(Montréal) Les futurs parents devraient cesser toute consommation d’alcool plusieurs mois avant la conception pour réduire le risque de cardiopathie congénitale du bébé, prévient une méta-analyse chinoise.

Le risque augmentait de 44 % si le père consommait de l’alcool trois mois avant la grossesse ou pendant le premier trimestre, et de 16 % dans le cas de la mère, comparativement à une abstinence totale.

Une hyperalcoolisation rapide — à savoir cinq consommations ou plus en une seule séance — a été associée à une hausse de 52 % du risque de cardiopathie congénitale du bébé pour les pères et de 16 % pour les mères.

L’auteur principal de l’étude, le docteur Jiabi Qin de l’École de santé publique Xiangya de l’Université Central South, a précisé dans un communiqué que les hommes ne devraient consommer aucun alcool pendant les six mois précédant la conception, et les femmes pendant un an, en plus de l’éviter pendant leur grossesse.

La méta-analyse chinoise regroupait 55 études réalisées entre 1991 et 2019, représentant plus de 40 000 bébés ayant une cardiopathie congénitale et près de 300 000 bébés en santé. Les auteurs préviennent qu’il s’agit d’une étude observationnelle qui ne témoigne pas d’un lien de causalité.

« C’est une étude qui contribue beaucoup à notre connaissance de l’effet de l’alcool et de l’environnement préconceptionnel, a dit Janice Bailey, la directrice du Fonds de recherche du Québec — Nature et technologies. Ce qui m’a vraiment frappé, et ce que j’ai beaucoup apprécié, c’est qu’ils ont vraiment identifié un effet paternel, ce qui d’après moi est une lacune majeure dans notre société. »

Si on sait depuis longtemps que l’environnement maternel est très important pour le développement et la santé des enfants, celui du père a beaucoup moins retenu l’attention des chercheurs, déplore-t-elle.

« Et en conséquence, il y a beaucoup de blâmes de mis sur les épaules des mères, a dit Mme Bailey. Je pense que c’est un aspect important pour sensibiliser tout le monde […] de l’importance de l’environnement paternel préconceptionnel. »

Zones d’ombre

Cela étant dit, cette étude contient quelques zones d’ombre qu’on arrive difficilement à éclairer.

Dans un premier temps, Mme Bailey admet ne « pas comprendre du tout » sur quoi les chercheurs chinois s’appuient pour recommander aux femmes d’éviter toute consommation d’alcool une année entière avant la conception du fœtus.

La recommandation de six mois d’abstinence faite aux pères est en revanche un petit peu plus compréhensible quand on sait que le sperme a besoin d’au moins trois mois pour faire son chemin des testicules jusqu’à l’extérieur du corps ; en d’autres mots, le sperme éjaculé aujourd’hui porte potentiellement encore les effets de l’alcool consommé il y a trois mois.

Un mystère plane aussi sur la hausse de 44 % du risque de cardiopathie congénitale associée à une consommation d’alcool du père pendant le premier trimestre de grossesse.

« C’est important d’en parler pour qu’on puisse faire autre chose, a conclu Mme Bailey. On peut toujours les critiquer, mais il y aura des gens ici qui vont dire,’OK, il faut faire d’autres recherches’, et ça, c’est toujours une bonne chose. »

Les cardiopathies congénitales comptent parmi les déficiences de naissance les plus courantes et sont la principale cause de mort périnatale.

Les conclusions de cette étude sont publiées par l’European Journal of Preventive Cardiology.