(Tralee) « Elle était charmante et belle comme la rose de l’été » : cette ballade du XIXe siècle a inspiré un concours international de beauté visant à élire une jeune femme d’origine irlandaise, une compétition critiquée pour son manque de diversité.

Ce concours retransmis à la télévision et baptisé « Rose of Tralee » a fait son grand retour cette année après avoir été annulé deux années de suite en raison de la pandémie.

Lorsqu’il s’est achevé cette semaine dans cette ville du comté de Kerry (sud-ouest de l’Irlande), les candidates, trente-trois jeunes femmes vêtues de robes de soirée colorées, ont entonné la fameuse chanson.  

Connues sous le nom de « roses », elles sont irlandaises ou issues de la diaspora irlandaise dans le monde, et ont remporté des sélections locales attirant des milliers de participantes.  

Cathrena Collins, étudiante en droit de 24 ans, a ainsi représenté la communauté irlandaise dans sa ville de New York, tout comme sa grand-mère l’avait fait en 1965. « C’était un grand truc pour moi. En grandissant, j’en ai toujours entendu parlé », a-t-elle raconté à l’AFP.

Pays de cinq millions d’habitants, l’Irlande a traditionnellement été un pays d’émigration, ce qui a changé lorsque son économie a décollé dans les années 1990, attirant notamment des immigrés européens. La plupart des habitants se définissent comme blancs, mais la diversité ethnique augmente dans le pays.

Mais malgré des candidates venues d’un peu partout dans le monde, les candidates 2022 étaient toutes blanches, suscitant des critiques sur le manque de diversité dont celles d’une ancienne « rose », Brianna Parkins.  

« Il semble y avoir un manque de diversité », a déclaré à la chaîne publique irlandaise RTE celle qui fut candidate en 2016. « Nous avons des personnes diverses qui tentent leur chance mais j’aimerais voir ces chiffres augmenter parce que je ne pense pas qu’elles reflètent véritablement la société irlandaise », a-t-elle ajouté.  

L’an dernier, le concours avait annoncé une série de changements pour se moderniser. Les femmes mariées sont désormais autorisées à participer, la limite d’âge a été portées de 28 à 29 ans et les femmes transgenres sont les bienvenues.  

Créé en 1959 et devenu un évènement incontournable de la télévision irlandaise depuis sa première diffusion en 1967, le concours a tenté d’évoluer au fil du temps.  

Mary McGill, autrice irlandaise, a rappelé qu’il avait été instauré à une époque où « le puritanisme catholique » constituait une « partie énorme » de l’identité irlandaise et la féminité était placée « sous une forme de surveillance extrême et d’attente extrêmeen terme de moralité ».

« Je pense qu’en raison de ces origines, ce bagage est toujours présent », a-t-elle déclaré, tout en estimant que le concours est « bizarrement capable de puiser dans l’air du temps ».  

« Il a réussi à prendre un nouveau souffle au 21e siècle en raison du lien qu’il a avec l’identité irlandaise, la nostalgie et la communauté internationale ».

« S’identifier »

Amatrice de culturisme, Joy Quigley, 26 ans, candidate de Wexford (sud-est de l’Irlande) a fait quelques poses pour le public dans une robe verte étincelante, exhibant un tatouage sur le bras.  

« Je pense que l’Irlandaise moderne n’est pas une jolie princesse glamour. Nous sommes un peu brutes sur les bords, et c’est important qu’on puisse s’identifier à ça », a-t-elle dit à l’AFP.

Diffusé deux soirs de suite à des heures de grande écoute, le concours surfe sur une image kitsch.  

Dans le public, des hommes ont écrasé quelques larmes en entendant la candidate du Queensland (nord-ouest de l’Australie) lire un poème évoquant le mal du pays.

Elle y mentionnait les sandwichs aux chips, très appréciés en Irlande.  

« Rose of Tralee » célèbre également les liens noués entre les communautés irlandaises dans le monde.  

Maysen Tinkler de Toronto, au Canada, qui a été diagnostiquée autiste il y a un peu plus d’un an, a raconté avoir reçu le soutien d’autres candidates.  

Pour le président exécutif de « Rose of Tralee », Anthony O’Gara, les critiques sont « absurdes ». Soulignant que trois des quatre dernières lauréates du concours étaient d’origine ethnique mixte, il a exprimé son exaspération : « j’en ai assez des gens qui trouvent chaque année de nouvelles critiques pour s’en prendre au concours ».