(Paris) Le géant du luxe LVMH confie à Rihanna la première maison de mode créée ex nihilo au sein du groupe depuis Christian Lacroix en 1987, misant sur la popularité et les valeurs incarnées par la diva de la pop pour séduire les milléniaux.

Après des semaines de rumeurs, le groupe détenu par l’homme d’affaires français Bernard Arnault a annoncé vendredi le lancement « imminent » — en « mai ou juin », a précisé un porte-parole à l’AFP — avec la chanteuse Robyn Rihanna Fenty, d’une « nouvelle maison de luxe » englobant prêt-à-porter et maroquinerie, dont le siège sera à Paris.

« M. Arnault m’a donné carte blanche artistique pour développer une maison de mode dans l’univers du luxe », a déclaré la chanteuse, citée dans un communiqué de LVMH.

Sur son compte Instagram aux plus de 70 millions d’abonnés, la vedette a dit « merci à M. Arnault de croire en cette petite fille du rivage occidental d’une île, et de me donner l’occasion de grandir avec vous à @LVMH. Voilà la preuve que rien n’est impossible. Gloire à Dieu ».

Il s’agit là, pour le groupe propriétaire de Dior, Louis Vuitton, Fendi et Givenchy, qui a bâti son succès sur des marques patrimoniales, d’un tournant « relativement inédit, mais qui fait complètement sens, par rapport à la dynamique du marché », analyse pour l’AFP Serge Carreira, maître de conférences à Sciences Po Paris, spécialiste de la mode et du luxe.

« Le marché se rajeunit, et la clientèle des milléniaux qui porte la croissance du secteur du luxe et de la mode a un besoin important d’adhésion aux marques et à leurs valeurs », estime-t-il.

De son côté, le PDG de LVMH s’est félicité de donner une autre dimension à une collaboration fructueuse qui a démarré en septembre 2017 avec Fenty Beauty dans le domaine des cosmétiques.

En janvier, en commentant les résultats du groupe, M. Arnault avait loué un partenariat très lucratif. « Ça a été lancé en 2017 et en 2018, on ne doit pas être loin des 500 millions d’euros (755 millions $) de chiffre d’affaires, c’est extraordinaire et on est partis de zéro ».

Au-delà de ses talents artistiques, la chanteuse de 31 ans originaire de La Barbade, première femme noire à faire la couverture de l’édition britannique du célèbre magazine de mode Vogue UK, — réalisée par un photographe noir, à la demande de la vedette — en septembre 2018, « incarne une bataille pour la diversité et les droits des femmes, une vision de l’avenir », juge M. Carreira.

Puissante « influenceuse »

Il s’agit de la première maison de mode créée ex nihilo au sein du groupe LVMH depuis Christian Lacroix en 1987, a précisé un porte-parole à l’AFP. Elle sera ainsi dirigée par une femme — une autre première pour le groupe — qui « en donnera l’inspiration artistique ».

Cela représente pour LVMH un investissement financier — non chiffré — qui dépassera certainement les prises de participations, courantes sur le secteur, dans des maisons de jeunes créateurs, comme avec Jonathan Anderson ou Nicholas Kirkwood, souligne M. Carreira. D’autres artistes ont noué des collaborations ponctuelles, comme le rappeur Kanye West avec l’équipementier Adidas, ou le chanteur Pharrell Williams avec la maison Chanel.

La marque va incarner la « vision de la mode » de Rihanna, « tant sur ses créations de prêt-à-porter, souliers et accessoires, que sur ses choix en termes de distribution et communication », a précisé LVMH.

La vedette, qui possède déjà la marque de vêtements sport à succès Fenty et la marque de lingerie Savage x Fenty, est une habituée des Fashion Weeks et des défilés de mode — en particulier ceux de la maison Dior, qui l’a choisie pour égérie en 2015.

Elle s’est également révélée être une créatrice avisée, qui a contribué à améliorer les ventes de Puma lorsqu’elle en était la directrice créative.

Devenue une puissante « influenceuse » — le compte Instagram de Fenty Beauty affiche 7,4 millions d’abonnés —, Rihanna est « une personnalité inspirante qui suscite un engagement très fort de la jeunesse », résume M. Carreira.

Louant l’« esprit entrepreneur », les « compétences de dirigeante » et de « leader » de la chanteuse, M. Arnault a estimé que Rihanna avait « vraiment toute sa place dans la famille LVMH ».