Être parent d’un enfant en bas âge comporte son lot de défis. Et il arrive qu’on ne sache plus vers qui se tourner pour trouver des réponses à ces petits soucis du quotidien. Une fois par mois, La Presse explore une question qui touche le bien-être des enfants d’âge préscolaire avec l’aide d’un spécialiste. Aujourd’hui : comment aborder la sexualité avec des enfants de 4 ans qui s’interrogent sur l’amour et les bébés ?

Geneviève est mère de trois filles – des jumelles de 4 ans et une petite de 2 ans. Ses aînées ont commencé à lui poser beaucoup de questions sur l’amour, les bébés et la sexualité : « Comment as-tu su que papa était ton amoureux ? Comment je sais que je peux avoir un bébé avec quelqu’un ? Comment se fabriquent les bébés ? » Elles ont aussi évoqué le désir de se marier entre elles et n’ont pas trouvé sa réponse suffisante lorsqu’elle leur a dit que c’était impossible. Comment faire pour aborder ces sujets avec elles ? nous demande-t-elle.

À partir de 3 ans, c’est l’âge de la découverte de la différence des sexes, explique la sexologue Jocelyne Robert, qui est aussi conférencière et autrice d’une quinzaine de livres sur le sujet, dont Ma sexualité de 0 à 6 ans.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Jocelyne Robert, sexologue et autrice

« Sur le plan du développement psychosexuel, l’enfant commence à se toucher, il découvre son corps. Il peut y avoir des jeux sexuels. Comme parent, il faut être à l’affût et saisir les occasions d’en parler au jour le jour, que ce soit parce qu’on surprend notre enfant à jouer au docteur ou à se déshabiller. Les tout-petits sont très axés sur tout ce qui touche la différence des sexes, les organes génitaux, les bébés. Ce sont des phases normales », explique la sexologue.

Et ce n’est pas parce qu’on parle de sexualité avec eux qu’ils seront précoces sur ce plan-là, souligne-t-elle.

Des questions à tout âge

À son avis, il est important pour les parents de faire un « examen de conscience » en lien avec la sexualité : « Qu’est-ce que j’ai appris ? Qu’est-ce que je peux transmettre ? Avec quoi je suis mal à l’aise et pourquoi ? »

Ainsi, lorsque l’enfant posera des questions sur la sexualité, on risque moins d’être pris au dépourvu et de réagir à partir de ses émotions ponctuelles, précise-t-elle, en ajoutant que c’est justement pour outiller les parents qu’elle avait écrit son livre Parlez-leur d’amour et de sexualité.

Comme parents, on a le droit aussi de ne pas avoir de réponse. C’est-à-dire qu’on peut dire à l’enfant : “Je ne sais pas quoi te répondre maintenant, mais je te promets que je vais te revenir là-dessus demain.” Si on est trop déstabilisé, c’est mieux de dire ça, mais il faut y revenir le lendemain ou un peu plus tard – il ne s’agit pas d’esquiver la question.

Jocelyne Robert, sexologue et autrice

Simplicité

Il faut également faire attention à ne pas vouloir « prédire » les interrogations d’un enfant « pour en finir » avec ce sujet qui suscite bien souvent des malaises, note Jocelyne Robert. « Si un enfant pose la question “par où il sort, le bébé ?” – on tient pour acquis que l’enfant sait que le bébé est dans le ventre de la mère –, la réponse est toute simple : le bébé sort par le vagin, point. C’est tout. Et si l’enfant a d’autres questions, allons-y. Mais s’il n’a pas d’autres questions, c’est qu’il est très satisfait de cette réponse. »

Et à mesure qu’il grandit, ses questions sur la sexualité évolueront en fonction de son âge. « L’enfant de 4 ans peut demander “par où il sort, le bébé ?” ; l’enfant de 7 ans, “comment il est entré ?” ; et l’enfant de 12 ans va demander “comment ne pas faire de bébé ?”. Le sujet est toujours le même, mais l’intérêt, la préoccupation et le besoin de l’enfant varient. »

Quant à la question des jumelles de 4 ans qui se demandent pourquoi elles ne peuvent pas se marier entre elles, Jocelyne Robert estime qu’il faut mettre l’accent sur le fait qu’on peut être bien avec quelqu’un sans se marier avec cette personne et, surtout, qu’on ne peut pas être amoureux de quelqu’un de sa famille.

« C’est sûr que l’idée de se marier et de quitter sa sœur, ça doit être troublant pour des jumelles inséparables. Mais l’amour, c’est réservé à quelqu’un qu’on va choisir hors de la famille. Le message est très clair tout de suite. Ça ne veut pas dire que l’enfant ne reviendra pas sur cette question-là, mais il faut que les réponses soient courtes et limpides, qu’il n’y ait pas de quiproquo. »

Consultez le site de Jocelyne Robert

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