La marijuana augmente bel et bien le risque de psychose, selon une nouvelle étude britannique, la première à établir un lien de cause à effet à ce sujet. Bonne nouvelle, les amateurs de pot qui écrasent pour de bon après un premier séjour à l'aile psychotique peuvent ainsi réduire substantiellement leur risque de rechute.

« On savait que la consommation de marijuana était liée à la psychose, mais on n'était pas sûr s'il n'y avait pas une cause unique à ces deux phénomènes », explique Sagnik Bhattacharyya, psychiatre au King's College de Londres, qui est l'auteur principal de l'étude publiée la semaine dernière dans la revue JAMA Psychiatry.

« Certains critiques des études précédentes sur le sujet avançaient l'hypothèse que des gènes augmentent à la fois la propension à se laisser tenter par le cannabis et le risque de psychose, ou alors que le pot est un type d'automédication pour les débuts d'une psychose. Comme on ne peut pas demander à un groupe de fumer du pot et à un autre de s'abstenir, il faut faire une expérience "en nature", avec les aléas de la vie des patients que l'on suit. Nous pensons avoir établi hors de tout doute que le cannabis était un facteur de risque de psychose. »

Les chercheurs britanniques ont suivi pendant deux ans 260 patients hospitalisés pour une première psychose. De ce nombre, 40 % n'avaient jamais fumé de cannabis et 25 % étaient des fumeurs réguliers. Ils ont publié en août, dans une autre revue, Lancet Psychiatry, le risque de rechute en fonction de la fréquence et de la puissance du cannabis fumé. L'étude de JAMA Psychiatry portait sur une période de suivi de six mois de 220 patients, où le risque de rechute a été analysé plus en détail pour établir un lien de cause à effet.

Risque de rechute chez les adeptes



« Chez un patient qui arrête de fumer après une psychose, puis recommence, puis arrête encore, à plusieurs reprises, le risque de rechute augmente de 13 % dans les périodes suivant l'utilisation de cannabis », dit le Dr Bhattacharyya. L'étude d'août a montré que chez les adeptes de cannabis qui continuent fréquemment avec du pot très fort, le risque de rechute est 2,7 fois plus élevé que pour les fumeurs de pot qui écrasent. Cela se compare à un risque de rechute 3,3 fois plus élevé quand les patients cessent de prendre leurs médicaments antipsychotiques.

Quelle est la prochaine étape ? « Les utilisateurs de pot qui font des psychoses n'arrêtent pas si souvent que ça, dit le Dr Bhattacharyya. Il faut donc viser une réduction de la fréquence ou de la puissance. Nous voulons aussi voir si une partie du problème tient à une interaction entre le cannabis et les antipsychotiques. Si c'est le cas, on pourrait essayer de contrer cette interaction avec un deuxième médicament. »

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Quelques chiffres

30 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui n'ont jamais fumé de cannabis

24 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui fumaient auparavant du cannabis mais qui n'en ont plus fumé par la suite

40 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui fumaient auparavant du cannabis et qui ont continué à fumer du cannabis de manière intermittente (moins d'une fois par mois) par la suite

44 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui fumaient auparavant du cannabis et qui ont continué à fumer du cannabis sous forme de haschisch à faible taux de THC

54 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui fumaient auparavant du cannabis et qui ont continué à fumer du cannabis à fort taux de THC au moins une fois par mois

58 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui fumaient auparavant du cannabis et qui ont continué à fumer du cannabis à fort taux de THC au moins une fois par jour

69 % : Risque de rechute, au cours des deux années suivant un premier épisode, chez les psychotiques qui cessent de prendre leurs médicaments antipsychotiques

Source : Lancet Psychiatry