Des chercheurs montréalais ont réussi à créer une nanoparticule capable de transporter un médicament dans le cerveau. Les chercheurs de Polytechnique sont des sommités mondiales dans le domaine de la livraison de médicaments à l'aide de nanoparticules.

« La plupart des médicaments ne peuvent pas franchir la barrière entre le sang et le cerveau », explique l'auteur principal de l'article paru dans le Journal of Controlled Release, Sylvain Martel, ingénieur informatique à l'École polytechnique. « Pour les cancers, la chirurgie est généralement la principale option. Avec notre nanoparticule, la voie pharmacologique serait possible. »

La technique a été testée chez la souris. Elle s'ajoute à une autre technique de nanotechnologie pharmaceutique mise au point depuis dix ans par les chercheurs de Polytechnique, qui permet de guider à l'aide de champs magnétiques des médicaments jusqu'aux tumeurs de manière à limiter les effets secondaires.

« Plus de 80 % des cancers sont localisés, mais la chimiothérapie s'attaque à tous les tissus, même les tissus sains, dit M. Martel. Diverses équipes dans le monde travaillent avec nos brevets pour mettre au point des chimiothérapies plus ciblées. » Selon l'ingénieur informatique de Polytechnique, la technique de nanoguidage permettrait de réduire de deux ordres de grandeur (100 fois) la quantité de médicaments oncologiques nécessaires.

Effet électromagnétique

La technique permettant de franchir la barrière entre le sang et le cerveau repose sur un effet électromagnétique des particules d'une taille d'environ 20 nanomètres (0,02 millième de millimètre, soit moins du quart du diamètre d'un cheveu). Quand, sous l'effet d'un champ magnétique, la nanomolécule change de polarité, l'énergie libérée a un effet mécanique sur la barrière entre le sang et le cerveau, permettant de l'ouvrir pendant un certain temps (deux heures dans l'expérience décrite dans le Journal of Controlled Release). Le médicament que transporte la nanomolécule peut alors aller dans le cerveau.

« On ouvre la barrière quand le médicament est rendu à l'endroit où on veut, près de la tumeur », dit M. Martel. Il faut qu'une molécule soit très petite - de l'ordre de deux ou trois nanomètres - pour qu'elle franchisse la barrière entre le sang et le cerveau. Le cerveau laisse passer certaines molécules plus grosses (par exemple les molécules expliquant l'effet des antidépresseurs), mais il est très sélectif.

Pour le moment, aucune des équipes travaillant avec la nanotechnologie de guidage de Polytechnique n'a entamé d'essais cliniques. « La technologie devrait être prête d'ici quelques années, mais pour la réglementation, ça sera plus long, dit M. Martel. C'est une approche complètement nouvelle. »