Fiston a reçu cette semaine son bulletin du ministère de l’Éducation. Il a eu des REU partout ! En science comme en mathématiques, en français comme en histoire, en éducation physique comme en art dramatique. Pas une note, ni chiffrée ni explicative de ce que signifie REU, en revanche. Mon sens de la déduction ainsi que mon petit doigt me disent qu’il a « réussi » sa quatrième secondaire. Félicitations, mon grand !

Fiston a reçu cette semaine son bulletin du ministère de l’Éducation. Il a eu des REU partout ! En science comme en mathématiques, en français comme en histoire, en éducation physique comme en art dramatique. Pas une note, ni chiffrée ni explicative de ce que signifie REU, en revanche. Mon sens de la déduction ainsi que mon petit doigt me disent qu’il a « réussi » sa quatrième secondaire. Félicitations, mon grand !

Les classes reprennent dans un mois. Or, si la COVID-19 force la fermeture des écoles, a appris en début de semaine ma collègue Marie-Ève Morasse, il n’y aura pas de cours obligatoires à l’automne. Les enseignants proposeront plus ou moins les mêmes prestations qu’au printemps, c’est-à-dire que les cours à distance par vidéoconférence resteront facultatifs. Oh ! Et j’oubliais presque : la plupart des centres de services scolaires n’ont toujours pas élaboré leur plan d’urgence en cas de reconfinement…

>(Re)lisez l’article « Des « contacts fréquents » avec les élèves en cas de reconfinement »

J’étais de ceux qui trouvaient qu’il ne fallait pas courir le risque de faire rentrer les élèves en classe en fin d’année scolaire. La santé d’abord. Celle du personnel scolaire comme celle des élèves. Je ne faisais pas un plat des nombreux cours ratés et de l’improvisation inévitable du système. Il y avait plus urgent. Aplatir la courbe, sortir du bourbier des CHSLD.

J’ai trouvé cependant que dans les écoles publiques qui n’ont pas rouvert leurs portes, en région montréalaise, par exemple, on a mis du temps à trouver une erre d’aller. Les écoles ont fermé le 13 mars. Les cours n’ont officiellement repris que le 19 mai.

L’insistance sur l’aspect facultatif des travaux scolaires m’a semblé d’emblée contre-productive. Dire à un adolescent que ce qu’il doit faire « ne compte pas », c’est s’assurer ou presque qu’il ne s’y applique pas.

Ceux qui n’ont pas d’enfants d’âge scolaire diront que c’est la responsabilité des parents de s’assurer que leur progéniture s’attelle à la tâche scolaire. Oui et non. Les parents – que sont aussi, souvent, les enseignants – ne peuvent pas suppléer à l’absence d’un cursus scolaire clair et précis. Surtout pas en période de confinement et de télétravail, alors qu’il y a le reste des tâches quotidiennes à accomplir et que la charge mentale n’est pas moindre. Tant s’en faut. On ne se transforme pas inopinément en professeur de mathématiques du secondaire. Plusieurs parents l’ont constaté à leurs dépens au printemps.

J’ai deux « modèles » d’élève à la maison. Un modèle autonome, qui regrette que la dernière session de l’année scolaire n’ait pas été comptabilisée – ce qu’on lui a pourtant laissé entendre pendant plusieurs semaines – afin que sa moyenne générale soit bonifiée. Et un modèle récalcitrant, qui ne se formalise guère de ses résultats et ne se porte jamais volontaire pour faire ses devoirs et leçons.

Le modèle récalcitrant a grand besoin d’un encadrement serré au quotidien, pour ne pas dire de tous les instants. Ça tombe bien, à son école secondaire publique, il est suivi de près par des gens très dévoués et compétents. S’il n’y a pas de retour en classe le mois prochain, c’est pour lui que je m’inquiète le plus. Et pour tous ces adolescents insouciants, plus ou moins motivés par l’école, qui risquent à terme de décrocher si l’on ne les hameçonne pas davantage au cours des prochains mois.

Je n’ai d’autres compétences en matière d’éducation que d’être un père (et le fils d’un ancien directeur d’école secondaire).

PHOTO JEFF MCINTOSH, ARCHIVES LA PRESSE

Il est temps de se préparer à toute éventualité, écrit notre chroniqueur, ce qui comprend la possibilité que les élèves ne puissent retourner en classe et aient à suivre des cours à distance, par vidéoconférence.

Mais il me semble évident qu’on ne peut laisser plus ou moins à eux-mêmes des jeunes de 12 à 17 ans, pendant deux trimestres, sinon davantage, et espérer qu’il n’y ait pas de conséquences sur leurs résultats, leur assiduité, leur motivation et leur désir de poursuivre leurs études.

Il faut réagir. Sous peine de se retrouver avec une cohorte de futurs décrocheurs (dont les parents auront vécu des épuisements professionnels). Je ne dis pas qu’il faut ouvrir à tout prix les écoles et je comprends le personnel scolaire d’être craintif. Les dernières études démontrent que les adolescents peuvent être porteurs de la COVID-19 comme les adultes et qu’ils ne sont pas moins à risque de la transmettre et d’en souffrir.

On ne peut pas continuer indéfiniment à souhaiter une solution sans se préparer au pire. Si Québec a déterminé que 250 adolescents pourront se trouver dans la même salle de cinéma le 3 août, ceux-ci devraient aussi pouvoir se rendre en classe trois semaines plus tard. Mais si, par malheur, dans un mois, ces 250 adolescents ne peuvent plus aller au cinéma ni à l’école – ce qui reste dans l’ordre du possible –, il faudrait s’assurer qu’ils ne passent pas tout leur temps sur Netflix…

Je comprends que rien dans ce confinement n’est simple et que la pandémie complique tout. Le transport scolaire, par exemple, ou encore l’accès universel à l’éducation. Quelque 80 000 élèves n’ont pas le matériel informatique adéquat à leur disponibilité pour suivre des cours en ligne. C’est pourquoi Québec a débloqué en mai 150 millions afin que les écoles publiques puissent acheter 200 000 tablettes et ordinateurs en prévision de la rentrée.

Québec a aussi transmis en juin aux centres de services scolaires des directives afin qu’ils établissent un plan d’urgence en cas de reconfinement à l’automne. Les enseignants auront la responsabilité d’assurer des « contacts fréquents et un suivi hebdomadaire personnalisé [à distance] auprès de l’ensemble de ses élèves », selon les documents obtenus par ma collègue.

En revanche, donner des cours à distance par vidéoconférence restera facultatif. Peut-être que l’an prochain, le bulletin du ministère de l’Éducation de Fiston sera truffé de mentions « PARFA » pour « participation facultative ». Tout est parfait. L’important, c’est de participer…

M’est avis qu’il n’est plus temps pour le « facultatif ». Il est temps de distribuer des ordinateurs et des tablettes aux élèves qui en ont besoin (ce genre de prêt s’est fait sans heurts, en mai, à l’école de Fiston). Il est temps de se préparer à toute éventualité, ce qui comprend la possibilité que les élèves ne puissent rentrer en classe et aient à suivre des cours à distance, par vidéoconférence.

Il est temps d’agir. Il en va de l’avenir des élèves et de la santé mentale de leurs parents.