Arts et être vous propose chaque dimanche un témoignage qui vise à illustrer ce qui se passe réellement derrière la porte de la chambre à coucher, dans l’intimité, loin, bien loin des statistiques et des normes. Cette semaine : Élisabeth*, 40 ans

Elle se croyait éteinte. Il faut dire qu’à 40 ans sonnés, et après plusieurs années de disette, Élisabeth avait fini par se faire à l’idée : la sexualité, pour elle, c’était terminé. Or, voilà qu’une aventure avec nul autre qu’un plombier, mesdames et messieurs, l’a littéralement « rallumée ».

Ça ne s’invente pas. Et même si elle a tout l’air d’un scénario (cliché) de film (porno), cette aventure (plus subtile qu’elle n’en a l’air) est bel et bien arrivée. Et à l’entendre se raconter, Élisabeth semble avoir été agréablement métamorphosée.

La coquette brunette aux doigts manucurés se raconte avec une spontanéité et une légèreté rafraîchissantes, en ce mercredi midi glacial de février. Sa première fois ? « Franchement désagréable ! », se souvient-elle en riant. « J’avais un objectif à atteindre : perdre ma virginité ! » Elle devait avoir 16 ans. C’est au cégep qu’elle rencontre ensuite son « premier amour », un type avec qui elle vit enfin une sexualité « plaisante ». « On était amoureux, et on était des petits lapins ! », raconte-t-elle avec un enthousiasme qui ne la quittera pas de l’entretien.

L’histoire dure deux ans, à la suite de quoi Élisabeth passe plusieurs années célibataire (et fière de l’être). Elle a 20 ans, c’est l’époque des after-hours, et elle vit pleinement. « J’ai eu des fréquentations, des one-nights, j’aimais ça, mais je sortais surtout avec mes amies, explique-t-elle. J’avais un réseau social qui me comblait. » Jusqu’à ce que, fin vingtaine, elle rencontre un homme avec qui elle s’engage davantage, malgré le manque de « connexion », un peu par convention. « Je voyais bien que le monde autour de moi commençait à se caser. » L’histoire dure tout de même quatre ans et se termine brusquement, de manière « catastrophique ». Pensez « trahison », « blessures », etc. Elle ne s’épanche pas trop sur le sujet et enchaîne néanmoins gaiement : « Et où on va quand on a une peine d’amour comme ça ? En Italie ! »

À son retour de voyage, Élisabeth rencontre le « plus beau rebound » : un homme galant, et surtout excellent amant. « Il prenait soin de moi. […] Ça a duré six mois et je lui en suis encore reconnaissante. » Pourquoi pas davantage ?

Je ne sentais pas la fougue, la passion. C’était bien, mais je voulais plus.

Élisabeth

C’est d’ailleurs à la suite de cette aventure qu’Élisabeth rencontre le père de ses enfants. Elle s’en souvient encore : « Pour le père de mes enfants, je ne voulais pas un gars ordinaire. Je voulais un gars différent. Et lui, il était très différent. » En gros, c’était un « créatif », un « artiste », un gars « qui ne respectait pas les règles ». Au lit ? « On avait une combinaison de désir pur et de connexion amoureuse, répond-elle. Une très belle sexualité. » Le temps que cela a duré.

Parenthèse : Élisabeth confie ici qu’elle avait « un désir d’enfants très grand » et que, ce faisant, elle a « fait fi de plusieurs drapeaux rouges ». Un exemple ? « Sa consommation d’alcool. » Lors d’une de leurs premières « dates », monsieur est littéralement tombé « la face à terre » dans un resto, illustre-t-elle. Fin de la parenthèse.

Toujours est-il que dès qu’elle est tombée enceinte, son conjoint ne l’a plus touchée. « C’était fini, terminé. » La dernière fois qu’ils ont fait l’amour, c’était pour concevoir leur deuxième enfant. « Et on s’est séparés trois ans plus tard. » Faites le calcul : cela fait près de quatre ans de calme plat, confirme-t-elle.

Comment est-ce possible ? « À cause de sa détresse, ses problèmes de consommation, je préférais ne pas en rajouter en mettant de la pression avec le sexe », se justifie la jeune femme. Car oui, elle, de son côté, égratignait les murs. « Moi, je capotais, j’avais une libido débordante ! »

Sauf qu’avec le temps, les responsabilités et la gestion des enfants, « tranquillement pas vite, explique-t-elle, je me suis éteinte sexuellement ».

Ma tête était déconnectée de mon corps. J’étais dans ma tête, et j’essayais de faire fonctionner notre vie.

Élisabeth

« J’étais éteinte, répète-t-elle, en regardant droit à la caméra, et pire encore : j’avais fait la paix. Je venais d’avoir 40 ans, je me disais : peut-être que c’est comme ça. » Et c’est à ce moment, précisément, qu’ils se sont séparés. C’était il y a un an.

Élisabeth enchaîne en riant : « Et c’est là qu’on arrive au punch ! » En effet, elle se retrouve alors en appartement, gère sa vie avec ses enfants, autour de ses enfants. Un jour arrive un dégât d’eau. « Mon père me dit : appelle un plombier ! », raconte-t-elle en pouffant de rire. Et on devine pourquoi. En résumé, elle épluche son répertoire téléphonique et fait appel à un plombier dans ses contacts. Elle l’a complètement oublié, mais visiblement, lui pas. Après être passé voir l’étendue des dégâts (« il sentait très bon, se souvient-elle, moi, j’avais une repousse de deux pouces, j’étais mal habillée, pas maquillée ! »), il lui envoie un petit message texte : « Tu es toujours aussi belle. » Élisabeth n’en revient pas. « Tout un courant électrique ! » Elle en frissonne encore.

Il revient faire les travaux (« et cette fois, j’étais arrangée, j’avais fait ma coloration, je m’étais exfoliée ! »), il lui fait des sourires coquins, puis sans crier gare, l’embrasse sauvagement et passionnément, plaquée contre le mur. Mains baladeuses en prime. Non, si vous voulez tout savoir : « sans demander la permission ». Et c’est tant mieux, enchaîne-t-elle. « J’étais allumée, mais allumée ! Il m’a électrifiée. » Elle s’explique : « Je pense que j’ai aimé le fait qu’il ne me demande pas la permission. J’ai aimé les sensations, faut croire. Ça me faisait plaisir d’être désirée avec vigueur. Ça venait probablement nourrir un désir d’attention qui n’avait pas été comblé depuis si longtemps… »

Ils ont fini par coucher ensemble lors d’une troisième ou quatrième visite. « Comme dans un film. Très bon ! rayonne-t-elle. Délicieux. Probablement parce que ça faisait si longtemps. Il était rough et je n’en revenais pas de ma chance ! »

Croyez-le ou non, il est revenu une ultime fois. Mais cette fois, la magie était passée. « Et on ne s’est jamais réécrit ni reparlé. » Fin de l’histoire ? Pas exactement.

Parce que depuis, Élisabeth n’est plus tout à fait la même. Et elle lui en est à ce jour « reconnaissante ». « Ma machine s’est remise en branle. […] Et je vais toujours me rappeler de lui : le gars qui m’a rallumée ! Je suis hyper reconnaissante ! »

Depuis, elle s’est acheté un vibrateur (« c’est moins gênant acheter ça avec un masque ! »). Pour cause : « Je ne peux pas ne pas avoir de sexe ! a-t-elle réalisé. Je n’en reviens pas. Le relâchement physique qui vient avec un bon orgasme, ça fait du bien à tous les égards ! J’aime ça, le sexe ! […] Et c’est lui qui m’a rallumée ! »

Et pas que sexuellement, d’ailleurs. « Tu ne peux pas imaginer les effets bénéfiques dans ma vie : j’ai recommencé à me maquiller, j’ai recommencé à me sentir femme ! »

Morale ? « On peut se déconstruire et reconstruire plusieurs fois dans une vie. Et 40 ans, ce n’est pas si vieux que ça ! »

* Prénom fictif, pour protéger son anonymat.

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