Les moules sécrètent une substance adhésive très résistante pour rester accrochées sur des rochers balayés par les vagues et une version synthétique de cette colle a d'importantes applications médicales et en chirurgie, ont expliqué ce week-end des scientifiques.

Ces moules ordinaires (Mytilus edulis) peuvent grâce à cet adhésif durable résister à de très fortes pressions de l'eau.

«Une paire de ces mollusques est capable de soutenir le poids d'un homme», a précisé devant la presse samedi Herbert Waite, professeur de biologie moléculaire à l'Université de Californie en marge de la conférence annuelle de l'American Association for the Advancement of Science (AAAS).

Le pied de la moule, appelé le byssus, produit une substance adhésive capable de coller avec une ténacité inégalée sur quasiment toutes surfaces, inorganiques comme organiques, sèches ou mouillées.

«C'est un processus remarquable consistant dans la sécrétion de protéines uniques avec une forte concentration d'un acide aminé appelé DOPA qui forment une colle liquide qui durcit rapidement et est résistante à l'eau», a expliqué Phillip Messersmith, professeur d'ingénierie biomédicale à l'université Northwestern près de Chicago.

Il a percé le secret de cet adhésif et développé avec son équipe de recherche une version synthétique également résistante à l'eau.

«Plusieurs aspects de ce processus ont inspiré le développement de versions synthétiques de cette colle avec des applications médicales pratiques», a poursuivi le scientifique citant «la réparation ou la reconstruction de tissus dans le corps humain qui sont difficiles vu qu'il s'agit d'un environnement baigné de liquides».

Ces chercheurs travaillent sur plusieurs applications, dont la réparation de trou dans la membrane foetale responsable de fausses-couches, de naissances prématurées ou de complications, actuellement très difficile à traiter.

Phillip Messersmith et son équipe collaborent avec des chercheurs en Europe pour mener des essais cliniques.

Les autres applications sont des hydrogels antibactériens et des polymères résistants à l'eau pour acheminer des anticancéreux dans les tumeurs, capables de rester inactifs dans le sang jusqu'à ce qu'ils atteignent leur cible.

Le professeur Waite a également indiqué que d'autres groupes de recherche travaillaient au développement de versions synthétique de cette colle de moule pour réparer des os ou des dents fracturés.

«Ces colles sont bien tolérées par l'organisme et sont résistantes à l'eau ce qui est idéal pour effectuer des réparations à l'intérieur du corps», a-t-il souligné.

Outre les applications médicales, ce mécanisme adhésif de la moule semble être un bon indicateur des changements dans l'environnement surtout au réchauffement, selon une autre étude présentée à la conférence de l'AAAS.

Des expériences en laboratoire menées par Emily Carrington, professeur de biologie à l'Université de Washington à Seattle ont montré que le pied de ces moules était nettement moins adhésif quand la température montait.

Ainsi la résistance de ces fibres, au maximum dans des eaux de 10 à 18 degrés, diminue de 60 % quand la température atteint 25 degrés.

Des scientifiques avaient déjà observé que le pied des moules faiblissait à la fin de l'été et au début de l'automne au moment de la saison des ouragans, avant de regagner leur force.

«Nous essayons d'élucider les causes de cet affaiblissement saisonnier et de déterminer s'il est lié à un temps plus chaud, à leur cycle de reproduction ou à d'autres facteurs», a dit devant la presse cette biologiste.

«Nous voulons savoir si un accroissement des fluctuations environnementales présente un risque pour l'espèce», qui est importante pour l'écosystème, a-t-elle lancé.