(Paris) Après les décors impressionnants de plage ou supermarché grandeur nature, c’est sur les quais d’une gare étonnamment minimaliste - recréée dans le Grand Palais à Paris - que Virginie Viard, successeure de Karl Lagerfeld chez Chanel, a signé sa première collection épurée.

Pour cette collection « croisière » — que les grandes marques présentent en dehors des Fashion weeks aux quatre coins du monde à l’instar de Dior qui a ouvert le bal de ces défilés le 29 avril dans un vieux palais de Marrakech — Chanel est restée fidèle à la grande nef.

Pas de trains dans cette gare imaginaire de style beaux-arts où les invités prennent leur petit déjeuner dans un élégant café avant de s’installer sur les quais à destination de Saint-Tropez, Byzance, Édimbourg ou Antibes.

Voyage oblige, l’allure de Chanel se place sous le signe d’une silhouette en mouvement et la collection se veut fonctionnelle, comme ce tailleur bleu cobalt avec des poches multiples sur la veste et la jupe au-dessus du genou. Pour une touche chic, un top en bandeau blanc fermé d’un nœud sur la poitrine et des bottines bicolores blanc et noir à bout pointu. Les légendaires sacs matelassés s’agrandissent.

« Chanel, c’est l’allure et le mouvement. Voyager à travers le monde est lié à l’esprit Chanel », souligne dans les notes du défilé la très discrète Virginie Viard, bras droit pendant 30 ans de Karl Lagerfeld décédé en février et dont c’est la première collection en solo.

Tailleur rajeuni

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, AFP

La veste en tweed se décline à l’infini avec des épaules arrondies ou carrées, courtes ou longues, droites ou croisées.

Des vestes et de grands pantalons à double boutonnage en gabardine ou en coton s’inspirent des uniformes de travail. Les trenchs à capuche se féminisent d’une ceinture chaîne et d’une blouse de popeline à grand jabot.

Aux côtés du noir, écru et blanc chers à Chanel, une palette lumineuse de rose, vert, bleu et mauve ravive le décor gris du défilé avec des touches de brun ou bleu marine.

La veste en tweed se décline à l’infini avec des épaules arrondies ou carrées, courte ou longue, droites ou croisées. Virginie Viard propose également une nouvelle vision du tailleur autorisant en bas des leggings pailletés à logo Chanel, des mini-jupes ou des knickerbockers, des culottes bouffantes maintenues au niveau des genoux, en tweed.

Une modernité accentuée par des escarpins pointus à bride avec des touches de couleurs vives, noir et fuchsia ou noir et rouge, des bottines bicolores à petits talons coniques et des ballerines en tweed.

Le camélia blanc, autre code qui fait partie de l’ADN de la maison, fleurit sur une bretelle de robe à volants asymétrique.

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, AFP

Virginie Viard, bras droit pendant 30 ans de Karl Lagerfeld décédé en février et dont c’est la première collection en solo., a conçu ce défilé comme un hommage à la passion de voyager de Gabrielle Chanel et de son mentor Karl Lagerfeld.

Virginie Viard a conçu ce défilé comme un hommage à la passion de voyager de Gabrielle Chanel et de son mentor Karl Lagerfeld.

C’est sur le quai que commença l’histoire d’amour entre Gabrielle Chanel et l’Anglais Boy Capel. Le train et sa voiture-restaurant où se croisent artistes, aristocrates et hommes d’affaires a inspiré un ballet Le Train bleu de Serge Diaghilev, pour lequel Chanel a imaginé les costumes.

L’Allemand Karl Lagerfeld est arrivé en 1952 à la gare du Nord à Paris « pour passer deux ans au lycée. Mais mon séjour à Paris s’est un brin prolongé », se souvenait-il en emportant toujours avec lui pour ses innombrables voyages le coussin de son enfance brodé au point de croix d’une locomotive.

Poursuivant le thème du voyage, Virginie Viard multiplie les clins d’œil aux cheminots dans les vêtements et les accessoires. Elle déconstruit ainsi les mécanismes des horloges des gares : leurs cadrans dessinent la guipure bleu marine d’une robe longue quand leurs aiguilles et leurs index déstructurés sont brodés au décolleté d’une autre en dentelle blanche.

Une pochette coussin en coton blanc est brodée d’horloges, tandis que la lampe de cheminot est détournée en minaudière en résine strassée.