Longueur en bouche, couleur, saveur, odeur: à Marennes, en France, les professionnels apprennent à déguster une huître et à en parler avec la même délectation qu'un vin.

«Sans atteindre la subjectivité d'une dégustation de vin, on cherche des choses simples, comme la saveur, la longueur en bouche, la texture», explique Nicolas Brossard, responsable du service qualité à la section régionale de conchyliculture.Les stagiaires apprennent à observer la couleur des branchies (blanches ou vertes) et de la chair (plus elle est blanche plus elle est dense) et à apprécier l'odeur (de marais de préférence).

Autant d'éléments permettant de renseigner sur l'origine, l'élevage et le goût (noisette par exemple) du petit mollusque bivalve qui doit se manger vivant. Et se mâcher avec application.

Constatant une «très grande méconnaissance du produit», la section conchylicole a décidé d'organiser ces sessions gratuites de formation à destination des professionnels en contact avec le public.

Après une visite des claires --d'anciens marais salants dans lesquels sont affinées les huîtres labellisées Marennes Oléron-- les enseignants s'attablent dans le laboratoire de la Cité de l'huître de Marennes. Les huîtres de l'appellation Marennes Oléron représentent un quart de la production nationale, avec 27 000 tonnes.

La formation comprend également un cours théorique remontant de l'Empire romain à la grande épidémie du début du XXe qui a décimé les huîtres européennes. Puis vient la délicate phase de l'ouverture de ce coquillage parfois récalcitrant. «Le principal frein à la consommation, c'est l'ouverture», affirme M. Brossard.

«Souvent, les gens croient savoir. Mais ils se trompent. On a par exemple reçu des écaillers, persuadés de savoir ouvrir les huîtres, mais c'était un vrai massacre», se désole-t-il, invitant ses élèves à ne pas laisser la moitié de la chair sur le chapeau. Et à saisir le couteau par la pointe, afin d'éviter de s'entailler sévèrement la paume.

Cette formation «permet de casser les pattes aux préjugés et de ne pas dire d'âneries à nos élèves», se félicite Lucile Bigand, chef de travaux au lycée hôtelier, qui, au grand soulagement de son formateur, ne qualifie désormais plus les huîtres de «grasses» mais de «charnues».

La formation est enfin l'occasion de combattre quelques idées reçues. M. Brossard proscrit par exemple la présentation sur lit de glace (qui tue le goût), l'ouverture prématurée (qui nuit à la fraîcheur) ou l'accompagnement systématique avec un produit acide (plus l'huître est charnue, plus l'acidité nuit à sa saveur).

Il convient par ailleurs de conserver ses huîtres à plat et de les présenter en étoile, «charnière vers le centre», bien calées sur du gros sel, accompagnées de toasts aux rillettes.