Les Inuits ont des mutations génétiques uniques agissant sur le métabolisme qui leur permettent de neutraliser les effets néfastes d'un régime alimentaire riche en graisses de mammifères marins, leur principale source d'alimentation, ont découvert des chercheurs.

Près de 100 % des Inuits ont ces variations génétiques comparativement à 2 % pour les Européens et 15 % chez les Chinois de l'ethnie Han, ont-ils déterminé dans cette recherche publiée jeudi dans la revue américaine Science.

Outre la viande de baleine et de phoque, ces populations consomment également de grandes quantités de poissons dont l'huile est riche en acides gras oméga-3.

Malgré cette alimentation traditionnelle très pauvre en fruits et légumes et riche en graisses animales, les Inuits sont généralement en bonne santé avec une faible incidence de maladies cardiovasculaires, avaient déjà constaté des chercheurs danois dans les années 70.

Ils avaient alors conclu que les oméga-3 devaient avoir des effets protecteurs pour expliquer ce paradoxe.

Les bienfaits des omégas-3 ne sont pas confirmés

Ces conclusions sont à l'origine des recommandations en Europe et dans le reste du monde de consommer davantage de poissons gras ou de prendre des compléments d'omégas-3 pour aider à préserver la santé du coeur et des artères, explique Rasmus Nielsen, un professeur de biologie de l'Université de Californie à Berkeley, un des auteurs de cette nouvelle étude.

Aujourd'hui, au moins 10 % des Américains prennent régulièrement ces compléments alimentaires. Mais les résultats de récents essais cliniques n'ont pas confirmé les bienfaits cardiovasculaires des omégas-3, ou pour protéger contre la maladie d'Alzheimer.

« Nous avons découvert que les Inuits ont une adaptation génétique unique à ce régime alimentaire qu'on ne peut pas extrapoler à d'autres groupes ethniques », poursuit le scientifique. Ainsi, « c'est très bon pour les Inuits de consommer beaucoup de ces acides gras omégas-3 mais pas pour le reste d'entre nous », conclut-il.

Ces mutations génétiques ont des effets encore plus étendus comme la réduction du mauvais cholestérol (LDL) et de sucre dans le sang ce qui a des effets protecteurs contre les maladies cardiovasculaires et le diabète adulte (type 2).

Ces caractéristiques génétiques agissent également sur la taille car la croissance est en partie régulée par le métabolisme des graisses. Chez les Inuits, ces mutations réduisent leur taille de deux centimètres, ont déterminé les chercheurs.

Ils ont découvert ces mutations génétique en analysant les génomes de 191 Groenlandais avec moins de 5 % de gènes européens qu'ils ont comparé à ceux de 60 Européens et de 44 Chinois de l'ethnie Han.

Selon ces scientifiques ces mutations génétiques remontent à au moins 20 000 ans et pourraient avoir aidé de nombreuses peuplades humaines comme les chasseurs-cueilleurs à s'adapter à des régimes alimentaires riches en graisse animale et à certains types d'acide gras oméga-3 et oméga-6.

Elles pourraient être apparues initialement chez des Sibériens qui vivaient dans l'Arctique il y a plus de 20 000 ans. Et ces derniers sont arrivés au Groenland quand les Inuits s'y sont installés il y a environ mille ans.

Cette sélection génétique est ancienne et pourrait avoir aidé les humains à s'adapter à l'environnement lors du dernier âge glaciaire mais a été nettement plus marquée chez les Inuits, pensent ces chercheurs.