D'une zone industrielle de Liège, la petite société belge Cefaly technology s'apprête à faire irruption sur le marché américain, avec un diadème anti-migraine couronnant des années de recherches technico-médicales.

Le principe de l'appareil est d'activer par électrode le nerf trijumeau qui court sous le front et transmet la sensation de douleur au cerveau. Il a reçu à la mi-mars l'approbation de la Food and Drug Adminstration (FDA), l'agence américaine des médicaments.

Selon la FDA, il s'agit du premier appareil médical susceptible de prévenir les migraines, qui taraudent jusqu'à 15% de la population mondiale, des femmes pour les trois-quarts. Le dispositif ne revendique pas plus d'efficacité que les médicaments, mais il épargne aux patients leur longue liste d'effets secondaires.

S'il ne prétend pas soigner la migraine, pathologie réputée jusque là incurable, ce produit pourrait aussi, selon ses concepteurs, freiner l'évolution des migraines épisodiques en migraines chroniques, les plus invalidantes.

Grâce au feu vert américain, Cefaly table désormais «sur une croissance annuelle de 25% de ses ventes, pour au moins les cinq prochaines années», se félicite son dirigeant, Pierre Rigaux.

En matière de technologie médicale, «une course s'est engagée» au niveau international pour exploiter la stimulation électrique des nerfs ou du cerveau dans une série de pathologies, maux de tête, insomnies, épilepsie voire dépression, explique-t-il à l'AFP.

Des muscles au cerveau

Fondée en 2004 par ce médecin de formation de 58 ans associé à un ingénieur électronicien suisse Pierre-Yves Muller, Cefaly technology a réussi à prendre un bon départ en exploitant le savoir faire acquis par son équipe dans le domaine de la stimulation musculaire appliquée à la médecine sportive.

L'idée novatrice a été d'appliquer le principe d'une stimulation externe, alors que les traitements neurostimulants impliquaient jusque là l'implantation d'électrodes en interne, notamment dans la moelle épinière pour le traitement de douleurs chroniques.

Selon M. Rigaux, là réside la clé du marché américain: «Aux Etats-unis, un traitement nouveau, non invasif et non médicamenteux est tout de suite perçu comme positif, alors qu'en Europe, le médicament, et les méthodes déjà éprouvées, restent la référence».

L'Europe reste toutefois dans l'immédiat le premier débouché des diadèmes anti-migraine, avec 80.000 appareils vendus depuis 2009. Selon M. Rigaux, c'est désormais ce que Cefaly pourrait vendre en huit mois aux Etats-Unis, de quoi doper un chiffre d'affaire resté modeste, à 3 millions d'euros en 2013.

Conscient de son statut de «David face aux Goliaths» de l'industrie pharmaceutique, la micro-entreprise de 10 salariés entend aussi mettre à profit sa participation au programme de recherche anti-migraine Eurodheadpain, financé à hauteur de six millions par la Commission européenne.

«Nous sommes la seule société de ce partenariat impliquant onze universités, ce qui met à notre disposition un savoir formidable», s'enthousiasme M. Rigaux.

De quoi nourrir de nouveaux projets, au croisement des progrès enregistrés par la neurologie et la technologie, comme le développement de la stimulation transcranienne via deux électrodes placés sur le front et l'occiput.

Une technique qui, en permettant d'augmenter ou d'inhiber l'activité spontanée du cerveau, est prometteuse «pour les comas, ou les maux de tête non-migraineux», selon M. Rigaux.