Les éruptions du volcan islandais Eyjafjöll, inactif depuis 200 ans, au printemps dernier n'étaient sans doute pas prévisibles, mais le géant de feu et de glace avait donné des signes de réveil plusieurs mois auparavant, selon une étude publiée mercredi.



«Les éruptions ont été précédées de plusieurs mois d'agitation, quand le magma bougeait profondément dans la tuyauterie sous la surface, faisant du bruit sous forme de séismes», résume le Pr Kurt Feigl, de l'Université du Wisconsin à Madison (États-Unis).

Dès la fin de l'été 2009, une station GPS sur le flanc du volcan avait enregistré une légère variation, mettant la puce à l'oreille de Freysteinn Sigmundsson et de son équipe de chercheurs islandais à l'origine de cette étude internationale.

En janvier 2010, la vitesse de déformation de l'Eyjafjöll et le nombre de séismes ont commencé à augmenter, incitant les géologues scandinaves à placer davantage de capteurs GPS près de la montagne.

Durant les onze semaines qui ont précédé la première éruption, le 20 mars, les flancs du volcan se sont dilatés de plus de 15 centimètres sous la pression du magma remontant vers la surface depuis les profondeurs de la terre (plusieurs kilomètres) pour s'accumuler dans des cavités situées dans la montagne.

Une pression telle qu'elle a fini par ouvrir une fissure dans le flanc du volcan, laissant échapper quelque 13 m3 de lave chaque seconde durant plus de vingt jours, jusqu'au 12 avril.

Après deux journées de repos, l'Eyjafjöll avait connu une seconde éruption, plus violente. Cette fois, la lave s'était frayé un chemin à travers la glace jusqu'au sommet du volcan et avait provoqué une réaction explosive, la lave vaporisant instantanément l'eau et libérant les gaz contenus dans le magma.

Il en a résulté le fameux nuage de cendres, projeté entre 6 et 9 km de hauteur et qui a provoqué une perturbation sans précédent du trafic aérien en Europe, avec 100.000 vols annulés et huit millions de passagers bloqués la semaine suivant cette éruption du 14 avril.

«Nous sommes encore en train d'essayer de comprendre ce qui réveille un volcan» mais «si vous observez un volcan durant quelques décennies, vous pouvez savoir quand il commence à s'agiter», en conclut le Pr Feigl.

L'étude, qui fait la Une de la revue britannique Nature, estime que les mêmes processus pourraient être à l'oeuvre dans le réveil d'autres volcans «modérément actifs» comme l'Eyjafjöll et que les signes avant-coureurs d'une éruption pourraient aussi être repérés par des relevés GPS et images satellitaires.

Les précédentes éruptions de ce volcan islandais sont espacées de plusieurs siècles: 920, 1612 ou 1613 et 1821-1823.

«Il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour prédire les éruptions, mais si nous arrivons à visualiser la progression du magma à l'intérieur du volcan, alors nous améliorerons notre compréhension des mécanismes qui sont à l'oeuvre dans l'activité volcanique», souligne Kurt Feigl.