Un singe réussit par la pensée, transmise par des électrodes, à bouger le bras d'un autre primate temporairement paralysé par des anesthésiants afin qu'il exécute ses ordres, selon une expérience d'interface cerveau-ordinateur publiée mardi dans la revue scientifique Nature Communications.

Cette expérimentation vise à aider les millions de paralysés dans le monde incapable d'effectuer le moindre mouvement.

Les scientifiques travaillent depuis plus de 25 ans sur la conversion de la pensée en action : ces dernières années, ils ont montré que l'on pouvait, sans même battre un cil, écrire sur un écran ou encore bouger un robot en forme de bras articulé pour boire son café comme l'a fait en 2012 une femme devenue tétraplégique après un accident vasculaire cérébral (AVC).

L'expérience, pendant laquelle la main d'un macaque rhésus (Macaca mulatta) paralysé de façon provisoire avec des produits d'anesthésie, bouge une manette pour réaliser des tâches sur commande de l'autre, a été conçue pour simuler une paralysie totale (quand le cerveau est complètement déconnecté des muscles qu'il cherche à contrôler).

«Nous démontrons qu'un sujet peut contrôler un bras paralysé uniquement par sa pensée», souligne Maryam Shanechi (États-Unis, Cornell University's School of Electrical and Computer Engineering), co-auteur de l'étude.

L'activité cérébrale du singe «maître», enregistrée via des électrodes, passe par un ordinateur où elle est analysée, puis réinjectée sous forme de stimulation neuronale dans la moelle épinière de l'»avatar» endormi. Ainsi l'information sur le mouvement envisagé par le maître (déplacer un curseur sur l'écran pour traquer une cible) est exécuté par l'avatar.

Chaque singe, jouant à son tour le rôle de maître ou d'avatar, a atteint l'objectif dans 84% des cas, selon les chercheurs.

En connectant le cerveau et les muscles d'un seul animal, le mouvement obtenu aurait pu être faussé par des signaux sensoriels provenant de contractions musculaires préservées, selon les chercheurs.

Ces résultats ont d'importantes implications» pour le contrôle des membres chez des blessés de la moelle épinière ou de prothèses chez des amputés, relève un autre spécialiste de génie biomédical Christopher James (Warwick, Grande-Bretagne).

Reste à démontrer que ces résultats, basés sur l'analyse du mouvement prévu plutôt que sur sa trajectoire, peuvent être reproduits chez des patients réellement paralysés et dont les muscles sont affaiblis faute d'avoir servi depuis longtemps.