Les clients et passants peuvent désormais voir les artisans de Canadian Hat et d’Harricana à l’œuvre, moulant un chapeau ou transformant un vieux manteau de fourrure en col ou en pompon. Naguère installés dans deux lieux distincts, l’atelier et la boutique ne font plus qu’un, réunis dans un local de 6000 pieds carrés, sur la rue Wellington, dans l’arrondissement de Verdun, à Montréal.

Cette cohabitation est une sorte de retour dans le passé, mais certainement pas en arrière, pour Mariouche Gagné, désormais directrice artistique et directrice du développement chez Canadian Hat/Harricana. Rappelons que les marques coexistent depuis l’acquisition d’Harricana par la femme d’affaires Diane Lanctôt en 2017.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le nouvel atelier-boutique de Canadian Hat/Harricana ouvre ses portes ce vendredi rue Wellington, à Verdun.

« En déménageant la boutique dans le Vieux-Montréal et en séparant l’atelier, on avait perdu tout ça, souligne Mariouche Gagné. Quand les gens arrivent avec leur vieux manteau de fourrure, ils veulent quasiment voir comment il va être modifié. Quand ils viennent choisir un chapeau, ils peuvent en essayer 250 pour être sûrs que c’est la bonne forme, et il y a quelqu’un qui les conseille. Ça, ils ne peuvent pas le faire sur le web. »

PHOTO NATHALIE CHOQUETTE, FOURNIE PAR CANADIAN HAT/HARRICANA

Par la fenêtre du nouveau local, les passants pourront assister au moulage des chapeaux.

Voir un chapeau de feutre moulé à chaud non plus. « La partie que je trouve la plus belle de Canadian Hat, c’est quand M. Hernandez moule les chapeaux et qu’il y a le feu qui sort », dit-elle. Près de 500 moules à chapeaux ont été transportés dans le nouvel atelier et seront mis à la disposition d’autres chapeliers. L’atelier-boutique deviendra également le seul endroit à Montréal à offrir un service de remoulage de chapeaux pour femmes – Henri Henri le propose déjà pour les hommes.

Doubler la production

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Harricana récupère d’anciens manteaux de fourrure pour les transformer en accessoires.

Le déménagement a aussi été l’occasion de revoir l’organisation du travail et la formation des employés, de sorte que la production pourrait être doublée dans la prochaine année. Cela permettra de rapatrier à Montréal une partie de la production qui est faite à l’étranger, mais certains produits resteront néanmoins fabriqués en Chine. « Il y a des affaires qu’on n’est pas capables de faire au Québec, justifie la designer. On n’a pas la machinerie. »

La Chine a investi sur des machines qu’on ne pourrait même pas se payer. Et c’est le fun que pour les chapeaux, on ait une gamme de prix qui part à 19 $ et qui va jusqu’à 500 $.

Mariouche Gagné, directrice artistique et directrice du développement chez Canadian Hat/Harricana

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De 12 à 20 employés, selon les saisons, travailleront dans le nouvel espace.

Dans les cartons depuis trois ans, le projet, qui bénéficie d’une aide de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) notamment, a été quelque peu chamboulé par la pandémie. Le budget a dû être réduit et l’échéancier, repoussé. Mais, selon Billy Walsh, directeur général de la SDC Wellington, les boutiques qui misent sur l’expérience sont ce vers quoi les rues commerciales doivent se tourner. « Entrer dans l’arrière-scène, c’est très intéressant, note celui qui a grandement contribué à redynamiser la rue Wellington. On a perdu la guerre de l’offre et du prix. Mais ce qui demeure et ce sur quoi on veut tabler, c’est l’être humain. »

Le nouvel espace, aménagé sur trois étages par la designer Lysanne Pépin, accueillera aussi un café, en partenariat avec la Brûlerie Balance. Au sous-sol seront vendus des échantillons et vêtements de sport soldés de marques distribuées par Lanctôt, dont Reima. Des visites guidées de l’atelier seront aussi organisées.

PHOTO FOURNIE PAR CANADIAN HAT/HARRICANA

Aperçu de la collection automne-hiver 2020 de Canadian Hat/Harricana

Rajeunir Harricana

Si Mariouche Gagné a consacré beaucoup d’énergie au cours des dernières années à apprivoiser les chapeaux, Harricana n’est pas en reste. Cet espace sera, selon elle, l’occasion de faire revivre la marque et de la rajeunir, notamment avec des produits faits en nylon recyclé et de la fourrure organique à base de maïs. La fourrure naturelle demeure toutefois au cœur d’Harricana, qui propose toujours d’échanger son vieux manteau de fourrure contre un chèque-cadeau.

PHOTO FOURNIE PAR CANADIAN HAT/HARRICANA

Ce chapeau en denim recyclé fait partie de la plus récente collection de Canadian Hat (49 $).

« Les jeunes ne connaissent pas Harricana, remarque la designer. Ils s’intéressent à la fausse fourrure en pensant que c’est végane et que c’est meilleur, mais câline, ça va détruire la planète. C’est du pétrole. On serait peut-être mieux de récupérer le petit million de manteaux de fourrure qu’il reste au Québec, même les beaux cuirs, les vêtements qu’on a, que d’essayer de refabriquer la roue à chaque fois. Parce que refabriquer… il n’y a plus de place. »

L’atelier-boutique sera ouvert à compter de vendredi, mais fermé exceptionnellement cette fin de semaine.

3697, rue Wellington, Montréal

> Consultez le site de Canadian Hat et d’Harricana