Des astrophysiciens américains ont décidé de boycotter une importante conférence d'astronomie de l'agence spatiale américaine (NASA) pour protester contre son refus d'y accueillir des chercheurs chinois au nom de la sécurité nationale.

Cette décision surprenante, tout d'abord rapportée dans le quotidien britannique The Guardian, a été confirmée mardi à l'AFP par plusieurs sources dont Geoff Marcy, professeur d'astronomie à l'Université de Californie à Berkeley, l'un des initiateurs de ce boycott.

«Je ne peux pas en bonne conscience participer à une conférence qui discrimine comme cela», écrit-il dans un courrier électronique adressé aux organisateurs de ce colloque, consacré aux découvertes d'exoplanètes avec le télescope américain Kepler, qui doit se tenir du 4 au 8 novembre au centre de recherche Ames de la NASA à Mountain View en Californie.

«Cette conférence porte sur des planètes se trouvant à des milliers de milliards de kilomètres, sans aucun aspect lié à la sécurité nationale», ajoute-t-il.

Le centre Ames de la NASA a rejeté les demandes de participation de scientifiques chinois sur la base d'une loi adoptée en mars par le Congrès, qui interdit à tout citoyen de Chine d'entrer dans un immeuble de l'agence spatiale, selon un email adressé aux scientifiques par l'agence spatiale, cité par le Guardian.

Réagissant à cet article, l'auteur de cette loi, le républicain Frank Wolf, a expliqué mardi, dans une lettre ouverte au patron de la NASA Charles Bolden, que l'agence spatiale avait «mal interprété» ce texte, qui «n'impose aucune restriction sur des activités de citoyens chinois, à moins qu'ils ne soient des représentants officiels du gouvernement».

«Le courrier électronique de la NASA déforme la loi et est inexact», ajoute l'élu républicain, dont la loi vise à combattre l'espionnage chinois.

«Failles dans la sécurité»

Il estime que «la direction de la NASA doit renvoyer de nouvelles instructions aux participants de la conférence, ainsi qu'à la presse, pour corriger cette idée fausse.»

Selon le représentant Wolf, l'auteur du courrier électronique s'est peut-être appuyé sur des restrictions temporaires imposées par l'Agence et qui frappaient plusieurs pays, dont la Chine, à la suite de la découverte «de sérieuses failles dans la sécurité» de deux centres de la NASA.

Ainsi ces restrictions, écrit-il dans sa lettre, «ne peuvent être que le fait de la NASA elle-même, pas de la loi en question», ajoutant qu'il pensait d'ailleurs qu'elles avaient été levées.

Charles Bolden avait indiqué, lors d'une audition au Congrès en mars, que l'agence avait dû renforcer ses mesures de sécurité à la suite d'un problème potentiel avec un citoyen chinois qui travaillait pour une société sous-traitante, dans une installation de la NASA.

L'AFP n'a pas été en mesure d'obtenir une réaction de la NASA, fermée en raison de la suspension de l'activité d'une partie des administrations centrales, pour cause de blocage budgétaire au Congrès.

Le co-président de la conférence sur les exoplanètes, Alan Boss, un astronome de la Carnegie Institution for Science à Washington, a transmis mardi une lettre aux participants à la conférence expliquant que le comité d'organisation avait pris connaissance de ces règles fin septembre, ce qui l'a conduit à refuser l'enregistrement de six scientifiques chinois.

«Nous trouvons que les conséquences de cette loi sont déplorables (...) et nous sommes vigoureusement opposés à l'exclusion de nos collègues chinois ou ressortissant de tout autre pays», écrivent les organisateurs, sans mentionner la lettre du représentant Wolf.

«Nous examinons d'autres options qui permettront à tous les scientifiques intéressés de participer à la conférence en personne ou à distance», promettent-ils.