Les singes hurleurs qui poussent les cris les plus puissants sont les moins virils, ont déterminé des chercheurs dans une étude publiée jeudi dans la revue Current Biology.

Les capacités vocales impressionnantes de ces primates - on peut les entendre jusqu'à un kilomètre - s'expliquent par de longues cordes vocales et un os hyoïde uniquement adapté pour permettre une forte résonance des sons.

Toutefois, les singes hurleurs qui ont des «cris» les plus exceptionnels, très graves, ont aussi des testicules de plus petite taille que ceux dont «la voix» est moins puissante, ont constaté ces scientifiques.

«Nous avons de solides indications que les espèces de singes hurleurs qui développent de plus grands organes vocaux produisent moins de sperme», indique Jacob Dunn de l'Université de Cambridge, un des principaux auteurs de ces travaux.

«Il s'agit du premier indice montrant que chez toutes les espèces il existe un compromis entre les capacités vocales et la production de sperme», souligne-t-il.

Cette découverte chez les singes hurleurs conforte encore l'idée initialement avancée par Charles Darwin sur les effets de la sélection sexuelle.

Selon la théorie de l'évolution, les mâles de différentes espèces sont souvent confrontés à des compromis entre des attributs physiques utiles pour la séduction et ceux qui optimisent les chances de fertilisation.

Des mâles de nombreuses espèces sont parés de couleurs vives ou possèdent des «armes» comme des bois ou des cornes.

L'apparence a un prix

Dans de nombreux cas, ces attributs sexuels ont un coût, expliquent les chercheurs qui l'ont vérifié chez les singes hurleurs mâles.

Ils ont examiné les dimensions des cavités vocales et les cris de plusieurs de ces primates récoltant suffisamment de données pour représenter neuf espèces.

Les chercheurs ont constaté que chez les espèces caractérisées par un seul groupe de mâles, ces derniers avaient des os hyoïdes plus développés et de plus petits testicules, laissant penser qu'il y a une forte concurrence entre eux pour séduire les femelles.

Des singes avec des os hyoïdes plus développés produisent des sons plus graves, donnant l'impression qu'ils sont plus grands.

À travers les espèces, le volume des testicules augmente avec le nombre de mâles par groupe, indiquant l'importance de la compétition pour le sperme.

Les mâles qui ont les plus gros testicules sont ceux dont la taille de l'os hyoïde est inférieure à la moyenne, ont observé ces scientifiques.

«Le développement d'organes vocaux plus grands et la puissance des cris pourraient nécessiter tellement d'énergie qu'il n'en resterait pas assez pour développer de plus gros testicules», suppute Jacob Dunn, tout en ajoutant que «le fait d'avoir un cri plus grave pourrait être suffisamment efficace pour dissuader tous les autres mâles».