Des couples de tortues figées en plein coït ont été découverts dans un gisement de fossiles allemand vieux d'environ 47 millions d'années, ce qui constitue le plus ancien témoignage d'accouplement jamais trouvé chez des vertébrés, indiquent des chercheurs.

C'est sur le site fossilifère de Messel, une carrière désaffectée de schiste bitumineux située près de Francfort (Allemagne), que ces couples d'«Allaeochelys crassesculpta», espèce aujourd'hui éteinte, ont été extraits.

Au-delà de l'aspect anecdotique de cette étreinte fatale, la découverte est riche d'enseignements sur ces tortues d'eau douce préhistoriques mais aussi sur les conditions qui prévalaient sur le site de Messel durant l'Eocène moyen (40 à 50 millions d'années), assurent les auteurs de l'étude publiée mercredi dans la revue Biology Letters de la Royal Society britannique.

«Des millions d'animaux vivent et meurent chaque année et nombre d'entre eux se fossilisent par hasard mais il n'y a vraiment aucune raison que ça arrive lorsque vous êtes en train de vous reproduire. Il est hautement improbable que les deux partenaires meurent en même temps, et les chances que les deux soient fossilisés à la fois sont encore plus maigres», déclare à l'AFP Walter Joyce, de l'Université allemande de Tübingen.

Pour M. Joyce et ses collègues, la preuve est désormais faite que le gisement de Messel, classé par l'Unesco depuis 1995 tant il a livré de trésors fossiles, était un lac volcanique dont les eaux ne devenaient toxiques qu'à grande profondeur, ce qui explique qu'on y retrouve aujourd'hui tant d'animaux préservés.

Les chercheurs jugent en effet «peu plausible» qu'un couple de tortues aquatiques se soit amusé à nager, se faire la cour puis à s'accoupler dans des eaux empoisonnées.

Mais le comportement et le métabolisme des cousines actuelles des Allaeochelys, qui absorbent à travers leur peau l'oxygène contenu dans l'eau et peuvent rester très longtemps en plongée, peut expliquer le sort des infortunées tortues. «Une fois que le mâle a réussi à monter la femelle, le couple reste souvent figé dans cette position avant de se séparer», au risque de «couler à des profondeurs considérables», estiment les auteurs de l'étude.

«Nous suggérons que les tortues ont commencé à copuler dans des eaux de surface habitables et ont péri durant leur étreinte fatale lorsque leur peau a commencé à absorber des substances toxiques» contenues au fond du lac, vraisemblablement produites par des gaz volcaniques ou des matières organiques en décomposition.