Aujourd’hui, ce sera la première fête des Mères qu’Emmanuelle Montpetit passera sans ses enfants, Alice, 6 ans, et Olivier, 2 ans.

Emmanuelle, 34 ans, est infirmière. Elle fait des soins à domicile et du dépistage de la COVID-19. Pendant qu’elle contribue à l’effort collectif pour traverser cette pandémie, ses deux enfants sont chez sa sœur, Mélissa, qui les garde à temps plein, jour et nuit, jusqu’à la réouverture des écoles.

Pour souligner la fête des Mères, Mélissa a tout de suite accepté de faire une surprise à sa petite sœur infirmière. Elle lui a écrit une lettre et la lui a lue sur la plateforme Zoom.

Je sais comment gros est le sacrifice que tu fais. Je sais que tu as hâte d’être auprès de tes amours, de les serrer et de les sentir. Tu es une grande femme, ma sœur. Tu as un cœur immense, car il en faut un très gros pour faire un si grand sacrifice et un si grand don de soi, comme tu le fais.

Mélissa

Alice, 6 ans, a aussi composé quelques phrases pour sa maman.

Joyeuses fêtes des Mères, maman. Je m’ennuie de toi. J’ai hâte que tu me chantes des chansons et que tu joues avec moi. J’ai hâte que l’on dorme ensemble avec Olivier. Je t’aime.

Alice, 6 ans

Une dure décision

Quand l’épidémie de COVID-19 s’est déclarée au Québec, quand les écoles et les garderies ont fermé, Emmanuelle Montpetit et son conjoint, Mathieu, devaient trouver une solution pour faire garder leurs enfants. Mathieu travaille de nuit comme répartiteur au 911, un autre secteur d’activité essentiel.

Le couple de L’Assomption avait l’option d’envoyer ses enfants dans un service de garde d’urgence rendu disponible pour les parents n’ayant aucune solution de rechange. Mais les parents d’Alice et Olivier en avaient une, solution de rechange. Une belle, en plus : la sœur d’Emmanuelle, Mélissa, et leur mère, Danielle, s’offraient pour garder les enfants en alternance chez elles, à Joliette et à Repentigny.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Alice (6 ans) et Olivier (2 ans), en compagnie de leur tante Mélissa 

Comme le risque de contracter la COVID-19 n’était pas négligeable dans les services de garde d’urgence, et comme Olivier était encore bien petit pour s’adapter ainsi à un nouveau milieu, les parents ont choisi la deuxième option. Et puis les enfants sont très proches de leur grand-mère et de leur tante.

Au départ, Emmanuelle et Mathieu reprenaient les enfants le soir. « Mais quand on a commencé à avoir des cas de COVID positifs, on a pris la dure décision de les envoyer à temps plein, à partir du 28 mars, relate Emmanuelle. Je l’ai fait pour les protéger, mais aussi beaucoup pour protéger ma mère et ma sœur, qui, elles, faisaient partie de la population à risque pour la COVID. Je m’en serais voulu toute ma vie si elles avaient été contaminées. »

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Infirmière, Emmanuelle Montpetit passera cette année la fête des Mères sans ses deux enfants qu’elle a confiés à sa sœur jusqu’à la réouverture des écoles.

Emmanuelle a continué pendant un moment d’aller voir ses enfants de temps à autre, dans le garage de sa mère, en gardant ses distances. Mais le risque était présent. Puis, elle a commencé à faire du dépistage de la COVID-19 au travail.

Il y a près de trois semaines, le couple a donc pris la décision de cesser les visites en personne. Emmanuelle et son conjoint appellent les enfants tous les jours sur FaceTime. La maman visualise le moment où elle ira les chercher quand les écoles rouvriront. Ça l’aide à passer au travers. Leur présence lui manque au plus profond de sa chair.

J’ai hâte de mettre mon nez dans la nuque de mon bébé. De les sentir, de les bercer, de rire avec eux, de les chatouiller. J’ai hâte de leur lire des histoires, d’aller jouer dehors, de faire de la craie, de faire du vélo. Je m’ennuie de tout !

Emmanuelle Montpetit 

« Je m’ennuie même des crises, des fois. Je m’ennuie que ça crie et que ça pleure dans la maison ! », dit-elle.

Emmanuelle et Mathieu se donnent beaucoup dans le travail « pour compenser ». Quand nous lui avons parlé, l’infirmière s’apprêtait à faire 10 jours en ligne de dépistage, de façon volontaire. Elle l’aime, son travail. « En l’absence des enfants, ça allait de soi qu’on se dévoue. On fonce tête première. »

Les enfants se sont adaptés à la vie chez leur tante, mais ils s’ennuient. Olivier, 2 ans, ne l’exprime pas beaucoup, mais Alice, oui. « Elle a très hâte de revenir à la maison. Elle compte les jours », confie leur tante Mélissa.

Emmanuelle pense beaucoup à sa propre mère, qui, malgré sa soixantaine, gardait les enfants deux ou trois jours par semaine jusqu’à récemment. « Je m’ennuie aussi beaucoup de la mienne, dit Emmanuelle, émue. Beaucoup, beaucoup. »