La Presse vous propose chaque semaine un témoignage qui vise à illustrer ce qui se passe réellement derrière la porte de la chambre à coucher, dans l’intimité, loin, bien loin des statistiques et des normes. Aujourd’hui : Viviane*, 44 ans

C’est ainsi qu’elle se présente. Et c’est un sacré virage. Voici le récit d’une femme mal dans sa peau, archi-complexée, qui a pris confiance en elle du jour au lendemain. Et pas à peu près.

« On dirait que je me venge ! », pouffe de rire Viviane, rencontrée à l’automne dans un café de Laval. La pulpeuse quadragénaire se raconte dans la bonne humeur, à travers un témoignage qui s’annonce d’emblée sinon léger, du moins drôlement divertissant (et condensé !).

Coquette, avec ses bas nylon et ses sourcils dessinés, on devine qu’elle ne l’a pas toujours été. « Maintenant, quand je rentre quelque part, je continue de penser que c’est moi la plus cute de la gang ! Parce que je sais à quel point c’est puissant, la confiance ! »

Et c’est tout récent, en fait. La quadragénaire passe d’ailleurs très vite sur les 8/10 de sa vie, parce qu’elle n’a tout simplement pas grand-chose à raconter. Toute sa jeunesse, son adolescence et une bonne partie de sa vie adulte, Viviane a souffert d’un important, pardon, immense manque de confiance en soi, pour cause d’embonpoint. « Je n’étais pas bien, limite dépressive, ce n’était pas joyeux. [...] Je n’étais pas bien dans ma peau, je ne laissais personne m’approcher, j’étais vraiment fermée. » Fermée solide, jusqu’à 38 ans sonnés. Vous avez bien lu.

« J’ai perdu ma virginité très, très, très tard », confirme notre « late-bloomer », en insistant lourdement sur l’adverbe. « Oui, à 38 ans, dit-elle en riant de plus belle. Je ne l’assumais pas au départ, mais maintenant que j’ai la vie que j’ai... j’ai rattrapé le temps perdu ! »

Moi, je suis devenue quasi libertine !

Viviane

Le « déclencheur » ? Viviane ne laisse pas planer le moindre doute : ses opérations bariatriques. Pas une ni deux, mais trois fois sous le bistouri, par-dessus le marché. « Et ça aide à la confiance, effectivement. Cela change quelque chose dans l’image de soi. » Elle aurait d’ailleurs apprécié un certain « encadrement » psychologique, glisse-t-elle. « Les gens ne te regardent pas de la même façon, dit-elle, tu attires l’attention, et on devient un peu accro à ça... »

C’est aussi armée de ses nouvelles mensurations qu’elle finit par s’inscrire sur un site de rencontre, fin trentaine, pour la toute première fois de sa vie. « En 24 heures, j’ai reçu des centaines de messages. » Pas de doute : « Je pogne, quand même ! » Elle y rencontre son premier amoureux, avec qui elle a sa première relation. Sans lui dire que c’est une première, toutefois. Et puis ? « Comme n’importe qui, dit-elle en riant toujours, de la douleur et rien à signaler. » Elle ne s’épanche pas sur la relation, qui dure tout de même quatre ans, parce que sexuellement, ça n’était pas exactement ça : « Il n’était pas très ouvert, il avait des limitations, moi, j’avais envie de découvrir ! [...] Et puis la fréquence n’était pas là... »

Et puis elle a du temps, des années, à rattraper.

Quelques mois plus tard, toujours sur un site, Viviane rencontre un deuxième amoureux, une histoire qui ne dure ici que quelques mois, mais qui change sa vie. « Il était plus sexuel que mon ex-conjoint, et il m’a dit ceci : tu aimes le sexe, et tu as le droit. Ça a changé ma vie. »

À noter qu’elle l’a quitté parce que monsieur avait un contrat de soir, une soixantaine de jours d’affilée. « Je ne tofferai pas : 60 jours sans sexe, après 38 ans ? C’est non ! »

C’était il y a deux ans. Retour sur les sites de rencontre, où, de fil en aiguille, Viviane finit par tomber sur un réseau de libertinage. Depuis, tout a déboulé.

Je ne savais pas que ça existait ! Que des gens étaient ouverts à ça ! S’assumaient ! J’ai découvert un monde !

Viviane

Et puis ? « C’est l’anarchie depuis ! » Les 24 premières heures, Viviane reçoit quelque 400 messages. « Je me faisais engueuler parce que je ne répondais pas assez vite ! Les hommes sont affamés là-dessus ! » Son tout premier, elle n’est pas près de l’oublier, est arrivé avec de l’huile à massage et des chocolats. « On ne s’est jamais reparlé, mais ça a fait en sorte que j’ai eu confiance. »

En moins d’un an, Viviane couche avec une bonne centaine d’hommes. « Plusieurs par semaine, des fois plusieurs par jour [...]. Et j’ai eu du plaisir avec pratiquement tout le monde. [...] Mais ma quête a toujours été de me trouver un seul et unique partenaire. Pour que ce soit simple. » Notez le choix du mot : partenaire et non amoureux. « Je ne veux pas me caser ! »

Dans le lot, une seule mauvaise expérience, avec un type qui ne l’attirait pas du tout (en plus de cracher partout). Mais Viviane a été incapable de le mettre à la porte. « Je n’aime pas me faire rejeter dans la vie. Alors j’ai de la misère à le faire aux autres... »

À travers ces aventures, une constante, constate-t-elle : beaucoup d’hommes mariés. « Ces gars-là, tu as l’impression de leur donner le ciel. Mes meilleures baises, ça a été avec des hommes mariés. C’est triste, mais ils sont tellement reconnaissants ! »

Une énième rencontre change de nouveau sa vie : un type en couple ouvert. C’était il y a quelques semaines. « Ça a complètement changé ma vision du couple. Je suis jalouse de leur mode de vie ! »

Alors depuis ce jour, Viviane voit en prime des couples. Même si elle n’est pas nécessairement intéressée par les femmes. « Je suis hétéroflexible, nuance-t-elle, mais la chimie entre deux personnes, ça m’attire ! »

Ces jours-ci, elle fréquente activement quelques couples, et hormis un échec (« les deux fumaient ! »), son enthousiasme n’a pas dérougi. Le mode de vie l’emballe. « C’est juste des gens ouverts ! C’est vraiment ça que je veux ! [...] Je vois que ces couples-là sont tous épanouis, heureux et très libérés sexuellement. Pour moi, c’est le meilleur des mondes ! Je vois des hommes qui trompent leurs femmes, des couples qui divorcent, il y a une lourdeur sexuelle. Or là, avec ces couples ouverts, c’est l’inverse ! Il y a une légèreté ! »

Et puis elle revient de loin, faut-il le rappeler : « J’ai tellement raté d’expériences dans ma vie, on est entourés de maladies, de morts, on dirait que je ne veux pas mourir avant d’avoir tout vécu ! »

D’ailleurs, et pour la première fois, elle l’a écrit sur son profil : Viviane cherche désormais un amoureux. Mais libertin, et rien de moins !

* Prénom fictif, pour protéger son anonymat

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