La mission russo-européenne ExoMars 2016 s'est séparée avec succès lundi soir du lanceur Proton et se dirige désormais vers la planète rouge, où elle doit trouver des preuves potentielles d'activités biologiques à sa surface.

Cette mission, montée malgré les tensions persistantes entre l'Union européenne et la Russie et les sanctions réciproques qu'elles s'imposent, permet aux Européens de repartir à l'assaut de Mars après un premier succès en 2003 et aux Russes de concrétiser leur rêve de l'explorer un jour.

Après avoir procédé quatre fois à la mise à feu de l'étage propulseur Briz-M afin d'atteindre la vitesse nécessaire pour s'élancer vers la planète rouge, la mission ExoMars s'en est séparée comme prévu, a annoncé l'Agence spatiale européenne (ESA).

«Le directeur du vol de (la sonde) TGO (Trace Gaz Orbiter) confirme sa séparation réussie avec l'étage propulseur Briz-M» du lanceur russe Proton, a écrit l'ESA sur le réseau social Twitter.

«À l'heure qu'il est, TGO doit déjà s'être orientée vers le Soleil et est en train de tourner pour maintenir une allure stable», a ensuite ajouté l'ESA.

À 16h28, la sonde, accompagnée de l'atterrisseur test nommé Schiaparelli, doit envoyer pour la première fois un signal à l'ESA.

La mission ExoMars a décollé avec la fusée Proton à 4h31 du cosmodrome de Baïkonour, dans les steppes du Kazakhstan.

Un voyage de sept mois pour parcourir un trajet de 496 millions de kilomètres attend désormais la mission. A son terme, l'atterrisseur se séparera de la sonde le 16 octobre pour se poser sur la planète rouge trois jours plus tard.

Après avoir largué l'atterrisseur, la sonde TGO entrera dans une orbite elliptique et ralentira très progressivement pour se placer sur une orbite circulaire à 400 km d'altitude.

Ce «grand nez dans l'espace» devra alors rechercher des gaz à l'état de traces dans l'atmosphère de la planète, notamment ceux à base de carbone comme le méthane, qui intéresse les scientifiques car sur Terre, il est à 90% d'origine biologique. En outre, sa durée de vie est limitée.

Sa détection par TGO pourrait donc constituer un éventuel indice de la présence actuelle d'une vie micro-organique sur Mars.

La sonde analysera «s'il est d'origine biologique ou bien s'il est le résultat d'un processus géologique», avait expliqué Jorge Vago, responsable scientifique de la mission ExoMars pour l'ESA.

Le module Schiaparelli, du nom d'un astronome italien du XIXe siècle, aura, quant à lui, pour fonction d'apprendre aux scientifiques comment se poser sur Mars. Pesant près de 600 kilos, il a la taille d'une petite voiture. Dépourvu de panneaux solaires, il ne «vivra» que deux à quatre jours.

«Grande responsabilité» 

Dans un premier temps envisagée aux côtés des Américains, la mission ExoMars 2016 a finalement été mise au point en collaboration avec la Russie après la défection de la NASA pour raisons budgétaires en 2011.

Elle doit être suivie d'une autre mission russo-européenne, ExoMars 2018, qui enverra un véhicule rechercher des traces de vie passée sur Mars en explorant notamment une zone où se trouvent des argiles très anciennes. Prévue pour 2018, elle pourrait toutefois être retardée.

C'est la deuxième fois que l'Europe part à l'assaut de la planète rouge. En 2003, elle avait lancé Mars Express, qui a rempli sa mission scientifique.

Mais le petit atterrisseur britannique Beagle 2 largué par Mars Express n'a jamais donné signe de vie. Il a été repéré, onze ans après à la surface de la planète.

Héritière de l'Union soviétique qui avait envoyé le premier homme dans l'espace et le premier robot sur la Lune, la Russie cherche pour sa part à renouer avec de tels exploits malgré la crise économique et des revers cuisants ces dernières années.

Les ambitions russes avaient tourné court dans un premier temps lorsqu'en 2011 la sonde Phobos-Grunt, première tentative russe d'exploration interplanétaire depuis l'échec en novembre 1996 de la sonde Mars 96, avait fini sa course dans l'océan Pacifique.

ExoMars a permis aux scientifiques russes de reprendre espoir. «C'est une grande responsabilité, et pour l'Europe aussi», s'était félicité en février le directeur de l'Institut de recherches spatiales à Moscou, Lev Zeleni.

L'«Objectif Mars» avait également été le sujet d'expériences menées par l'astronaute américain Scott Kelly et le cosmonaute russe Mikhaïl Kornienko, de retour sur Terre le 2 mars après quasiment un an en orbite.