La Fédération québécoise des organismes communautaires Famille (FQOCF) s’inquiète d’une situation qui lui est de plus en plus signalée par ses membres : des familles monoparentales laissent leurs enfants seuls dans la voiture pendant qu’elles font l’épicerie, en raison de la recommandation des instances de santé publique de limiter le nombre de clients dans les commerces.

« Plusieurs familles monoparentales se présentent à l’épicerie et se font dire qu’il faut venir un à la fois, soit par l’épicier, soit par l’homme de sécurité à l’entrée, relate Marie-Ève Brunet Kitchen, directrice générale de la FQOCF. On a de plus en plus de parents qui cachent des enfants dans les voitures. » 

Dans d’autres cas, note Mme Brunet Kitchen, ce sont les parents qui ont pris eux-mêmes la décision de laisser leurs enfants dans l’auto, parce qu’ils n’osaient pas demander la permission de les amener avec eux.

À ce jour, la Fédération recense une dizaine de cas de parents seuls qui ont confié à des intervenants d’organismes communautaires de différentes régions avoir laissé leurs enfants dans la voiture parce qu’ils ne voyaient pas d’autres possibilités. 

PHOTO FOURNIE PAR MARIE-ÈVE BRUNET KITCHEN

Marie-Ève Brunet Kitchen, directrice générale de la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille

On a une forte inquiétude sur ce plan-là. Même en dehors de la chaleur, on ne veut pas qu’un enfant de moins de 7 ans reste dans une voiture…

Marie-Ève Brunet Kitchen, directrice générale de la Fédération québécoise des organismes communautaires Famille, qui souligne le retour prochain des journées chaudes

Elle convient qu’il est préférable, pour les familles monoparentales, de faire préparer leur commande avant d’aller la chercher, ou de se la faire livrer, mais rappelle que les délais pour les commandes peuvent être longs – jusqu’à deux semaines dans certaines épiceries. « Dans certains cas, ce n’est juste pas possible, dit-elle. On comprend très bien le parent qui se retrouve dans une impasse. »

Joelle B., mère seule d’un garçon de 10 ans, s’est fait refuser l’accès au Dollarama de sa région ces derniers jours. Elle y allait pour acheter des produits de première nécessité pour une amie, mère de quatre enfants. « Le jeune homme à l’entrée m’a dit que c’était une loi du gouvernement, relate-t-elle. Je lui ai dit que je ne le laisserais pas dans l’auto, et il m’a dit de le laisser à côté de lui, dans l’entrée du magasin. Heu… non ! »

Comme il n’était pas question de laisser son fils à l’entrée et encore moins dans sa voiture, Joelle s’est rendue dans un autre Dollarama, où l’homme à l’entrée a eu une réaction totalement différente : il a rappelé au fils de Joelle les consignes et lui a donné un panier, le traitant comme un autre client.

Selon un appel à tous réalisé dans un groupe Facebook, plusieurs parents seuls nous ont dit que les épiciers se montraient compréhensifs lorsqu’ils devaient se présenter dans un commerce avec leur enfant. La plupart des parents nous ont dit qu’ils arrivaient à se débrouiller sans devoir amener leurs enfants avec eux, soit en demandant à des proches d’y aller, soit en faisant des commandes par téléphone ou en ligne.

Parler aux propriétaires

C’est d’ailleurs ce que recommande en premier lieu Stéphane Lacasse, directeur des affaires publiques à l’Association des détaillants en alimentation du Québec : les parents peuvent faire des commandes en ligne ou téléphoniques ou demander de l’aide à un proche, dit-il.

« Si personne ne peut vous aider, allez parler au propriétaire, conseille Stéphane Lacasse, qui convient qu’il n’est pas du tout souhaitable qu’un enfant attende seul dans la voiture. Il va être à l’écoute de votre réalité. Oui, il y a une situation de pandémie, mais ce sont quand même des êtres humains. Ils peuvent comprendre la situation. » L’épicier pourrait aussi recommander au parent de venir plus tôt, quand il y a moins d’affluence, dit-il.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux, on appelle « au bon jugement de toutes les personnes impliquées ». Les parents sont invités, « si possible », à faire l’épicerie seuls et à utiliser les services de commande en ligne, de ramassage ou de livraison. Les commerçants sont pour leur part invités à faire preuve de jugement dans l’évaluation de la situation, en acceptant, par exemple, d’« admettre un parent accompagné d’un enfant en bas âge ».