Une étude française qui affirmait l'an dernier que le maïs transgénique cause le cancer vient d'être répudiée par la revue scientifique qui l'avait publiée. Cette décision a été condamnée par les opposants aux organismes génétiquement modifiés (OGM), qui affirment qu'elle est attribuable aux pressions du géant agronomique Monsanto.

Avec sept autres chercheurs, Gilles-Éric Séralini, de l'Université de Caen, a suivi 200 rats pendant deux ans, ce qui correspond à leur espérance de vie normale. Ils ont observé que les rats nourris de moulée faite de maïs génétiquement modifié souffraient et mouraient davantage du cancer que les rats nourris avec de la moulée sans OGM. Il a fait part de ses travaux à l'automne 2012 dans la revue Food and Chemical Toxicology, dans un livre et dans un documentaire.

«M. Séralini a droit au bénéfice du doute», a expliqué l'éditeur de la revue, A. Wallace Hayes, de l'Université Harvard, dans un communiqué publié mardi pour expliquer la décision annoncée à la fin du mois de novembre. «La révision des données montre clairement qu'il n'y a pas eu de faute scientifique [misconduct]. Mais l'article dans son entier, avec l'affirmation qu'il y a un lien définitif entre les OMG et le cancer, doit être retiré. M. Séralini a été très insistant dans sa croyance que ses conclusions sont correctes. Selon notre analyse, ses conclusions ne peuvent être tirées des données présentées par l'article.»

Sujets d'étude insuffisants

Au coeur du problème se trouve la quantité de rats utilisée. Les normes de l'OCDE exigent, pour une période de suivi aussi longue, au moins 50 rats par groupe suivi. L'équipe de M. Séralini a plutôt choisi d'en prendre seulement 10. Le chercheur de l'Université de Caen a affirmé aux médias français qu'il envisage de poursuivre Food and Chemical Toxicology.

M. Hayes s'est défendu d'avoir cédé à des pressions de Monsanto, le fabricant des semences utilisées. Il affirme qu'il a reçu de nombreuses critiques de biologistes n'ayant aucun lien avec Monsanto.

Dans son communiqué, il précise également qu'un chercheur de l'Université du Nebraska, Richard Goodman, n'avait travaillé que brièvement sur l'article. Des ONG comme GM Watch avaient en effet dénoncé les liens de M. Goodman avec Monsanto. L'éditeur Hayes précise que M. Goodman s'est retiré du comité d'évaluation de l'article à la demande express de M. Séralini.

Les critiques de la décision de la revue Food and Chemical Toxicology ont souligné qu'une étude financée par Monsanto en 2004, qui concluait que les OGM ne causaient pas le cancer, n'a pas été réévaluée en profondeur. L'éditeur A. Wallace Hayes souligne que l'étude de 2004 respectait les critères de l'OCDE, parce qu'elle comportait un nombre adéquat de rats pour sa durée - 20 groupes suivis pendant 90 jours.