Le tueur en série qui terrorisait l'est de Londres il y a plus d'un siècle aurait été un barbier polonais âgé de 23 ans, selon une nouvelle étude de l'ADN publiée dans la revue Journal of Forensic Sciences. Mais, déjà, des critiques réfutent les conclusions des chercheurs.

Aaron Kosminski

Des scientifiques disent avoir finalement réussi à démasquer Jack l'Éventreur : il s'agirait d'Aaron Kosminski, un immigrant polonais âgé de 23 ans qui était l'un des principaux suspects des policiers au moment où les meurtres ont été commis, à l'été et à l'automne 1888. Aaron Kosminski travaillait comme barbier dans Whitechapel, alors un quartier pauvre de l'est de Londres, là où se sont produits les meurtres. Quelques années plus tard, Kosminski a été enfermé dans une série d'hôpitaux psychiatriques en raison d'un comportement agressif et « d'hallucinations, de paranoïa et d'un refus de se laver ». Il y resta jusqu'à sa mort, en 1919.

Châle en soie

C'est en analysant un châle en soie qui aurait été retrouvé près du corps de Catherine Eddowes, la quatrième victime du tueur, en août 1888, une femme pauvre qui se prostituait, que les experts affirment avoir réussi à percer le mystère. En effet, on retrouvait sur le châle des taches de sang et du sperme. Ces substances ont été analysées grâce à un procédé visant à identifier le génome mitochondrial, une sous-portion de l'ADN. Les chercheurs, Jari Louhelainen, biochimiste à l'Université John Moores, et David Miller, expert en reproduction à l'Université de Leeds, ont ensuite comparé leurs analyses avec celles d'échantillons d'ADN de descendants d'Eddowes et de Kosminski. Résultat : le sang était bel et bien celui de Catherine Eddowes, et l'ADN du sperme s'apparente à celui de descendants de Kosminski. « À notre connaissance, il s'agit de l'étude la plus avancée à ce jour concernant ce cas », notent les chercheurs.

« Une blague »

La publication de l'étude a provoqué des réactions immédiates dans la communauté scientifique, et pas des plus flatteuses. Le généticien et auteur britannique Adam Rutherford a affirmé cette semaine que les conclusions étaient « une blague ». Le principal problème, a-t-il écrit, est la provenance du fameux châle en soie. « Personne ne peut dire avec un minimum de certitude que ce châle se trouvait sur les lieux du meurtre, ou qu'il a appartenu à Catherine Eddowes. » M. Rutherford affirme que même si le châle était authentique, il a pu être contaminé par un grand nombre de personnes. « Si Eddowes était une prostituée, Kosminski aurait tout simplement pu être un client », conclut-il. Hansi Weissensteiner, expert dans le domaine du génome mitochondrial, note dans la revue Science qu'il ne croit pas non plus que les conclusions de l'étude soient valides.

Meurtres sordides

L'identité de Jack l'Éventreur a toujours fait l'objet d'hypothèses : son nom est passé à l'histoire en raison de la difficulté que les policiers ont eue à l'identifier et à l'attraper, de même que pour le caractère sordide et gratuit de ses meurtres. On lui attribue cinq meurtres survenus la nuit, entre août et novembre 1888. Les victimes étaient majoritairement des femmes pauvres qui étaient retrouvées gisant dans la rue, la gorge tranchée et les organes reproducteurs affreusement mutilés. Cette série de meurtres inexpliqués donna lieu à un battage médiatique sans précédent. Les policiers ont été accusés d'incompétence : frustrés par l'incapacité de la police à arrêter le coupable, des citoyens des Londres ont même formé le Comité des vigiles de Whitechapel et patrouillaient le soir à la recherche d'individus jugés louches.

Un travail qu'il « adore ».

À l'époque, les journaux affirmaient que le tueur était un boucher ou un chirurgien : les enquêteurs sont même allés jusqu'à interroger des dizaines de personnes occupant ces fonctions pour savoir où elles se trouvaient au moment des meurtres. Le nom de Jack l'Éventreur (Jack the Ripper, en anglais) provient d'une lettre anonyme envoyée aux médias le 27 septembre 1888. La lettre commence par « Cher ami », et son auteur affirme avoir « hâte » de tuer sa prochaine victime, un « travail » qu'il « adore ». Publiée dans les journaux, la lettre a eu un effet retentissant, et a eu pour conséquence de populariser le nom Jack l'Éventreur, depuis associé aux meurtres, même si on n'a jamais su si c'était le tueur qui avait envoyé la lettre ou s'il s'agissait d'un canular.