(New York) Le mot « gaslighting » – un comportement qui consiste à manipuler l’esprit de façon trompeuse – est le mot de l’année de Merriam-Webster.

Les recherches pour le mot, que l’on peut traduire en français comme « détournement cognitif », sur le site du dictionnaire ont bondi de 1740 % en 2022 comparativement à l’année précédente.

Mais quelque chose de particulier s’est produit. Il n’y a pas eu un seul évènement qui a suscité des pics significatifs de curiosité, comme c’est normalement le cas pour mot de l’année.

En fait, le mot « gaslighting » était omniprésent.

« C’est un mot qui a progressé si rapidement dans la langue anglaise, et surtout au cours des quatre dernières années, qu’il a été une surprise pour moi et pour beaucoup d’entre nous », a avoué Peter Sokolowski, rédacteur en chef de Merriam-Webster.

« C’était un mot fréquemment recherché chaque jour de l’année », a-t-il ajouté.

La principale définition de Merriam-Webster pour « gaslighting » est la manipulation psychologique d’une personne, généralement sur une longue période, qui « amène la victime à remettre en question la validité de ses propres pensées, sa perception de la réalité ou ses souvenirs et conduis généralement à la confusion, à la perte de confiance et d’estime de soi, l’incertitude quant à sa stabilité émotionnelle ou mentale et une dépendance à l’égard de l’agresseur ».

Plus largement, le dictionnaire définit ainsi le mot : « L’acte ou la pratique consistant à tromper quelqu’un de manière grossière, en particulier pour son propre avantage. »

« Gaslighting » est un outil odieux fréquemment utilisé par les agresseurs dans les relations – et par les politiciens et autres personnalités de l’actualité. Cela peut se produire entre partenaires amoureux, au sein d’une unité familiale élargie et entre amis. Il peut s’agir d’une tactique d’entreprise ou d’un moyen d’induire le public en erreur. Il y a aussi le « gaslighting médical », lorsqu’un professionnel de la santé rejette les symptômes ou la maladie d’un patient comme étant « tout dans votre tête ».

Malgré son importance relativement récente, le mot a été inventé il y a plus de 80 ans avec Gas Light, une pièce de 1938 de Patrick Hamilton.

Elle a donné suite à deux adaptations cinématographiques dans les années 1940. L’une, le film Gaslight de George Cukor en 1944, mettait en vedette Ingrid Bergman dans le rôle de Paula Alquist et Charles Boyer dans le rôle de Gregory Anton. Les deux se marient après une romance éclair et Gregory s’avère être un champion de « détournement cognitif » auprès de sa femme. Entre autres exemples, il insiste sur le fait que ses récriminations concernant la gradation constante des lampes à gaz de leur maison de ville à Londres sont le fruit de son esprit troublé. Ce n’était pas le cas.

La mort d’Angela Lansbury en octobre a suscité un certain intérêt pour les recherches du mot, a indiqué M. Sokolowski. Elle jouait Nancy Oliver, une jeune femme de chambre engagée par Gregory Anton, à qui l’on a dit de ne pas déranger sa femme « nerveuse ».

Le terme « gaslighting » a ensuite été utilisé par les praticiens de la santé mentale pour décrire cliniquement une forme de contrôle coercitif prolongé dans les relations abusives.

Merriam-Webster, qui enregistre 100 millions de pages vues par mois sur son site, choisit son mot de l’année en se basant uniquement sur les données. M. Sokolowski et son équipe éliminent les mots populaires les plus souvent recherchés pour évaluer quel mot a reçu une augmentation importante au cours de l’année précédente.