« Vous devriez faire ceci. » « Avez-vous essayé cela ? » Quand on attend un enfant, les trucs et les conseils fusent de toutes parts. Malgré ce flot d’informations (qui sont parfois très utiles, parfois moins), la parentalité réserve son lot de surprises. La Presse a demandé à des mères et à des pères ce qu’ils auraient aimé savoir avant de devenir parents. Témoignages et regards d’expertes.

Se préparer un peu, beaucoup ou passionnément ?

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Louis-David Mercier et Mathilde Couture avec Henri, leur fils de 4 mois

Mathilde Couture était convaincue qu’elle s’était bien préparée à l’arrivée de son premier enfant. « Enceinte, j’ai tellement lu, j’ai tellement écouté de balados. J’ai suivi des formations gratuites données par des organismes. J’étais prête », se souvient l’enseignante. Or, depuis qu’elle a donné naissance au petit Henri, il y a quatre mois, rien ne se déroule comme elle l’avait imaginé. « Mathilde voulait accoucher naturellement, finalement, ç’a été une césarienne. Elle voulait allaiter, finalement, c’est le tire-lait. On voulait essayer les couches lavables, mais, finalement, le bébé fait de l’eczéma et ce n’est peut-être pas l’idéal », énumère son conjoint, Louis-David Mercier. Ce que le couple aurait aimé savoir avant de devenir parent ? « Ça ne sert à rien de passer trop de temps à planifier tout, parce qu’on ne peut pas prévoir ce qui va arriver », résume le père.

La psychoéducatrice Mélanie Bilodeau abonde dans le même sens : « On n’a le contrôle sur rien. Il n’y a pas un bébé qui est pareil », affirme-t-elle, en soulignant que les nouveaux parents ont souvent des attentes irréalistes. Pour certains, se renseigner peut faire disparaître une certaine anxiété, note-t-elle. Mais plutôt que de lire toutes les informations disponibles sur l’accouchement ou l’allaitement, par exemple, l’autrice du livre Soyez l’expert de votre bébé invite les futurs parents à se préparer à accueillir leur poupon en réfléchissant à leurs forces et à leurs défis en tant que coparents. « Si on sait qu’on a déjà des défis de communication, ça se peut qu’après l’accouchement, avec la fatigue et les hormones, ça devienne encore plus un défi. […] On peut essayer de se trouver à l’avance des codes et des façons de faire pour ne pas se tomber sur la tomate », suggère-t-elle.

Le défi de décrocher quand on est cheffe d’entreprise

PHOTO FOURNIE PAR SOPHIE APOLLON-AUGUSTE

Sophie Apollon-Auguste

J’avais annoncé mon congé, mais il y avait quand même des informations, des décisions à prendre où il fallait avoir mon autorisation, donc je n’ai jamais vraiment pu déconnecter ou débrancher la plogue à 100 %. Si j’avais su, je me serais préparée autrement. Comme je pensais que j’allais vraiment être off, j’avais délégué beaucoup de choses, mais il fallait quand même que je contrôle certaines informations, que je fasse des suivis. En même temps, je suis une nouvelle entrepreneure, donc je ne suis pas expérimentée non plus. Même dans la façon de calculer le congé – à partir de quelle date on arrête, à quelle date on revient ? –, je trouve que le congé parental n’est pas vraiment adapté aux entrepreneures.

Sophie Apollon-Auguste, mère d’une fille de 5 mois

Selon une enquête de la CDEC de Québec publiée en 2021, les entrepreneures rencontrées dans des groupes de discussion évoquent une charge émotionnelle, « un sacrifice émotionnel » et un sentiment de culpabilité quand vient le temps d’aborder la conciliation travail-famille. Parmi les commentaires recueillis, une mère a notamment dit : « Quand tu t’occupes de l’enfant, tu ne t’occupes pas de la business et quand tu t’en occupes, tu ne vois pas grandir ton enfant. »

Consultez le guide Entrepreneuriat au féminin de la CDEC de Québec

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Mylène Bezeau-Gervais, Martin Brais et leur fille Emma, 13 mois

Revoir l’ordre des priorités

C’est une évidence : devenir parent bouleverse la vie. Couple, famille, amis, travail, « tout change », résume Mylène Bezeau-Gervais. « Mais ça peut changer positivement, c’est ça que je voudrais dire aux futurs parents », ajoute la maman d’Emma, 13 mois. L’arrivée de la fillette a notamment amené son conjoint, Martin Brais, et elle à revoir la place qu’ils accordaient au travail dans leur quotidien. « On veut prendre plus soin de la petite », explique le père. Les sorties entre amis ne sont également plus les mêmes. « Dimanche, on a vu ma meilleure amie et son chum à la piscine municipale avec nos bébés. D’habitude, on ne faisait pas ça », donne comme exemple Mylène Bezeau-Gervais, en riant.

« La parentalité, c’est un changement identitaire, confirme la psychologue Lory Zephyr. On a une perspective et des réflexions différentes. […] C’est au service de la relation parent-enfant d’avoir ce remaniement psychique. » En vogue depuis quelques années, le terme « matrescence », qu’on peut résumer comme « la naissance d’une mère », fait d’ailleurs le parallèle entre la maternité et une autre période riche en bouleversements : l’adolescence. Mais contrairement aux années passées à l’école secondaire, la société réalise moins toute l’ampleur des changements provoqués par la maternité et la paternité, selon la psychologue spécialisée en santé mentale maternelle. Est-ce qu’en général, les nouveaux parents vivent bien avec cette redéfinition de leurs priorités ? « La majorité des couples finissent par trouver leurs repères », répond Lory Zephyr, en ajoutant que certains facteurs, comme un entourage prêt à aider, une bonne situation socio-économique ou la possibilité de prendre un congé parental, facilitent cette transition.

PHOTO ANYABERKUT, ARCHIVES THINKSTOCK

Selon la Société canadienne de pédiatrie, un bébé devrait voir un médecin à 2 mois, 4 mois, 6 mois, 9 mois, 12 mois, 18 mois et 2 ans, puis une fois par année jusqu’à l’âge de 5 ans.

La difficulté de trouver un médecin pour son nouveau-né

« Le premier gros choc que j’ai eu, raconte Michelle Camara, mère d’un garçon de 13 mois, c’est de ne pas trouver de médecin pour faire les premiers suivis pédiatriques de mon fils avant de partir en déplacement. C’est une fois en France que j’ai pu voir un pédiatre plusieurs fois au final. On est aussi allés en Afrique de l’Ouest, où il a été très malade. Et puis même là, j’ai eu plus de facilité à voir un pédiatre qu’au Québec. J’étais un peu démunie. J’avais besoin de faire suivre mon enfant, de savoir si tout allait bien. C’est vrai que ce sont des choses qu’on lit, mais le vivre, c’est autre chose. Pour moi, ç’a été vraiment un choc. »

Selon la Société canadienne de pédiatrie, un bébé devrait voir un médecin à 2 mois, 4 mois, 6 mois, 9 mois, 12 mois, 18 mois et 2 ans, puis une fois par année jusqu’à l’âge de 5 ans.

Consultez le site Soins de nos enfants de la Société canadienne de pédiatrie