Après une année pandémique difficile, le musicien Patrick Mainville s’est lancé dans un projet plutôt rock n’roll. Il a fondé l’École du Rock de Montréal, qui propose, depuis lundi dernier, un camp musical estival à des jeunes de 7 à 17 ans.

« Le rock n’est pas mort », lance Patrick Mainville, fondateur de l’École du Rock de Montréal, située dans les studios de répétition Musicopratik, qui lui appartiennent. Dans le local voisin, l’écho des rythmes endiablés de batterie mêlés aux sons de guitare électrique et de basse semblent lui donner raison.

Trois pièces insonorisées sont investies par les enfants, répartis en groupes selon leur âge et leur niveau. Nul besoin d’avoir de l’expérience pour participer. Ce sont l’attitude et l’envie de s’amuser qui priment.

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Patrick Mainville, fondateur de l’École du Rock de Montréal

Le rock, pour moi, c’est transmettre de l’énergie. On ne s’excuse pas quand on joue, on s’exprime !

Patrick Mainville, fondateur et directeur général de l’École du Rock de Montréal

Mahéva Piché, 12 ans, fait ses premiers pas à la batterie avec son groupe, les Space Dragons. « J’ai beaucoup de fun et je me suis fait plein de nouveaux amis », dit-elle spontanément.

De son côté, Tennessee-Rose Rupnik apprend la basse. « J’adore ça, raconte la fillette de 9 ans. Je trouve qu’on est libres, on n’a pas vraiment de limites et on a juste besoin d’être nous-mêmes. »

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Cette semaine, le camp compte plus d’une trentaine de jeunes inscrits, pour une capacité totale de 200 enfants au fil de l’été.

Immersion musicale

La semaine est conçue comme une véritable expérience d’immersion dans le monde du rock. Les enfants choisissent le nom de leur groupe, qu’ils inscrivent sur des chandails, de même que la chanson qu’ils souhaitent apprendre. Chaque groupe s’attèle à deux séances de répétitions par jour, encadrées par leurs coachs respectifs.

Le mercredi, un mini-concert devant tous les participants est prévu pour que les apprentis rockeurs et rockeuses puissent montrer leur progression. Plusieurs moments sont dédiés à l’apprentissage de l’histoire du rock, des années 1950 à aujourd’hui. À la fin de la semaine, ils passent une demi-journée dans le studio d’enregistrement Sophronik, qui se trouve aussi sur les lieux. L’école est située dans l’arrondissement de Verdun.

L’apprentissage se fait selon une approche proposée par la professeure à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) Mariève Blanchet. Elle s’intéresse, entre autres, à la théorie de l’autodétermination.

C’est une méthode qui propose de soutenir trois besoins psychologiques fondamentaux : l’appartenance, le sentiment de compétence ainsi que l’autonomie. Lorsque ces besoins sont soutenus, les enfants sont davantage motivés.

Mariève Blanchet, chercheuse

Mme Blanchet a suggéré des stratégies concrètes. Par exemple, au lieu que le professeur se place en face de l’élève, il se positionne à côté de lui. « Cela évite l’effet miroir, qui rend plus difficile la reproduction du mouvement », illustre-t-elle.

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Avant de montrer le fruit de leur travail devant les autres jeunes participants, les petits musiciens scandent leur nom de groupe avec une impressionnante ferveur.

Une affaire de famille

C’est en visionnant l’un de ses films favoris, L’École du Rock, avec sa fille un soir de couvre-feu que Patrick Mainville a eu le déclic. « À la fin du film, elle voulait que je lui apprenne à jouer de la guitare sur-le-champ », raconte-t-il.

Ni une ni deux, le papa rock n’roll a sorti sa guitare pour enseigner quelques morceaux à sa progéniture. Elle a aimé l’expérience au point de vouloir former un groupe, les Rockeuses de l’enfer, avec ses meilleures amies.

« Quand j’ai vu la fierté qu’elles avaient grâce à la musique, je me suis dit qu’il fallait reproduire cette formule pour d’autres enfants », mentionne M. Mainville.

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Les trois groupes du camp, les Space Dragons, les Kipling Brothers et les Éclairs du Rock, ont bien du plaisir à jouer ensemble.

Sauver son entreprise

Ce projet s’apparente presque à une renaissance pour Patrick Mainville, après une année professionnelle difficile. « Au départ, je voulais sauver mon entreprise, témoigne-t-il. Je ne voulais pas perdre mes employés qui ont perdu la majorité de leurs contrats. » Avec le soutien de l’organisme PME Montréal, il a pu monter son école et embaucher ses musiciens.

L’industrie des arts de la scène a été durement touchée dans la dernière année. Selon un sondage de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec (GMMQ) réalisé en février 2021, la proportion de musiciens gagnant moins de 10 000 $ par an a plus que triplé en 2020, passant de 5 % à 17 %.

Près de la moitié des artistes sondés pensaient à abandonner leur carrière à cause de la pandémie en 2021. C’est le cas d’Olivier Guertin, batteur et percussionniste pigiste qui a vu tous ses projets et concerts annulés du jour au lendemain.

J’ai perdu mon appartement, mon local de pratique, je suis retourné chez mes parents et j’ai fait une dépression.

Olivier Guertin, musicien

La situation s’est quelque peu améliorée pour Olivier Guertin, qui travaille sur un autre projet et a pu retrouver un appartement. Malgré tout, il a réussi à garder le cap grâce à son groupe de jazz, le Jager, dont l’album sera lancé en octobre.

La GMMQ a récemment pris le pouls de quelques membres. « On s’est rendu compte qu’il n’y avait pas tant d’amélioration de la situation financière de nos membres, indique Luc Fortin, président de la GMMQ. Malgré l’assouplissement récent des mesures, beaucoup sont toujours en difficulté. »

Alors que l’incertitude plane encore sur la réouverture des salles à plus grande échelle, M. Fortin applaudit les initiatives comme l’École du rock de Montréal qui permettent d’employer des musiciens.

D’autres organismes proposent des camps d’été musicaux, comme le Camp Rock Montréal, le Camp Musical Adagio à Gatineau ou encore le Camp musical de Québec.

Consultez le site de l’École du rock