Le rhinocéros de Sumatra, dont la survie ne tient qu'à un fil, est en voie d'extinction depuis un million d'années, révèle le premier séquençage du génome de cet animal qui pourrait aider à le préserver, selon des travaux publiés jeudi.

En 2011, on ne comptait qu'environ 200 de ces rhinocéros à l'état sauvage dans les îles indonésiennes de Sumatra et de Bornéo, précisent ces chercheurs qui ont séquencé et analysé le premier génome à partir d'un échantillon provenant d'un mâle nommé Ipuh, qui a vécu au zoo de Cincinnati pendant 22 ans jusqu'à sa mort en 2013.

Cette analyse génétique a révélé que les problèmes de survie de cette espèce remontent à près d'un million d'années au milieu du Pléistocène quand des bouleversements climatiques ont affecté son habitat et sa diversité génétique.

«Les données produites par le séquençage du génome ont révélé que le Pléistocène a été une période très difficile pour les populations de rhinocéros de Sumatra», explique Herman Mays de l'université Marshall en Virginie occidentale, l'un des principaux auteurs de cette étude parue dans Current Biology.

La population de cette espèce de rhinocéros a plafonné à environ 57 800 individus il y a environ 950 000 ans et ce au moment où les fossiles témoignent d'une invasion de différents mammifères dans le Sundaland, une région du sud-est de l'Asie, précisent ces chercheurs.

Il y a environ 12 000 ans à la fin du Pléistocène, la montée du niveau de l'océan résultant de la fonte des glaces a submergé les ponts de terre qui reliaient les îles de Bornéo, de Java et de Sumatra à la péninsule malaise et au continent asiatique.

Cela a entraîné une fragmentation grandissante de l'habitat de ces rhinocéros ce qui explique que leur population a continué à se réduire de plus en plus, conclut l'étude.

«Leur population a plafonné il y a près d'un million d'années et n'a jamais montré de signes de rétablissement», pointe Herman Mays.

Perte de diversité génétique

Leur nombre n'a cessé de diminuer plus tard sous des pressions grandissantes résultant de la perte d'habitat et de la chasse par les humains pour le commerce illégal de leurs cornes.

Il y a 9000 ans on ne comptait plus qu'environ 700 rhinocéros de Sumatra.

Cette analyse du génome, suggère que le changement climatique dans un passé ancien a réduit la diversité génétique de ces animaux, les rendant encore plus vulnérables aux pressions résultant des activités humaines plus récemment, résument les scientifiques.

Ce nouvel éclairage génétique est utile pour mieux comprendre la situation actuelle de l'espèce dans un contexte écologique plus large, estiment également ces chercheurs.

«La survie de cette espèce ne tient qu'à un fil et nous devons faire davantage pour la sauver»,plaide Terri Roth, du Center for Conservation and Research of Endangered Wildlife au zoo de Cincinnati, co-auteure de l'étude internationale.

Elle précise que les progénitures du rhinocéros «Ipuh» vivent dans un sanctuaire à Sumatra et l'un d'entre eux a déjà engendré deux petits.

Le rhinocéros de Sumatra (Dicerorhinus sumatrensis) est la plus petite des cinq espèces de rhinocéros qui subsiste actuellement à Bornéo et à Sumatra avec un poids de moins d'une tonne.

Il est aussi le seul rhinocéros d'Asie à avoir de deux cornes. Généralement, la corne antérieure ne dépasse pas 25 cm, la seconde est nettement plus petite et souvent absente chez la femelle.

Sa fine toison en fait le plus proche cousin vivant du rhinocéros laineux aujourd'hui disparu.