Le premier détail qui a frappé l'astronaute Robert Thirsk à son arrivée à la Station spatiale internationale, vendredi dernier, est l'abondance de sacs Ziploc.

«Il y en a partout», expliquait hier matin M. Thirsk, au cours d'une conférence de presse en orbite qui était retransmise à l'Agence spatiale canadienne à Saint-Hubert. «Comme tout peut flotter, on s'en sert encore davantage que sur Terre.»L'astronaute canadien, qui entame un séjour de six mois dans la Station spatiale où il fera plusieurs expériences scientifiques canadiennes, a passé la fin de semaine à s'installer. Il commencera les expériences plus tard cette semaine. Il fera notamment en septembre l'essai d'un robot roulant situé à l'Agence spatiale à Saint-Hubert, pour préparer les missions humaines vers la Lune et Mars, qui donneront lieu à des manipulations depuis l'orbite de robots de terrain.

Le Dr Thirsk, qui fêtera en août en orbite son 56e anniversaire, sera aussi responsable du laboratoire japonais Kibo. Il y arrimera la nouvelle capsule japonaise HTV-2, dont le premier vol en septembre permettra de diversifier les sources d'approvisionnement en cargo de la Station. L'ingénieur et médecin né en Colombie-Britannique n'est pas à court de premières: avec son séjour de six mois, il bat son propre record canadien de séjour dans l'espace (18 jours en 1996). Et il est le premier Canadien à voler en capsule Soyouz. «C'est assez différent de la navette, a dit M. Thirsk de l'espace. C'est très facile. Les deux premières minutes en navette sont éprouvantes, ça vibre de partout. Disons qu'on ne peut pas lire un livre.»

C'est la première fois que la Station spatiale compte son effectif prévu de six astronautes. En prévision de l'arrivée des trois nouveaux astronautes à bord de la capsule Soyouz, l'équipage a dû déplacer l'endroit du dîner et du souper. Jusqu'à maintenant, la table était mise dans le module de service russe, mais il est trop exigu pour six. L'équipage mange maintenant dans l'un des halls de connexion entre les différents modules.

Dans sa «trousse de vol officielle», qui reflète la science canadienne, Robert Thirsk a amené avec lui trois objets montréalais: une photo autographiée de Jean Béliveau, son idole depuis qu'il a étudié à l'Université McGill, un dissecteur utilisé dans les années 20 à l'Université McGill par le célèbre neurologue Wilder Penfield, et un interféromètre utilisé par le premier astronaute canadien, Marc Garneau, au cours de sa première mission à bord de la navette en 1984. Il installera aussi un drapeau du Canada dans la station, qui ne compte pour le moment qu'un écusson de l'Agence spatiale canadienne. L'astronaute québécoise Julie Payette rendra visite à son collègue à la mi-juin à bord de la navette Endeavour. Ce sera la première fois que deux Canadiens se trouvent en orbite en même temps.

Hier en conférence de presse, les six astronautes de la Station ont confié que la perspective d'être 13 dans la station pendant 16 jours, la durée de la mission de la navette, les laisse songeurs. La table des repas risque d'être trop petite où qu'on l'installe.

Huit expériences

Voici les expériences scientifiques que fera Robert Thirsk durant son séjour de six mois dans la Station spatiale:

> Contrôle cardiovasculaire et vasculaire cérébral au retour de l'espace: des astronautes se sont déjà évanouis en touchant le plancher des vaches, on veut comprendre si c'est un effet courant.

> Corps dans l'espace: en apesanteur, l'humain perçoit-il le haut et le bas d'un objet à partir de sa vision ou de ses impressions corporelles ?

> Expérience sur les plantes: la formation du bois des plantes est-elle altérée en apesanteur ?

> Alliages binaires à partir de particules colloïdales en suspension: pourrait mener à la création de nouveaux matériaux.

> Instrument de diagnostic optique réglable: cette expérience de diffusion en quasi-apesanteur pourrait mener à des applications en récupération du pétrole, en traitement des matériaux et pour les courants océaniques.

> Convection de Marangoni dans l'espace: la microgravité permet-elle de construire de meilleurs microprocesseurs?

> Inversion d'images dans l'espace: conçu par des étudiants de l'Université internationale de l'espace en Californie, ce projet vise à examiner les effets de l'apesanteur sur la perception des objets en 2D et 3D.

> Avatar: ce robot roulant situé à l'Agence spatiale à Saint-Hubert sera télécommandé de l'espace par Robert Thirsk, pour voir quels sont les défis qui attendent les missions humaines vers la Lune et Mars. Une partie de l'équipage de ces missions futures restera en orbite, mais pourra aider avec des robots leurs collègues qui auront touché le sol.