les gars de water-polo, de chics types qui se sont fait tabasser par des adversaires plus grands, plus expérimentés, plus tout-ce-que-vous-voulez, et qui recommenceraient demain matin avec la même ardeur au jeu. Ou encore Sherraine Schalm, qui nous a offert la plus belle conférence de presse des Jeux, philosophant sur la vie, le sport et l'amour sans même tenter de retenir ses larmes.

C'est Roger Federer, qui se fait sortir par James Blake (Nadal et Djokovic, passe encore, mais James Blake!). Au moins, mon préféré est dans une classe à part - ayant causé une surprise en remportant le double, il n'est ni un gagnant ni un perdant.

C'est l'athlétisme américain, humilié au sprint par la Jamaïque comme il l'a rarement été au cours de son histoire. La dernière fois, tous les Canadiens s'en rappellent encore, c'est Donovan Bailey et ses potes qui leur avaient fait le coup à Atlanta.

C'est même la Chine, pourtant grande gagnante de ces Jeux, qui échangerait toutes ses médailles d'or contre celle du 110 mètres haies pour l'offrir à son idole Liu Xiang. Le coureur de haies a été consacré le grand héros des Jeux avant même d'avoir fait son entrée sur la piste d'athlétisme du Nid d'oiseau. Il n'y a finalement fait que quelques foulées, se contentant de la médaille d'or des perdants des Jeux de Pékin.

Je les aime, mes perdants. Ils auraient mérité un meilleur sort, mais au moins, ils n'auront pas souffert pour rien. Contrairement aux Phelps et autres héros invincibles de Pékin, ils ont ajouté une touche d'imprévisibilité à ces Jeux scénarisés, planifiés et organisés jusque dans les moindres détails.

Ils nous ont rappelé que les Jeux olympiques, même à l'ère de la pub, demeurent avant tout une compétition sportive. Et le sport, c'est quelques gagnants, mais surtout des perdants.