(Paris) Le couturier espagnol Paco Rabanne, aussi célèbre pour ses tenues en métal que pour ses déclarations excentriques, est décédé vendredi à l’âge de 88 ans en France, où sa famille s’était réfugiée en raison de la guerre civile espagnole.

« Avec une profonde tristesse, Puig annonce le décès de Paco Rabanne », a annoncé dans un communiqué le groupe catalan qui possède la marque portant son nom, célébrant sa vision « audacieuse » et ses codes « radicalement modernes ».

Le couturier est mort dans le village de Portsall, en Bretagne, où il habitait, a précisé un porte-parole.  

« Personnalité majeure de la mode, sa vision était audacieuse, révolutionnaire et provocatrice, véhiculée par une esthétique unique. Il restera une importante source d’inspiration pour les équipes de mode et de parfum de Puig, qui travaillent ensemble en permanence pour exprimer les codes radicalement modernes de M. Paco Rabanne », a déclaré Marc Puig, PDG du groupe, cité dans le communiqué.  

Le président Emmanuel Macron, et son épouse Brigitte, ont salué « un artiste hors-normes qui fit souffler un vent de renouveau dans le monde de la haute couture ».

« Robes improbables »

Jose Manuel Albesa, président de la division beauté et mode de Puig, a pour sa part souligné l’« esprit radical et rebelle » du créateur.  

« Qui d’autre pourrait inciter les Parisiennes suivant la mode à réclamer des robes en plastique et en métal ? Qui d’autre que Paco Rabanne pourrait imaginer un parfum appelé “Calandre” – le mot signifie “grille d’automobile” – et en faire une icône de la féminité moderne ? », a-t-il ajouté.

PHOTO SANG TAN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Une robe en aluminium signée Paco Rabanne

En 1966, Paco Rabanne avait présenté sa collection intitulée « Manifeste », composée de « 12 robes importables en matériaux contemporains » dans un défilé provocateur où des mannequins noires, dansant pieds nus, défilaient pour la première fois.  

Le succès fut immédiat même si ces premiers modèles pesaient 30 kilogrammes.

« Paco Rabanne était un grand couturier qui n’a cessé d’explorer le savoir-faire et les techniques traditionnelles avec audace et excentricité. Un créateur qui, dès son premier défilé à Paris, a ouvert de nouvelles voies à la mode », a réagi Bruno Pavlovsky, président de la Fédération de la haute couture et de la mode.

Pascal Morand, président exécutif de la fédération, a pour sa part salué « un émancipateur » féru d’innovation, « dont la liberté créative a profondément marqué la mode française et internationale ».  

Fils d’une première chez Balenciaga

Né le 18 février 1934 au Pays basque espagnol, près de San Sebastian où sa mère était première main chez Cristobal Balenciaga, Paco Rabanne – de son vrai nom Francisco Rabaneda Cuervo – était diplômé des Beaux-Arts de Paris, section architecture.  

Son père, le général Rabaneda Postigo, qui commandait la garnison de Guernica, fut fusillé par les soldats de Franco en 1936. En 1939, la famille s’était réfugiée en France.

Il a commencé sa carrière en créant des accessoires, bijoux, cravates, boutons qu’il proposait à Dior, Saint-Laurent ou Cardin. Avant de se lancer à son tour dans la mode pour la faire vivre en adéquation avec les matières et les techniques nouvelles.

En 1968, deux ans après le premier défilé, Jane Fonda est moulée dans son costume pour le film de science-fiction Barbarella. Il habille également les icônes françaises Brigitte Bardot et Françoise Hardy.

En 2011, la superstar mondiale Lady Gaga fait sensation en robe en papier lune conçue par les studios de Paco Rabanne pour les MTV European Music Awards.

Tout au long de sa carrière, le couturier, qui pratiquait assidûment l’ésotérisme, s’est aussi fait remarquer par nombre de déclarations excentriques et de prédictions hasardeuses.  

En 1999, il avait par exemple annoncé dans l’un de ses livres la destruction de Paris par la chute de la station Mir en s’appuyant sur une lecture toute personnelle des prophéties du XVIe siècle de Nostradamus.  

La même année, la maison avait cessé son activité haute couture pour se recentrer sur le prêt-à-porter.