La boutique a2n3w — décodage : ça se lit « as new », soit « comme neuf » en anglais, avec un clin d’œil au numéro 23 du grand joueur de basket Michael Jordan — a ouvert ses portes au début d’août, rue Ontario Est à Montréal. Sa spécialité : le « sneaker care », c’est-à-dire le nettoyage de chaussures de sport, réincarnées en objets de mode ou de collection. Décryptage en six points.

Pourquoi nettoyer ses chaussures ?

« Quand t’as une nouvelle paire de sneakers, t’as un boost [regain] de confiance », dit Max Manzi, copropriétaire d’a2n3w. « C’est comme avoir un fresh haircut [une nouvelle coupe de cheveux]. Faire l’entretien de tes sneakers, c’est un moyen plus économique d’avoir le même effet. » Plus économique et plus… écologique.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Philippe Fortunato et Max Manzi, qui se sont rencontrés alors qu’ils étudiaient en comptabilité et en gestion au cégep Ahuntsic, ont eu l’idée d’ouvrir une boutique spécialisée en entretien de sneakers.

Passion d’adolescent

C’est à l’adolescence que Max Manzi a commencé à nettoyer méticuleusement ses chaussures. « J’étais en maison d’accueil et j’avais une vieille paire de sneakers, se souvient-il. Un superviseur m’a montré des techniques pour les nettoyer. Quand je suis arrivé à l’école le lendemain, mes amis m’ont dit : ‟Oh shit, Max, tu t’es acheté de nouveaux souliers !” » Depuis cette expérience concluante, le jeune homme a continué d’entretenir ses chaussures pour être… bien dans ses baskets.

PHOTO TIRÉE DU SITE INTERNET D’AMAZON

Les produits Jason Markk — nettoyants biodégradables pour chaussures, brosses, etc. — sont vendus au Canada.

Inspirés de L.A.

Une vidéo tournée à Los Angeles par le youtubeur torontois Kai Bent-Lee a donné à Max Manzi et à son ami Philippe Fortunato l’idée d’offrir leur expertise au public. « Dans la vidéo, on voyait la boutique de Jason Markk, où on fait l’entretien des sneakers », indique Max Manzi.

Depuis l’ouverture d’un premier atelier d’entretien de baskets en Californie en 2014, Jason Markk (et ses employés !) en a nettoyé plus de 50 000 paires, selon le site internet de l’entreprise. Les produits Jason Markk — nettoyants biodégradables pour chaussures, brosses, etc. — sont vendus au Canada, notamment chez Simons et Urban Outfitters. Les deux amis ont jugé que le moment était venu de faire pareil ici. « La culture du sneaker commence à grandir à Montréal », affirme Philippe Fortunato.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Max Manzi nettoie la semelle de ces chaussures Yeezy Boost avec une brosse, de l’eau et une solution vendue par a2n3w.

Services offerts

Un nettoyage classique coûte 18,25 $ chez a2n3w. Max Manzi utilise une brosse souple et un produit nettoyant vendu par son entreprise, avant de repasser sur les taches avec une brosse plus coriace. « J’ai appris avec l’expérience et sur l’internet, dit-il. La sneaker community [communauté des amateurs de baskets] est vraiment ouverte. » D’autres forfaits sont offerts, à des prix allant jusqu’à 97,75 $. On comprend que le but n’est pas de faire laver ses vieilles chaussures de randonnée…

Depuis la fin du mois d’août, une autre boutique offre le nettoyage de sneakers : Clleanning by Centrall (attention de mettre deux L si vous la cherchez sur Instagram), rue Sainte-Catherine Ouest à Montréal. Le nettoyage extérieur y coûte 14,90 $. Il faut ajouter 8 $ pour avoir aussi les semelles et les lacets propres.

PHOTO FOURNIE PAR WALID HIJAZI

L’avocat-criminaliste Walid Hijazi

L’avis d’un sneaker head

L’avocat-criminaliste Walid Hijazi se définit comme un sneaker head, soit un amateur de chaussures de sport. « Je collectionne les espadrilles et j’ai souvent dormi dans ma voiture devant un magasin, dans l’espoir d’avoir une paire précise », témoigne-t-il avec passion. « C’est une question de nostalgie, une référence à ma jeunesse, à de grands sportifs, à la culture pop et à des artistes comme des rappeurs », explique-t-il.

Me Hijazi comprend l’importance de garder ses baskets impeccables. « Dans le jargon des sneaker heads, on dit qu’il faut les avoir ‟crispy”, dit-il. Il faut que les sneakers aient l’air le plus possible à l’état neuf. C’est pour des raisons d’esthétisme et de propreté. Je ne vais pas mettre un pantalon ou un chandail sale. Pourquoi ce serait différent pour les chaussures ? » L’avocat entretient ses baskets à la maison, en suivant des tutoriels en ligne au besoin. D’autres sneaker heads souillent rapidement des paires convoitées, pour se pavaner et montrer qu’ils sont au-dessus de leurs affaires, indique-t-il.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Les Yeezy 700 Wave Runner, fruit d’une collaboration entre Adidas et le rappeur Kanye West, sont offertes à 550 $. Quant aux Air Jordan 1 Satin Black Toe, ils se détaillent 800 $.

Vente de sneakers

Avant de laver des sneakers de collection, encore faut-il en posséder. Tant a2n3w que Centrall vendent des souliers neufs. « On les revend au prix juste du marché, fait valoir Max Manzi. De toute façon, les gens peuvent aller sur l’internet vérifier les prix. »

Ça grimpe vite : les Yeezy 700 Wave Runner, fruit d’une collaboration entre Adidas et le rappeur Kanye West, sont par exemple offerts à 550 $ chez a2n3w. Quant aux Air Jordan 1 Satin Black Toe, ils se détaillent 800 $. Selon Vogue France, le marché mondial des baskets atteindra 85 milliards d’euros (124 milliards CAN) d’ici 2025. Ça en fera, des semelles à frotter.