Deux faux gros orteils, dont l'un retrouvé sur une momie égyptienne, pourraient être les premières vraies prothèses ayant existé, selon des scientifiques qui ont demandé à des volontaires de vérifier le bon fonctionnement de répliques de ces objets rares.

Ces deux prothèses égyptiennes d'orteils datant de plus de 600 ans avant JC portent des traces d'usage, signes qu'elles avaient été portées et ne servaient pas seulement à restaurer l'intégrité corporelle des momies, selon une étude publiée lundi par la revue médicale britannique The Lancet.

Jacqueline Finch (du Centre biomédical d'égyptologie de l'Université de Manchester en Grande-Bretagne) montre qu'une prothèse en bois et cuir conservée au Musée égyptien du Caire et un autre orteil artificiel exposé au British Museum de Londres ont réellement aidé leurs propriétaires à marcher.

«Le gros orteil doit porter environ 40% du poids du corps», souligne-t-elle précisant qu'il joue aussi un rôle important dans la propulsion vers l'avant.

Le Dr Finch a recruté deux volontaires amputés de leur gros orteil droit afin de tester à l'usage des répliques exactes de ces deux prothèses: l'une possédant deux parties articulées en bois et une troisième vraisemblablement en cuir, et l'autre réalisée en cartonnage, une sorte de papier mâché collé et recouvert de plâtre peint. Cette seconde prothèse est appelée «Gros orteil de Greville Chester» en l'honneur du collectionneur qui a permis au British Museum de l'acquérir en 1881.

«Les répliques des deux anciens faux orteils égyptiens se sont très bien comportées», explique Mme Finch qui a précisé que les deux volontaires portaient des sandales égyptiennes pour ces tests.

Un des volontaires a été capable de marcher particulièrement bien avec la prothèse en cartonnage comme avec celle en bois, et les deux volontaires ont jugé «particulièrement confortable» le design de la prothèse articulée en bois, selon l'étude.

Leur démarche a pu être analysée grâce à des caméras et des capteurs de pression disposés sur leur parcours.

«Mes résultats suggèrent que ces deux formes étaient capables de fonctionner en remplacement de l'orteil perdu et qu'elles peuvent alors être considérées comme des prothèses», conclut le Dr Finch.

Les premiers pas de cette branche de la médecine seraient donc à mettre au crédit des anciens Égyptiens. La science des prothèses aurait, selon Mme Finch, commencé à émerger dans la vallée du Nil, plusieurs siècles avant la création d'une jambe artificielle datant d'environ 300 ans avant JC, trouvée dans une riche sépulture romaine à Santa Maria di Capua et considérée jusque-là comme la plus ancienne prothèse fonctionnelle connue.