Une étude américaine à laquelle participe un chercheur montréalais a réussi à prédire le risque d'autisme dès 6 mois à partir d'une analyse par imagerie médicale du cerveau du bébé. Cette approche ne fonctionne pour le moment que pour les enfants à haut risque, dont l'un des frères ou soeurs a déjà un diagnostic d'autisme.

« On ne peut pas, pour le moment, utiliser cette technique pour faire un diagnostic, mais en la combinant à des évaluations béhaviorales comme le regard du bébé, on pourra abaisser l'âge moyen du diagnostic, qui est présentement de 2 à 3 ans », explique Alan Evans, biophysicien à l'Institut neurologique de Montréal, affilié à l'Université McGill, qui est l'un des coauteurs de l'étude publiée hier dans la revue Science Translational Medicine. « Si on établit le diagnostic plus tôt, on peut intervenir plus tôt, et ç'a un impact énorme sur l'évolution du trouble. Beaucoup de connexions dans le cerveau apparaissent dans les premières années. »

Quand peut-on imaginer que le diagnostic soit possible à l'âge de 1 an ? « On ne peut pas être précis comme ça, dit M. Evans. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il est peu probable qu'on puisse faire un diagnostic avant l'âge de 6 mois, parce que les évaluations comportementales ne sont pas possibles pour les bébés plus jeunes. »

Pense-t-il voir un diagnostic à 6 mois avant sa retraite ? « Oui, certainement », affirme le chercheur dans la soixantaine. « La technologie et les techniques d'analyse des données font des pas de géant. »

Pourra-t-on aussi utiliser ces tests pour la population générale, qui a un risque d'autisme beaucoup moins élevé ? « On pense que ça sera possible », dit M. Evans.

L'étude, qui suit depuis l'âge de 3 mois 500 enfants dont un frère ou une soeur a un diagnostic d'autisme, regroupe une dizaine d'hôpitaux américains. « Environ 15 % de l'échantillon aura aussi un diagnostic d'autisme, alors on parle de 75 à 100 cas, ça donne une bonne puissance statistique », précise M. Evans. Les tests d'imagerie médicale sont faits au départ, puis à 6 mois, 1 an, 2 ans et 3 ans. Deux autres études ont été publiées déjà sur les données de l'Étude sur l'imagerie du cerveau des bébés (IBIS, selon l'acronyme anglais), dont une a aussi fait un lien entre l'imagerie à 6 mois et le diagnostic d'autisme plus tard.

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Leader mondial de l'autisme


Alan Evans participe à l'étude IBIS parce que l'Institut neurologique est reconnu aux États-Unis pour sa capacité d'analyse et de stockage des données dans ce domaine. « On fait de l'analyse du cerveau depuis 30 ans », dit M. Evans, qui est à l'institut depuis 1984. Un autre projet placera le Québec au premier plan de la recherche sur l'autisme, selon lui. « Le Consortium sur la transformation des soins aux autistes va regrouper 1000 familles québécoises dont l'un des membres est atteint, précise M. Evans. Ça sera une cohorte unique au monde. » Outre l'homogénéité génétique de certaines régions du Québec, le suivi à long terme de cohortes est plus facile ici parce que les Québécois sont moins susceptibles de déménager à l'extérieur de la province que les autres Canadiens ou les Américains, selon M. Evans. « C'est comme l'Islande, qui s'est établie en leader de la recherche génétique. »