Être parent d’un enfant en bas âge comporte son lot de défis. Et il arrive qu’on ne sache plus vers qui se tourner pour trouver des réponses à ces petits soucis du quotidien. Une fois par mois, La Presse explore une question qui touche le bien-être des enfants d’âge préscolaire à l’aide d’un spécialiste. Aujourd’hui : doit-on accorder autant d’importance à la sieste chez les enfants de 4 et 5 ans ?

Ils sont nombreux, ces parents qui préféreraient qu’à partir d’un certain âge, leurs enfants ne fassent plus la sieste à la garderie. Parce que cette période de sommeil en début d’après-midi perturberait leurs nuits, selon certains. Ou retarderait l’heure du coucher le soir, pour d’autres. Des parents rapportent que les enfants ressentent même la pression de faire de « beaux dodos » dans leur milieu de garde.

L’experte en éducation au sommeil Brigitte Langevin, qui est aussi conférencière et autrice, entre autres, du livre Sommeil – La boîte à outils, paru aux Éditions de Mortagne et destiné aux parents d’enfants de 0 à 5 ans, estime qu’il y a beaucoup de fausses perceptions liées au sommeil des enfants.

La majorité des parents pensent que moins l’enfant dort pendant le jour, mieux il va dormir la nuit. Que plus on le couche tard, plus longtemps il va dormir. C’est un principe qui s’applique au sommeil de l’adulte, pas chez l’enfant. L’enfant, lui, plus il est fatigué, moins il arrive à dormir.

Brigitte Langevin, experte en éducation au sommeil

« Et là, on pense qu’on a un enfant hyperactif, hypervigilant, alors qu’il est tout simplement fatigué et que si on corrige son horaire pour répondre à son besoin réel, son tempérament va changer. »

Mais au fond, c’est quoi, un « beau dodo » ?

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

La spécialiste du sommeil Brigitte Langevin

Brigitte Langevin croit qu’il y a autant de définitions que d’individus. Lorsque des parents la consultent parce que leur enfant a des nuits difficiles, alors qu’il fait des « beaux dodos » le jour à la garderie, sa réponse est bien simple : « Je dis toujours aux parents qu’un beau dodo, ça commence par la nuit. Alors, s’il n’y a pas de pleurs au coucher, pas d’éveil dans l’heure qui suit, de cris dans la nuit, d’éveil nocturne de longue durée, d’éveil trop matinal ou de pleurs au lever, ça veut dire que tu as de beaux dodos et que tes siestes sont parfaites. Mais si ses nuits se gâchent, ce n’est pas un beau dodo pour cet enfant-là, même si l’éducatrice dit qu’il a fait un beau dodo. »

Il y a même des enfants qui ont « l’insomnie joyeuse », souligne-t-elle ; c’est-à-dire qu’au lieu de pleurer quand ils se réveillent la nuit, ils placotent et s’assoient dans leur lit.

Éliminer la sieste ou non ?

Le réflexe de bien des parents, dans ces cas, est de chercher à éliminer la sieste du début d’après-midi, indique l’experte. « Mais ce n’est pas comme ça que ça fonctionne. On ne passe pas par l’épuisement pour faire en sorte que les nuits aillent bien. » C’est certainement plus facile, précise-t-elle, de sauter les siestes : « L’enfant se couche à 19 h 30, il s’endort en dedans de cinq minutes et tout le monde est content. Mais on lui apprend à ne s’endormir qu’en état d’épuisement. »

« Les parents ont souvent l’impression que les éducatrices forcent les enfants à dormir. On ne peut pas forcer le sommeil. Quand le corps ressent l’appel au sommeil et que l’enfant choisit de s’y laisser aller, c’est parce qu’il y a un besoin ; par contre, un enfant de 4 ou 5 ans qui dort deux heures l’après-midi, c’est un peu long. Il faut ramener une nuit suffisante pour que la sieste diminue d’elle-même et là, on rentre dans l’ordre des choses. »

Elle estime cependant que les milieux de garde devraient offrir un jouet aux enfants de 4 ans et plus qui ne dorment pas au bout de 30 à 45 minutes, par respect pour eux, plutôt que de les laisser plus de deux heures éveillés sans rien faire – tant qu’ils ne dérangent pas le sommeil de leurs voisins.

Quant aux siestes la fin de semaine, à la maison, si elles sont difficiles à mettre en place, mais que l’enfant de 4 ou 5 ans dort bien la nuit, pourquoi ne pas lui offrir tout simplement une période de repos de 30 à 45 minutes ? suggère-t-elle. « Le repos passif, c’est une mine d’or ; on n’y pense pas souvent, être au lit même sans dormir, c’est bénéfique. »

Appel à tous

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