Les Y n’ont qu’à bien se tenir : les Z arrivent ! Qui est donc cette nouvelle génération qui n’a jamais connu de référendum de son vivant ? On en discute avec le professeur de science politique Eric Montigny et l’étudiant en science politique Fred-William Mireault, qui signent tous deux un chapitre dans La révolution Z – Comment les jeunes transformeront le Québec.

Les Z sont-ils si différents des Y, la génération qui les précède ?

« Beaucoup, et sur plusieurs aspects », répond Eric Montigny, qui a codirigé l’ouvrage collectif La révolution Z avec l’éditorialiste en chef de La Presse François Cardinal. Les membres de la génération Z sont nés à partir de 1995. Leurs parents sont donc, pour la plupart, des membres de la génération X, habitués à bûcher pour trouver leur place sur le marché du travail. « Leurs enfants ont hérité de cette volonté de se dépasser », note Eric Montigny.

PHOTO FOURNIE PAR ERIC MONTIGNY

Le professeur de science politique Eric Montigny

Alors que les Y (aussi appelés milléniaux) revendiquent une meilleure conciliation travail-famille, les Z sont très fonceurs sur le plan professionnel et veulent trouver un sens à leur travail, indique le professeur. « Ils sont aussi très habitués – et c’est propre à leur génération – à des parcours très personnalisés. À l’école, ils ont eu droit à ça : des programmes spécifiques à eux. »

Sont-ils des citoyens engagés ?

Les partis politiques ont de plus en plus de difficulté à recruter de jeunes membres. Est-ce à dire qu’ils sont moins impliqués ? Pas du tout. Ils le sont, mais différemment. « Ce qu’on remarque avec les Z et les milléniaux un peu aussi, c’est un regain d’intérêt pour la politique, mais pour une politique qui sort des zones partisanes », dit Fred-William Mireault, étudiant en science politique âgé de 21 ans, qui signe, dans l’ouvrage, un texte sur la diversité idéologique des Z. C’est un engagement « à la carte », résume Eric Montigny : « Les jeunes vont choisir une cause beaucoup plus qu’une organisation. Ils vont trouver une façon de la faire avancer, que ce soit dans leur travail, en s’affichant sur les médias sociaux, en marchant dans la rue… » Sur le plan idéologique, on retrouve des gens à droite comme à gauche, note M. Montigny.

Comment votent-ils ?

Le vote des Z est plus volatil que celui des générations précédentes, constate Fred-William Mireault, qui cite l’exemple de ses grands-parents ayant toujours été fidèles à « leur » parti. « Les jeunes vont voter pour le parti qui défend le mieux l’enjeu qui leur tient à cœur, comme l’environnement, par exemple », explique Fred-William Mireault, selon qui les Z ne s’identifient pas à un parti en particulier.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

L’étudiant en science politique Fred-William Mireault

Aux dernières élections provinciales, qui ont porté au pouvoir la Coalition avenir Québec, le vote des jeunes a favorisé Québec solidaire et la CAQ, au détriment des vieux partis, note Eric Montigny. Contrairement aux générations précédentes, les Z n’ont pas été socialisés politiquement par la question constitutionnelle, mais plutôt par la crise étudiante de 2012 et son clivage gauche-droite, ainsi que par la question environnementale, rappelle le professeur.

Quelles sont leurs aspirations ?

Sur le plan professionnel, les membres de la génération Z veulent que leur parcours coïncide avec leurs valeurs… et les mette en valeur. « Dans le fond, ils veulent avoir des choses façonnées pour eux, indique Eric Montigny. Ils veulent se sentir valorisés dans ce qu’ils font, et rapidement. » C’est aussi une génération moins fidèle en emploi, ajoute Fred-William Mireault. L’entrepreneuriat étant une valeur forte chez eux, plusieurs veulent être leur propre patron. Par ailleurs, ce sont des jeunes qui, oui, sont ouverts sur le monde, qui aiment l’explorer, mais qui, « fondamentalement, sont québécois », note Eric Montigny. Les Z issus de l’immigration, qui se sentent tout autant québécois, revendiquent plus fortement leur droit à l’égalité, mentionne l’entrepreneur social Fabrice Vil dans La révolution Z.

Quel est leur rapport à la technologie ?

« Les X et les Y ont grandi alors que la technologie commençait à s’implanter ; ils ont eu à apprendre une langue seconde. Alors que les Z, le langage numérique, c’est leur langue première », illustre Eric Montigny. Le symbole de l’autonomie, dit-il, ce n’est pas le permis de conduire, c’est le cellulaire ! Dans le chapitre qu’il signe, François Cardinal explore le malaise croissant que ces jeunes hyper connectés semblent ressentir face aux relations sociales directes. Cela dit, la technologie a aussi des avantages, dont son pouvoir de réunir, note Fred-William Mireault. Sans les réseaux sociaux, la grande marche pour le climat de cet automne n’aurait pas eu un tel succès, croit-il. Par ailleurs, les jeunes sont mieux équipés que leurs aînés pour détecter les fausses nouvelles sur les réseaux sociaux.

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La révolution Z – Comment les jeunes transformeront le Québec

Eric Montigny et François Cardinal

Éditions La Presse