«Moi, je sais ce que c'est que d'envoyer un enfant à l'école, à la rentrée scolaire, quand tu n'as pas de sous.»

Thérèse Tanguay Dion sait de quoi elle parle. Des enfants, elle en a eu 14. Pensez-y: 14 enfants à nourrir, à laver, à câliner, et à nourrir encore; 14 enfants à habiller, 14 sacs à dos à préparer, à remplir de fournitures scolaires. Disons que ça en fait des crayons à tailler, des devoirs à superviser.

Elle lance ce matin  un DVD portant sur l'histoire de sa vie (Ce n'était qu'un rêve... La vie de Maman Dion), à l'école Petite-Bourgogne. Nous avons profité de l'occasion pour nous entretenir avec elle et jaser vie de famille. Parce qu'en la matière, c'est clair, la dame peut nous en apprendre.

Les profits réalisés par la vente de son DVD seront remis à sa fondation (fondationmamandion.org), qui vient en aide d'une façon toute particulière aux enfants défavorisés, offrant un coup de pouce ponctuel (à la rentrée scolaire), à haute valeur symbolique: un sac à dos rempli de fournitures scolaires et des vêtements neufs à chaque enfant qui en bénéficie. En 10 ans, elle a versé plus de 650 000$ à plus de 1630 enfants.

Par ce «cadeau», Mme Dion souhaite lutter, à sa manière, contre le décrochage scolaire. «Je sais ce que c'est quand c'est dur. Quand un enfant est mal vêtu à la rentrée de septembre, s'il arrive avec ses sandales d'été, il fait rire de lui. Si la situation ne change pas, qu'est-ce que ça fait après plusieurs années? Un décrocheur!»

Et contre toute attente, cette mère qui en a vu d'autres trouve qu'«aujourd'hui, c'est encore plus exigeant». Permettez-nous de douter. Pendant plus de 20 ans, chaque matin, elle s'est levée à 5h30, pour changer ses bébés (parce qu'il y avait toujours des bébés), habiller et nourrir les aînés. Ensuite c'était l'heure du lavage (sans laveuse, il va sans dire), puis la préparation du dîner (parce qu'il y en avait toujours à dîner). L'après-midi, elle faisait son ménage (jamais elle n'a eu de femme de ménage), puis préparait le souper (ni d'aide-cuisinière). Après manger, il fallait faire la vaisselle (imaginez l'évier, rempli d'ustensiles), puis passer aux bains, aux devoirs, aux dodos. Le soir, la maisonnée enfin couchée, elle se mettait à tricoter. Il fallait bien les habiller, ces 14 enfants. Jamais de repos. Jamais de vacances. «Il fallait toujours prévoir. Je m'arrangeais pour qu'ils ne manquent de rien.»

«Je n'ai jamais entendu maman se plaindre qu'elle était fatiguée», souligne une de ses filles, dans le documentaire.

Plus exigeant aujourd'hui, vraiment? «Parce que les deux parents travaillent! La vie est beaucoup plus rock'n'roll aujourd'hui, estime Mme Dion. Le travail, la garderie, le transport, cela fait de l'ouvrage de plus. Ensuite il y a le souper et les bains, ça n'arrête plus! Aujourd'hui, on a tout. On dit qu'on a évolué, mais ça va vite.

«Ça va vite, conclut-elle. Un peu trop vite.»