L'euphorie a été de courte durée. Depuis l'atterrissage acrobatique de la sonde robotisée Curiosity sur Mars, lundi, la NASA teste lentement chaque instrument, un processus qui s'étendra sur plusieurs semaines.

Aujourd'hui, par exemple, Curiosity subira ce qui s'apparente à une greffe de cerveau: ses logiciels seront optimisés pour lui permettre de mieux se déplacer sur la planète rouge. Jusqu'à maintenant, ils étaient réglés pour l'atterrissage. L'opération durera quatre jours, ce qui signifie que les premiers tests des environs de la sonde ne surviendront pas avant le milieu de la semaine prochaine.

«Pour le moment, toutes les équipes testent et calibrent les équipements», explique Richard Léveillé, scientifique spécialisé dans les planètes pour l'Agence spatiale canadienne. Il se trouve actuellement au Jet Propulsion Laboratory, en Californie, et travaille sur la Chemcam, l'instrument qui pourra pulvériser des rochers pour qu'on puisse les analyser.

Horaire martien

Les équipes vivent à l'heure martienne: par exemple, jeudi, la réunion de début de journée a eu lieu vers 18h, heure de Montréal. Le jour sur Mars dure 40 minutes de plus que sur Terre, ce qui ajoute une distorsion supplémentaire. Et Curiosity est atterri à la fin de l'hiver martien, ce qui signifie que les jours allongent au lieu de raccourcir.

La première cible de Curiosity sera une montagne de cinq kilomètres, Aeolis, qui est au centre du cratère Gale où elle a atterri. Les satellites en orbite - il y en a actuellement trois en activité - ont détecté des signes de discontinuité géologique sur les flancs d'Aeolis, ce qui permettra de mieux comprendre l'évolution du climat sur Mars. Les chercheurs pensent que la planète a subi une «grande dessiccation» il y a trois milliards d'années, passant d'un environnement humide à une grande sécheresse.

En route vers Aeolis, un trajet de 6,5 km qui pourrait prendre jusqu'à un an selon les arrêts d'échantillonnage, Curiosity s'arrêtera à différents écueils visibles de l'espace et examinera un cône alluvial, une région où jadis un cours d'eau déposait des sédiments. Si les sédiments du cône alluvial sont plus récents, par exemple, cela pourrait signifier qu'il y a déjà eu sur Mars de l'eau liquide, condition probablement essentielle à la vie, dans un passé plus récent.

Curiosity humera également l'atmosphère martienne à la recherche de méthane, détecté par les sondes en orbite. L'origine de ce méthane est mystérieuse, parce que Mars ne devrait pas avoir d'activité géologique, seul élément, en plus de la vie, pouvant expliquer sa présence.

***

Viking, prise 2

La mission de Curiosity pourrait mener à une nouvelle analyse des résultats des sondes Viking, selon le magazine britannique The New Scientist.

L'un des chercheurs du programme Viking, Gilbert Levin, entend demander publiquement à la NASA de lui redonner le titre de découvreur de la vie sur Mars si Curiosity en détecte des traces.

M. Levin était le chef d'une expérience de Viking qui a ajouté un peu de carbone liquide à une poignée de sol martien; la mixture a émis du dioxyde de carbone (CO2), ce qui normalement est le signe que des bactéries avaient digéré le carbone.

Quand ces résultats ont été connus en 1977, M. Levin et son équipe ont sablé le champagne et reçu un appel de félicitations de l'astronome-vedette Carl Sagan.

Mais quelques jours plus tard, la NASA lui a appris qu'une autre expérience de Viking n'avait pas détecté de molécules organiques dans le sol martien. Ses résultats étaient donc un faux positif. Le New Scientist rapporte que l'instrument de détection des molécules organiques s'est par la suite révélé peu sensible, ce qui signifie que M. Levin pourrait avoir été victime d'un faux négatif.