(Montréal) Les commentaires sur le poids et l’apparence physique, même les athlètes professionnels n’y échappent pas. Inquiets de l’impact qu’ils peuvent avoir sur les adolescents, plusieurs unissent leur voix pour dire : ça suffit.

Se faire juger constamment sur son physique, la danseuse professionnelle Kim Gingras connaît bien.

« Des fois, je vais à une audition et je viens à peine d’entrer, on ne me laisse même pas danser et ils font des coupures, basées sur le poids des danseuses, notre physique, nos courbes, notre couleur de cheveux. »

Mettre les danseuses en ligne pour les scruter de haut en bas, c’est habituel dans les auditions prisées pour partager la scène avec les vedettes de la musique. Mais ce n’est pas sans conséquence.

Elle dit bien comprendre ce qu’on peut ressentir quand on reçoit des commentaires sur son apparence physique, et se préoccupe particulièrement des dommages que cela peut causer aux jeunes.

« Je trouve ça important d’en parler pour que les gens sachent à quel point ça peut blesser », dit la jeune femme, maintenant installée à Los Angeles où elle danse avec les vedettes.

C’est dur pour les athlètes, dit-elle, mais ils ne sont pas seuls : cela touche tout le monde.

C’est pourquoi elle est l’ambassadrice de la semaine « Le poids ? Sans commentaire ! ».

Cette neuvième semaine de sensibilisation est organisée par l’organisme ÉquiLibre, qui a pour mission de prévenir et d’atténuer les problèmes liés au poids et à l’image corporelle dans la population. Elle vise notamment les jeunes de 12 à 17 ans.

Le message de la campagne est : misez sur ce que votre corps peut faire, par sur ce dont il a l’air.

Karah Stanworth-Belleville est nutritionniste, ex-athlète de haut niveau et chef de projet chez ÉquiLibre.

Des commentaires sur son apparence, elle en a reçu dans sa carrière de nageuse. Et elle en a beaucoup souffert.

« T’es parfaite… mais, assure-toi de rester comme ça. »

« Es-tu certaine de vouloir ce deuxième pain ?… »

Les commentaires peuvent être négatifs ou positifs, peu importe, ils peuvent faire mal, dit-elle.

« Même si cela se veut gentil, les remarques sur l’apparence peuvent faire du tort. » On ne peut jamais savoir comment cela va être interprété.

Un commentaire appréciatif sur l’apparence physique actuelle signifie-t-il qu’avant, notre corps était inadéquat, pas aussi bien ? demande-t-elle.

Les deux femmes sont du même avis : concentrons-nous plutôt sur les compliments liés à l’effort, au talent, à la motivation et à la personnalité.

« Misons sur quelque chose qui définit mieux les jeunes », dit Mme Stanworth-Belleville.

Elle trouve dommage que de tels commentaires viennent teinter la pratique sportive, décourager les jeunes de s’adonner à l’activité physique et peut-être même mener à l’abandon du sport.

C’est le cas notamment en ballet classique, rapporte la danseuse. Certaines de ses amies se sont fait dire que ce n’était pas pour elles, en raison de leur physique.

« Ça me fait de la peine de penser qu’il pourrait y avoir des rêves brisés à cause de l’apparence. »

Au Québec, c’est plus d’un adolescent du niveau secondaire sur deux qui est insatisfait de son corps, selon un rapport de l’Institut de la statistique du Québec.

« Le monde d’aujourd’hui, en 2020, ce sont les réseaux sociaux, la comparaison, c’est d’avoir à la portée de la main des “corps parfaits”. Ça vient chercher tout le monde », renchérit Kim Gingras.

La campagne d’ÉquiLibre se déploie notamment sur les réseaux sociaux, dont Instagram et TikTok où les jeunes peuvent participer à un défi avec une danse créée par Kim Gingras.

Les professeurs, les entraîneurs et les mentors sont aussi invités à prendre part à la discussion, « pour réfléchir à notre travail, et à l’environnement qu’on crée pour nos jeunes », ajoute la danseuse, elle-même mentore.

Un outil de réflexion destiné aux intervenants est disponible sur equilibre.ca/sanscommentaire