Les voyages forment la jeunesse, dit-on. Leur capacité à changer les habitudes pourrait être utile pour lutter contre les troubles alimentaires, selon une étudiante à la maîtrise de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). L’approche a déjà été testée.

Le concept

« Les troubles du comportement alimentaire constituent une préoccupation constante, au quotidien, pour les personnes qui en souffrent, explique Leila Mostefa-Kara, qui étudie à la maîtrise en loisir et tourisme à l’UQTR. On veut explorer le potentiel du voyage pour permettre des moments un peu plus plaisants, dans un environnement différent. Ces nouvelles expériences pourraient les aider à mobiliser leurs forces et à prendre de la distance avec les pensées obsessionnelles. Souvent, avec ces pathologies, il est difficile de vivre dans le moment présent et de profiter des expériences positives. Souvent, la thérapie traite le symptôme, rappelle les pensées liées à la maladie. Parce qu’elles se retrouvent sans leur cercle social habituel, les patientes sont amenées à découvrir ce qu’elles aiment, à tenter de faire les choses pour elles-mêmes. »

PHOTO FOURNIE PAR LEILA MOSTEFA-KARA

Leila Mostefa-Kara étudie à la maîtrise en loisir et tourisme à l’UQTR.

Le test

L’automne dernier, cinq patientes de l’hôpital de la Croix-Rouge à Bois-Guillaume, en Normandie, se sont envolées vers le Québec après avoir réalisé un traitement pour troubles alimentaires. « On a organisé de nombreuses activités grâce à de nombreux partenaires, dit l’étudiante d’origine française. Il y a eu le musée populaire de Trois-Rivières, un jeu évasion au parc des chutes Montmorency près de Québec, le Village québécois d’antan et de l’écovillégiature à l’auberge Le Baluchon en Mauricie. Elles ont été dans une cabane à sucre. Au vu des premières entrevues, le but de vivre le moment présent a été atteint. » Dans le cadre de sa maîtrise, Mme Mostefa-Kara va refaire l’expérience avec d’autres groupes. Elle va se rendre en France sous peu pour interviewer les participantes de l’automne, qui avaient entre 20 et 52 ans.

L’œuf ou la poule

Est-ce que cette approche fonctionne mieux — ou moins bien — si les patientes ont déjà beaucoup voyagé ? « C’est sûr que celles qui ont accepté de participer au projet étaient intéressées par les voyages », dit Mme Mostefa-Kara. Comment se fait-il que leurs voyages antérieurs ne les aient pas guéries ? « Dans certains cas, peut-être qu’elles ont moins voyagé à partir du moment où elles ont été malades. »

Le voyage thérapeutique

Le voyage comme traitement pour les troubles de santé mentale est une approche récente. « Il existe peu de projets de ce type, à ma connaissance bien sûr, dit Mme Mostefa-Kara. On voit plutôt des projets basés sur le plein air ou l’aventure. Mais en termes de “voyage” à proprement parler, il y a moins de documentation. J’ai surtout exploré l’aspect non thérapeutique, le fait de vivre l’activité de loisir pleinement, par plaisir. »

La méditation

Existe-t-il d’autres types de traitements qui visent à sortir de leur quotidien les patients atteints de troubles alimentaires, pour les aider à vivre le moment présent et accepter les moments agréables ? « Il y a la méditation pleine conscience, dit Mme Mostefa-Kara. On voit des ateliers visant à manger en pleine conscience. Je travaille aussi avec le Laboratoire de recherche interdisciplinaire sur les troubles du comportement alimentaire (Loricorps), un groupe de recherches transdisciplinaires qui étudie les troubles de comportements alimentaires. »

En chiffres

• 0,9 % des Nord-Américaines souffriront d’anorexie durant leur vie

• 1,5 % des Nord-Américaines souffriront de boulimie durant leur vie

• 2,8 % des Nord-Américaines souffriront de frénésie alimentaire (binge eating disorder) durant leur vie

Source : CDC

Rectificatif

Une version antérieure de ce texte n’identifiait pas le Loricorps.