Il faut un peu de tout et d’un peu de tous pour faire un monde. Cet été, notre journaliste parcourt les festivals pour aller à la rencontre de ceux et celles qui composent cette mosaïque humaine.

Alors que la place des Festivals grouille d’amateurs de musique francophone, une horde de jeunes tirés à quatre épingles n’a que faire de la programmation. Les photos de groupe et les selfies s’enchaînent dans une fébrilité contagieuse tandis que les finissants du collège Regina Assumpta se pincent pour réaliser que, ce soir, c’est déjà — ou enfin — la fin d’une ère et le début d’une nouvelle.

Ce bal de fin d’études marque la dernière étape d’un parcours échelonné sur près du tiers d’une courte existence : cinq années composées de hauts, de bas, d’événements marquants qui forgent la personnalité et dont on se souvient toute sa vie.

Trois finissantes s’empressent de répondre à nos questions, fières, dans des robes fourreaux qui soulignent le fait qu’elles ne sont plus des enfants. « Je vais rester debout, merci ! », annoncent-elles en déclinant poliment notre invitation à s’asseoir. La soirée est jeune : on ne prendra pas le risque de froisser des tenues si minutieusement choisies.

Depuis un an, elles travaillent à la préparation de cet événement. En rêvent.

« Je suis triste de quitter les autres, mais j’ai vraiment hâte de faire un pas vers l’avant. Pour moi, ça devenait redondant », affirme Stefania Gauthier avec l’assurance de ses 17 ans.

« Les parents et les professeurs, poursuit-elle, nous voient encore comme lorsqu’on était jeunes, mais nous, on regarde les plus jeunes et on se trouve vraiment différents », dit-elle.

Un monde les sépare de ce qu’elles étaient en entrant au secondaire, conviennent ses copines. Cinq années passées au collège : aussi bien dire un siècle !

Un pas vers l’avenir

« Là, on a la chance de se rapprocher de nos rêves », ajoute la dynamique brunette, juchée ce soir sur des talons aiguilles. Dans cinq années encore, elle sera aux études en droit. Alicia Murray sera en voie de devenir vétérinaire et Nawal Senoussaoui, psychologue spécialisée en trauma. C’est génial d’entrer dans « l’âge adulte », concèdent ces dernières, non sans un petit pincement au cœur.

« Il était temps que ça finisse, c’est sûr... Mais moi, j’étais tout de même bien dans ce cocon, intervient Alicia avec un brin de nostalgie. Ici, c’est une petite communauté. Tout le monde se connaît et se parle. Maintenant, on s’en va dans un endroit où ce sera juste pour étudier. C’est une autre étape de la vie », déclare la jeune femme en se résignant à s’asseoir. Les talons hauts, c’est tout de même moins confortable que des baskets.

Nawal a aussi peur de ce monde rempli de possibilités et d’inconnu, mais le moment est venu d’avancer, juge-t-elle en se ramenant positivement à la suite des choses. « Ce sera un bon changement de vie et d’entourage. C’est aussi ça, grandir ! » C’est savoir affronter différents environnements, et en apprendre, chaque fois, un peu plus sur soi.

La vie, la vie

Il y a des connaissances qu’on acquiert dans les classes et d’autres, dans la cour d’école. Durant ces cinq années, le trio estime avoir surtout appris la patience, la confiance en soi et l’indépendance.

« Moi, j’ai beaucoup gagné, mais j’ai aussi connu des déceptions dont j’ai pu tirer des leçons », constate Stefania. Nawal est d’accord. Les épreuves ont fait d’elle quelqu’un de plus fort.

Quand je suis entrée au collège, j’avais 12 ans. J’avais une idée de qui j’étais et de ce que les autres percevaient de moi. Tout ça a changé. J’ai appris à ne pas me soucier de ce que les autres pensent. Au bout du compte, c’est moi qui décide de qui je suis.

Nawal Senoussaoui

Ce soir, sur une scène de la Place des Arts, les trois élèves en concentration danse et leurs pairs offriront un dernier spectacle aux élèves de leur niveau avec une chorégraphie qui illustre le fait que, « ensemble, on peut aller plus loin », explique Alicia. « On a passé cinq années à répéter, à travailler, à danser les unes avec les autres. Ça crée des liens. »

Pour ceux qui amorcent leur périple, Stefania a quelques conseils : « Appréciez chaque moment qui passe. Ça va aller vite ! N’ayez pas peur de vous mettre en danger et d’aller vers les autres. C’est comme ça qu’on en apprend plus sur soi. »

« Je dirais aussi qu’il faut grandir quand c’est le temps, renchérit Nawel. On essaie tellement de fuir cet âge que, souvent, on n’arrive pas à apprécier ce qu’on a. Avoir 13 ans, c’est aussi formidable que d’en avoir 16. »

Chaque étape vaut la peine d’être savourée, s’accordent les trois jeunes femmes en regardant leur parcours avec sagesse et candeur. Le secondaire, c’est des hauts, c’est des bas, mais c’est somme toute « les plus belles années ».