Pour en finir avec les vilaines, acariâtres et autres sadiques belles-mères, des stéréotypes qui ont la vie dure dans le merveilleux monde de la littérature, voici « Copine ». Et « copine ». Avec un grand C, puis un petit c.

« Parce que la grande protège la petite », glisse la comédienne Marie-Chantal Perron, qui signe, avec trois autres femmes (Tammy Verge, comédienne, Kim Nunès, écrivaine, et Amélie Dubois, aux illustrations), un très joli ouvrage de fiction sur la question : copine et Copine, lancé aux Éditions de l’Homme. Précision : un rare ouvrage de fiction sur la question.

« Je regarde les contes, on est toutes des méchantes femmes, on séquestre, on empoisonne, on rend la vie misérable ! Mais ce n’est pas du tout ça ! », s’emballe d’emblée Marie-Chantal Perron, rencontrée la semaine dernière, en compagnie de Tammy Verge, pour parler de belles-mères et de belles-filles, des mots flous, maladroits, lourds et teintés, qui ont, soyons francs, largement fait leur temps. « Ça ne se peut pas ! »

Il faut dire que Marie-Chantal Perron est justement « Copine » (avec un grand C) depuis cinq ans. Une relation unique, imprévue (« le plus beau cadeau de ma vie »), et visiblement emballante (« je ne m’attendais pas à avoir une amie de 42 ans de moins que moi ! »). Et dès les premiers instants, spontanément, avec la petite Rose, à qui est dédié le livre (la fille de son chum, donc), elles ont choisi de se dénommer ainsi. « Rapidement, c’est devenu copine, puis cop, ou super cop ! »

De son côté, Tammy Verge a eu une belle-mère dès l’âge de 11 ans. Ça ne s’invente pas : son nom de famille était Cool. Mais elle l’a toujours appelée par son prénom. « Ça m’a toujours gossé, le mot belle-mère, la blonde du père. Comme si je n’avais pas de rapport direct, dit-elle. Inconsciemment, ça me travaillait. »

IMAGE FOURNIE PAR LES ÉDITIONS DE L’HOMME

copine et Copine, de Marie-Chantal Perron, Tammy Verge, Kim Nunès et Amélie Dubois

D’où l’idée du livre, donc, écrit à huit mains (et autant de souvenirs et d’anecdotes), lequel raconte avec beaucoup de tendresse, en textes et en dessins, la relation toute particulière d’une gamine et de la copine de son père. On les voit se rencontrer, s’apprivoiser, puis s’aimer. On les voit se choisir, finalement. Parce que c’est ça, quelque part, le lien unique qui lie une femme aux enfants de son conjoint. C’est ce choix. Cette décision, toute rationnelle, de s’attacher. Une décision nullement imposée.

Pourquoi un mot [belle-mère] si moche alors que c’est une relation si grande ?

Tammy Verge, comédienne

« C’est une relation où tu n’es pas obligée. Tu choisis d’aimer. Tu choisis et tu l’appelles “belle-mère”. Mon Dieu, c’est drabe ! », dit celle qui aimerait bien, pourquoi pas, qu’on adopte tous un jour le fameux mot « copine », « et qu’on chérisse cette relation-là ! »

Une relation de plus en plus commune, faut-il rappeler (« il va y avoir de plus en plus de copines ! »), à l’heure des séparations et autres recompositions. « C’est la réalité aujourd’hui avec les familles recomposées. Il y a des liens qu’on se crée, ajoute Tammy Verge. Il faut les inventer ! »

Non seulement il n’existe évidemment pas de « mode d’emploi », précise-t-elle, mais en plus, la nature du lien est variable, et surtout propre à chacune. « C’est personnel. C’est un lien que tu choisis d’entretenir ou pas », répète-t-elle. La preuve : « J’ai été la conjointe de quelqu’un qui avait des enfants, et je n’ai pas développé quelque chose. Avec la blonde de mon père, j’aurais pu ne pas développer de lien, mais j’ai choisi [de le faire]. »

Un choix qui confirme une fois de plus la beauté et la grandeur de la relation. Quand relation il y a. Marie-Chantal Perron abonde dans ce sens : « Je me suis sentie privilégiée, quand j’ai rencontré Rose, de l’affection qu’on s’est donnée l’une l’autre. Je ne l’ai jamais considérée comme ma fille, mais c’est une enfant d’une extrême importance à mes yeux. »

Ni une mère ni une sœur, encore moins une gardienne (« t’es pas un staff ! »), cette « copine » ou « adulte signifiant » tient un rôle d’amie, justement, avec une certaine autorité en prime. « Moi, le rôle que je souhaite prendre, c’est partager toutes mes passions, l’emmener au cinéma, au théâtre, aux Îles-de-la-Madeleine ! enchaîne-t-elle, visiblement inspirée par le sujet. Tout ce que je partagerais avec une copine ! »

À noter, dans le livre, les femmes ont volontairement choisi de ne pas mettre en scène le père, encore moins la mère. Ils sont littéralement invisibles. Un choix qui se défend, et qui en dit long sur l’objectif du livre. « On voulait isoler la relation, être juste dans la beauté. Et ne pas parler des enjeux d’adultes. Ça, ce sera pour un autre livre ! », conclut Marie-Chantal Perron, en pouffant de rire.

copine et Copine, de Marie-Chantal Perron, Tammy Verge, Kim Nunès, et Amélie Dubois, Éditions de l’Homme, 72 pages.