Les compressions annoncées dans le dernier budget fédéral ont suscité leur lot d'angoisses, et l'industrie de l'aérospatiale n'est pas en reste.

Les représentants de ce secteur craignent ainsi que les coupes à venir au sein de l'Agence spatiale canadienne (ASC) affectent des programmes de première importance, en plus de forcer des mises à pied parmi les employés, ingénieurs et scientifiques travaillant pour le compte de l'agence fédérale. Ces derniers s'attendent d'avoir une meilleure idée de leur sort dans les prochains jours.

Le budget du ministre des Finances, Jim Flaherty, exige que les ministères et agences fédérales - l'ASC inclus - retranchent dix pour cent à leurs dépenses d'ici trois ans.

Les documents budgétaires montrent qu'on a demandé à l'ASC de sabrer 29,5 millions $ d'ici l'année financière 2014-15, avec des objectifs de compressions plus modestes pour les deux années précédentes.

Les coupes à venir affecteront à coup sûr l'ASC, l'agence n'ayant connu pratiquement aucune augmentation de ses budgets depuis 12 ans, a déploré le président de l'Institut aéronautique et spatial du Canada, Ron Holdway.

Le budget de base de l'ASC, qui relève d'Industrie Canada, se chiffrait à quelque 300 millions $ au cours des dernières années. M. Holdway s'attend par ailleurs à des mises à pied dans les prochains mois, bien qu'on ignore encore pour l'instant quels programmes seront affectés par les compressions.

«D'après ce que je comprends, le gouvernement a demandé aux ministères de se concentrer sur la réduction des frais généraux, et pas seulement sur la réduction des activités», a-t-il estimé lors d'une entrevue avec La Presse Canadienne.

Industrie Canada a indiqué dans un courriel que les fonctionnaires fédéraux et leurs syndicats seraient avisés des détails des changements à prévoir «au cours des prochaines semaines et des prochains mois».

On y sous-entend que quiconque a porté attention aux dernières élections fédérales ne devrait pas se surprendre des compressions annoncées dans le budget Flaherty. «Nous avons reçu un mandat fort pour gérer l'économie et nous faisons en sorte que les programmes aérospatiaux soient conduits avec efficacité et rentabilité.»

M. Holdway a prédit que la mise en application du budget Flaherty ne se fera pas aux dépens des programmes actuels, soulignant toutefois que l'agence spatiale manquerait éventuellement d'argent dans les prochaines années pour financer de nouveaux programmes.

«Ils ont encore des obligations à remplir dans le programme de la Station spatiale internationale (SSI). Et le système de radar satellite Radarsat est toujours en cours, tout comme le télescope spatial James-Webb.»

La firme MacDonald, Dettwiler and Associates (MDA), qui a travaillé sur le satellite Radarsat, a déjà fait savoir que les compressions fédérales entraîneraient des licenciements au sein de l'entreprise. Elle n'a toutefois pas précisé le nombre de travailleurs à qui on devra montrer la porte.

MDA a développé des technologies spatiales et satellitaires pour plusieurs missions, notamment le «bras canadien» installé sur la SSI.

L'entreprise, établie dans la région de Vancouver, a fait savoir qu'après une première lecture du budget, il apparaissait évident que les fonds seraient insuffisants pour assurer la suite qui avait été envisagée pour le programme Radarsat.

Du côté de l'Association des industries aérospatiales du Canada (AIAC) -, qui représente 400 compagnies d'aérospatiale à travers le Canada -, on s'inquiétait plutôt que les compressions ne réduisent l'engagement du gouvernement fédéral dans des projets d'envergure, tels la SSI.

«Bien que nous soutenons cet engagement, nous sommes inquiets face à l'absence de nouveaux fonds pour le renouvellement», indiquait-on dans le communiqué de l'AIAC.

Le ministre de l'Industrie, Christian Paradis, a récemment déclaré que le Canada demeurerait engagé dans la SSI jusqu'en 2020, soit la fin prévue du projet. Le ministre avait toutefois ajouté, lors de l'annonce du 29 février, que les détails de l'accord n'avaient pas encore été ficelés.

Les secteurs manufacturier et des services de l'aérospatiale génèrent plus de 22 milliards $ au Canada, et embauche 80 000 travailleurs.